Les deux formations qui se sont produites avant-hier soir ont dialogué avec le public par le biais de leurs instruments. Titi Robin et son ambitieux et très réussi projet les Rives a invité à la méditation et la mélancolie mais également à la fête. La deuxième soirée du Festival international du diwane d'Alger, qui retrouve son lieu naturel certes (le théâtre de verdure Saïd-Mekbel d'Alger) -après une migration à Tlemcen à la faveur de la manifestation Tlemcen capitale de la culture islamique 2011-, mais pas encore son public -toujours si peu présent aux soirées-, a oscillé entre le traditionnel et le moderne. Ouled El Hal (enfants de la transe), formation constituée de quatre musiciens, menés par Mâalem Mohamed Boumazzough (ils étaient cinq pour la soirée d'avant-hier, car l'un des membres du projet les Rives de Titi Robin les avait accompagnés aux Crotales), ont animé la première partie. Entamant leur tour de chant par El ada (t'bel et karkabou), le groupe Ouled El Hal a revisité le répertoire traditionnel des Gnawa, en interprétant notamment Laâfou, Bangoro, Lalla Aïcha et Moulay Abdallah Belhseine. La prestation était également émaillée par des danses, durant lesquelles nous avons eu à découvrir la grande souplesse et adresse des membres de cette formation, lauréate en 2008 du concours “Jeunes talents" du Festival Gnaoua et des Musiques du monde d'Essaouira (leur ville d'origine). Des danses qui rappellent les spectacles d'art-martiaux, notamment la Capoeira, ainsi que l'art de “Abidat Rma". Quant à Mâalem Mohamed Boumazzough, il se distingue dans son jeu sur le goumbri par une parfaite maîtrise du rythme. Une manière de jouer qui rappelle entre autres grands mâalems, Abdesslam Alikane, un des maîtres d'Ouled El Hal. À ce propos, Mâalem Boumazzough soulignera : “Nous avons appris auprès de beaucoup de mâalems, notamment Azouz Soudani, Abdallah, Mahmoud et Mokhtar Guinéa, Abdesslam Alikane, etc. Après le concours d'Essaouira, et grâce à notre manager Ourida Yaker (Tour'n'Sol Prod.) qui nous a beaucoup aidés, nous avons fait une tournée en France avec Loy Ehrlich, Mâalem Saïd Boulhims, Louis Bertignac et Band of Gnawa. Nous avons aussi des albums live mais n'avons pas encore enregistré des disques en studio. Il n'y a pas de studio à Essaouira." De la transe à la méditation, il n'y a qu'une dizaine de minutes ! Ouled El Hal, qui devraient travailler davantage leurs enchaînements, ont cédé ensuite la scène à Titi Robin et son magnifique projet les Rives. Une deuxième prestation qui a charmé le public ; une prestation qui a constitué une escale, un point de chute pour des musiciens, dont le talent se nourrit d'une réflexion sur la musique, comme une manière de rapprocher entre les peuples et les cultures. Les Rives est le résultat de l'enregistrement de trois albums dans trois pays différents : Inde, Turquie et Maroc. Dans chacune des escales qu'il a fait, il a rencontré des musiciens qui se sont joints ensuite au projet les Rives, un mélange de sonorités et de rythmes parfaitement réussi, qui invite à la fois à la méditation mais aussi à la fête. Ce spectacle nous a également permis de découvrir des musiciens d'une grande habileté, jouant sur le bouzouk, le sanrangi et le goumbri. La deuxième soirée a donc été riche en découvertes, et en Musiques du monde, un concept qui suscite la “méfiance" de Titi Robin, qui avait dit, dimanche, lors d'une conférence de presse que “Musiques du monde est un concept commercial", mais aucunement une manière de concevoir une musique. Justement, la musique est un moyen d'évacuer l'ethnocentrisme. S K
