Anthropologue de formation, l'auteur continue de réfléchir sur les problématiques de la mémoire et de l'identité, d'explorer le rapport à l'Autre, de défendre le droit à la différence, dans un contexte mondialisé, de choc des civilisations. La chose la plus importante dans la structure d'une comédie est la chute. Dans "Divorce à la musulmane à Viale Marconi" d'Amara Lakhous, la chute est excellente. C'est même un coup de théâtre ! Après avoir introduit son lecteur dans le quartier haut en couleur de Viale Marconi où plusieurs nationalités évoluent, l'auteur le surprend. Amara Lakhous, installé à Rome (Italie) depuis 1995, adopte le même mode opératoire que pour "Choc des civilisations pour un ascenseur Piazza Vittorio", son premier roman. "Divorce à la musulmane à Viale Marconi" a d'abord été écrit en arabe, et édité en 2010 par Ikhtilef (Algérie), sous le titre "Al Qahira Essaghira", puis l'auteur qui a reçu en 2008 le prix des Libraires algériens, l'a réécrit en italien. En juin 2012, les éditions Barzakh (Algérie), dans le cadre d'un partenariat de coédition avec l'éditeur français Actes Sud, a publié la traduction française. Ce roman, écrit dans un style empathique, et dont le titre rend hommage à un classique du cinéma italien à savoir "Mariage à l'italienne" (1964) de Vittorio De Sica, s'intéresse à Christian Mazzari, un jeune Sicilien sans histoire qui travaille dans un tribunal à Rome, et qui maîtrise parfaitement l'arabe puisque son grand-père est né en Tunisie, et ne l'a quitté qu'à l'adolescence. Un jour de l'année 2005, il est approché par les services secrets italiens qui lui confient une mission d'une importance capitale : la sécurité du territoire est menacée par un groupe d'émigrants musulmans qui préparent des opérations terroristes visant à détruire des monuments italiens. Giuda, son contact, l'informe que le lieu où se prépare cette opération est le taxiphone "Little Cairo", situé dans le quartier de Marconi. Christian le Sicilien devient ainsi, pour les besoins de cette opération, Issa le Tunisien. Tout semble aller pour le mieux dans cette opération d'infiltration jusqu'au moment où l'amour vient tout transformer. Issa le Tunisien tombe sous le charme de Sofia l'égyptienne, qui rêve de devenir coiffeuse. On ne dira pas davantage sur les aventures de Christian/Issa, en proie à plusieurs questionnements. Avec ce roman, Amara Lakhous, anthropologue de formation, continue de réfléchir sur les problématiques de la mémoire et de l'identité, d'explorer le rapport à l'Autre, de défendre le droit à la différence, dans un contexte mondialisé, de choc des civilisations. Il esquisse une réflexion sur la diversité, et son sens, en se jouant de tout ce que peut intégrer le concept d'identité. Il commence par le nom du personnage principal qu'il transforme à chaque fois : Dans "Choc des civilisations pour un ascenseur Piazza Vittorio", le protagoniste central, Ahmed, est devenu Amedeo ; dans ce nouveau texte, Christian devient Issa. Amara Lakhous, souvent ironique, parfois sans concessions, propose un roman subtil, avec des jeux de rôles, des situations parfois décapantes, et des personnages ordinaires qui sollicitent bien souvent l'indulgence et la bienveillance du lecteur. S K