Permettez-moi de rêver un petit chwiya. Les grands rêveurs sont des révolutionnaires et des poètes, nous a appris Moa. Et je ne suis ni des premiers ni des seconds. Mais, dès qu'il s'agit de l'avenir du livre dans mon pays, je me trouve ensorcelé par le rêve. Le rêve est une force magique contre la mort. Energie, jouvence qui hante l'individu et habite les peuples. Le peuple qui rêve est un peuple en bonne santé, en politique, en social comme en culturel. Les meilleurs rêveurs des peuples contemporains sont les Japonais et les Chinois. Rêveur, mes chers lecteurs, ne signifie absolument pas endormi ou endormeur ! Ou celui frappé par Hmar ellil (l'âne de la nuit)!! Le peuple qui rêve est celui dont ses citoyens lisent les romans et la poésie. Des statistiques nous révèlent que le peuple japonais est passionné de la lecture, hanté par ses fous génies romanciers à l'image de : Yukio Mishima, Haruki Murakami ou Matsuura Rieko et d'autres ... Lire Kafka sur le rivage de Murakami ou “Pénis d'orteil" de Matsuura ou “La confession d'un masque" de Mishima ... c'est se sentir installé entre la sagesse philosophique, le zen religieux et la folie rêveuse. Le Japonais traverse toute sa vie sur le dos d'un séisme naturel et sur un autre littéraire romanesque. Et dans ce frissonnement continu, il maintient son équilibre, sa citoyenneté profonde. Le Japonais se réveille et rêve la tête dans un roman d'une magnitude de 9 sur l'échelle de Murakami et les pieds dans un tremblement d'une magnitude de 8 sur l'échelle de Richter. Celui qui ne lit pas les romans, ne parviendra jamais à comprendre son peuple. Celui qui ne lit pas la poésie d'amour n'arrivera jamais à aimer son pays. Celui qui ne lit pas la bonne littérature n'atteindra jamais l'extase de sa citoyenneté ! La lecture est la porte de la citoyenneté. Une classe politique qui ne lit pas les bons romans d'amour, arrive, en fin de son chemin, la tête dans le mur de l'histoire. Ainsi, à ses yeux, l'écrivain appartient à la tribu des fous et l'écrit à un travail sans efficience, du rêve “Takhrifat". L'amour chez nous, dans la littérature comme dans la vie, dans ce monde arabo-musulman, politiquement parlant, est une chose bas de gamme. Si le politique dit : l'amour est une faiblesse, une indignité pour les hommes, l'écrivain lui répond : l'écriture d'un beau roman d'amour, est plus importante, pour le pays et pour la culture de la citoyenneté commune, que la constitution d'un parti politique. Permettez-moi de rêver un petit chwiya, avec cette rentrée littéraire! A. Z. [email protected]