"Je n'ai pas reçu tous les soutiens que la cause méritait. (...) Il y a des divisions au sein de la communauté internationale. Tout cela a compliqué mes devoirs" : c'est par ces propos que Kofi Annan, qui avait été nommé médiateur de l'ONU et de la Ligue arabe en Syrie en février dernier, a expliqué qu'il mettait fin à ses fonctions quand son mandat expirera le 31 août 2012. L'ex-SG de l'ONU n'a pas désigné l'empêcheur de tourner en rond mais tout le monde aura compris qu'il a visé le veto russe et chinois qui protège "le boucher de Damas". Avec sa démission, la communauté internationale est face au mur, sa mission, même si elle n'avançait pas, avait maintenu le contact avec le régime syrien. "C'est une impasse dramatique" pour la France qui assume la présidence du Conseil de sécurité et qui, certainement, a compté sur Koffi Annan pour essayer de contourner le véto russo-chinois. Maintenant, Bachar al-Assad est en atoni complètement, et ce ne sont sûrement pas Moscou et Pékin qui le conduiront à la raison ni même à la realpolitik. Fin diplomate, Annan a compris qu'il n'y a plus aucune chance pour une table de négociations qui, par ailleurs, ne s'était jamais ouverte. Son plan était mort-né dès lors que le régime syrien ne respectait pas le cessez-le-feu. Il n'a pas été question pour al-Assad de négocier une quelconque transition avec ses insurgés qu'il a décrétés comme terroristes, il a intensifié sa répression qu'il a transformée en guerre avec l'entrée en jeu de chars, d'hélicoptères et d'avions de chasse contre ses populations ! Pour le prix Nobel de la paix 2001, les perspectives sont plus sombres avec la militarisation croissante sur le terrain et, selon lui également, l'incapacité du Conseil de sécurité de l'ONU à s'unir pour faire pression sur les protagonistes du conflit syrien, et en premier lieu sur Damas, à cause de l'obstruction systématique de Moscou et de Pékin. Ces deux pays ont mis leur veto à trois reprises à des projets de résolutions occidentaux au Conseil depuis le début de la crise syrienne en mars 2011. Kofi Annan, qui s'était rendu à plusieurs reprises à Damas pour y rencontrer le président syrien, avait proposé aux belligérants un plan de paix en six points prévoyant une cessation des combats et une transition politique. Mais ce plan, appuyé par le Conseil, n'a jamais été appliqué. Il est cependant persuadé que seul son plan pourrait régler la crise syrienne. L'urgence d'un cessez-le-feu, du départ de Bachar al-Assad et d'une transition politique respectant toutes les communautés syriennes est plus pressante que jamais, a conclu le diplomate ghanéen en tirant sa révérence depuis Genève. Le pouvoir syrien a exprimé des "regrets" et accusé les "Etats qui cherchent à déstabiliser la Syrie" d'avoir "entravé" la mission d'Annan, en allusion à l'Occident, à la Turquie et aux pays du Golfe, critiques du régime. Alors qu'il est sous le feu des condamnations internationales pour sa répression de la révolte qui s'est militarisée au fil des mois, le pouvoir de Damas reste ferme dans son engagement "à la lutte contre le terrorisme dans le but de rétablir la sécurité et la stabilité et de protéger les citoyens", et le porte-parole de son ministère des AE continue à chanter que son pays "continue de croire que le seul moyen de sortir de la crise est le dialogue national et la réconciliation, sans aucune intervention étrangère." D. B