Le prêcheur de la mosquée de Finsbury Park a une responsabilité directe dans le massacre des civils pendant la décennie noire. Ses fetwas ont servi de caution aux GIA. Le chef terroriste égyptien, Abu Hamza, vient de perdre son ultime bataille contre les autorités judiciaires britanniques qui ont autorisé, vendredi dernier, son extradition vers les Etats-Unis. La décision a été prise par des magistrats de la Haute Cour, à l'issue d'une longue saga judiciaire et en dépit des tentatives désespérées de ses avocats d'empêcher son transfert. Leur argument a consisté cette fois-ci à faire valoir le dépérissement de sa santé mentale, qui l'empêcherait de se présenter devant un tribunal américain. Or, le sort d'Abu Hamza semblait bel et bien scellé, surtout après le verdict défavorable de la Cour européenne des droits de l'Homme, à la fin du mois de septembre. Sa présence sur le sol britannique était si incommodante au point de faire réagir la reine Elisabeth, qui aurait exprimé son exaspération, dans une discussion privée avec des journalistes. Le clerc égyptien a été remis illico presto entre les mains des américains en compagnie de quatre autres présumés terroristes, d'origines diverses, connus pour être des membres d'Al-Qaïda. Ses propres crimes, tels qu'inventoriés par la justice US (11 chefs d'inculpation) résident, entre autres, dans sa participation, en 1998, à l'enlèvement de 18 touristes occidentaux au Yémen. Il est aussi accusé d'avoir envisagé de mettre en place un camp d'entraînement djihadiste aux USA en 1999. Bizarrement, il a fallu attendre 2004 pour qu'un juge new-yorkais décide de l'inculper et demander son extradition de Grande-Bretagne où il s'était improvisé, des années durant, mufti de la haine. Mais avant les attentats du 11 septembre 2001, personne ne semblait, ni à Washington et encore moins à Londres, mesurer la gravité de son discours. Chez nous, en revanche, le nom d'Abu Hamza résonnait comme une sentence de mort. De la mosquée de Finsbury Park, au nord de la capitale britannique, où il officiait en qualité d'imam, il lançait des appels au djihad en Algérie. Ses fetwas autorisant les massacres de civils ont servi de caution morale aux GIA. Se vantant auprès de jeunes recrues d'avoir fait la guerre en Bosnie et en Afghanistan — où il prétend avoir perdu un bras et un œil — l'imam s'est chargé d'envoyer des dizaines d'algériens faire leurs classes dans le bourbier tchéchène ou dans des camps d'entraînement au Pakistan et au Yémen. Certains ont, par la suite, rejoint les maquis terroristes en Algérie. D'autres, sous ses ordres, se sont investis dans la collecte de fonds pour financer les GIA. Des individus, comme le Français Zakaria Moussaoui, impliqué dans la préparation des attentats du 11 septembre, aurait fait plusieurs séjours à Londres, où il allait écouter les prêches d'Abu Hamza, à la mosquée de Finsbury Park. Un de ses autres disciples notoirement connu est Richard Reid, un Britannique converti à l'islam et arrêté aux Etats-Unis après avoir tenté de faire exploser un avion de ligne en piégeant ses chaussures. Moussaoui et Reid sont le visage du terrorisme, version World Trade Center, que le monde a découvert le 11 septembre 2001. Les attaques qui ont ciblé les deux tours new-yorkaises ont eu lieu alors que l'Algérie venait de boucler une décennie sanglante dont les crimes portent la signature d'Abu Hamza et d'autres chefs terroristes de son acabit. Mais pendant ces années-là, le prêcheur de Finsbury Park était juste un imam qui officiait en pleine rue, face à des fidèles parfois encagoulés et que des agents de Scotland Yard se contentaient d'observer, indifférents !