Sans nostalgie aucune, mais... ! Ils étaient nombreux, écrivains, dramaturges et universitaires, les plus éminents créateurs du monde arabe, qui, un jour, ont atterri sur le sol algérien. Cela s'est produit dans les années soixante-dix ! Les années de liesse ! Venant des quatre coins du monde, dans leurs imaginaires créatifs l'image de l'Algérie grande était associée à celle de Dib, de Moufdi Zakariya, de Mouloud Mammeri, de Malek Haddad ou encore à celle d'Abdelkader Alloula, de Kaki ou de Lakhdar Hamina. Elle était aussi assemblée à celle de Djamila Bouhired symbole éternel de la liberté, héroïne de la résistance et qui a fortement nourri l'imagination créative des célèbres poètes arabes : Nizar Kabbani, Sayyab, el-Jawahiry, Abdelwahab Bayati ou encore le cinéaste Youssef Chahine. Cette Algérie, sœur jumelle de la liberté, fascinait les écrivains libres. Elle charmait ceux qui défendaient la cause de la libération des peuples. Les noms les plus connus, les plus respectés, en littérature ou en théâtre, ont séjourné dans notre pays. Y a-t-il quelqu'un, aujourd'hui, qui se rappelle du romancier palestinien Afnane El-Kacem, qui a passé une dizaine d'années à Bordj Bou-Arréridj ? Qui parmi nous se souvient du poète syrien Chawki Baghdadi ou encore de Djili Abderrahmane, le poète soudanais le plus moderniste, ou encore de l'irakien Saâdi Youcef... et d'autres ? Mais parmi cette présence intellectuelle remarquable d'écrivains arabes libres et modernes, la scène culturelle et littéraire a conservé davantage deux noms : 1- D'abord le romancier syrien le plus polémique Haydar Haydar, auteur de Walima li aâchab al-bahr (Nachid al mawt) “Festin pour les herbes de la mer (le chant de la mort)" édition Dâr Amwâj, 1988 Beyrouth. Ce roman a été interdit par les censeurs d'el-Azhar. Ecrit en Algérie, à Annaba où l'écrivain a séjourné début des années 1970, le texte retrace une tranche de l'histoire de notre pays. Il décrit aussi avec brio cette ambiance intellectuelle féconde qu'a vécue l'Algérie de cette période d'or. L'Algérie culturellement hospitalière et engagée. Ce roman, par son courage, son style poétique, a soulevé une dizaine de manifestations salafistes. Ils demandaient, tout simplement, l'incinération du roman ! Ahmed Fouad Najm, poète populaire égyptien, fuyant la répression du régime d'Anouar Sadat, accompagné de son camarade le chanteur et musicien Cheikh Imam, débarqua dans notre pays. Accueilli par les étudiants, ses poèmes engagés, pleins d'humour politique, étaient sur toutes les langues. Installé à Alger, le premier souhait d'Ahmed Fouad Najm était de rencontrer Kateb Yacine. Une fois la rencontre réalisée, bien que les deux écrivains parlent deux langues différentes, où l'un ne comprenait pas l'autre, les deux artistes ont passé une nuit en débat, fraternité et compréhension. Mais pourquoi est-ce que, aujourd'hui, aucun écrivain libre ne s'intéresse à l'Algérie ? Pourquoi est-ce que l'Algérie n'attire plus les écrivains de la trempe d'Ahmed Fouad Najm, de Saâdi Youcef ou de Haidar Haidar ? Je suis triste. A. Z. [email protected]