Les spécialistes présents hier ont révélé la contradiction dans la démarche des autorités quant à la lutte contre le cancer. Le centre anticancer Emir-Abdelkader a organisé hier les premières journées internationales d'oncologie à l'hôtel Méridien d'Oran. Les spécialistes et oncologues, regroupés pour cette rencontre ayant pour thème “le cancer bronchique", ont à nouveau tiré la sonnette d'alarme devant la situation que subissent les malades d'une part et la difficulté qu'ils ont à assurer leurs missions dans des conditions très particulières. Le professeur Salim Chafi, du CHU Mustapha-Pacha d'Alger, a déclaré : “Nous sommes dans une situation catastrophique, les trois quarts des cancers du poumon sont diagnostiqués à un stade très avancé et quand on sait que ce cancer ne guérit pas, nous sommes contraints à faire de l'accompagnement..." Et d'ajouter :“Aujourd'hui, cela empire, nous sommes dans une situation grave avec une incidence de 25 à 30 cas pour 100 000 habitants et cela augmente !". Ce dernier qui partage le même constat avec ses collègues spécialistes et oncologues ne comprend pas pourquoi les pouvoirs publics ne prennent toujours pas conscience de la nécessité vitale de mettre en place une véritable politique de santé. Pour ce professeur, il ne suffit pas de construire des centres anticancer. Il faut aussi investir dans les hommes et surtout en donnant corps à la prévention. “Combien de consultations antitabac sont faites ? Combien de centres de sevrage existe-t-il ? Une consultation antitabac coûte zéro DA. Nous avons élaboré un programme de lutte contre le tabagisme, première cause du cancer bronchique et, depuis 2008, il n'a toujours pas été lancé parce que l'APN ne l'a pas voté ...", dira-t-il. Un autre éminent spécialiste, le doyen des oncologues algériens, le professeur Louafi Djellali président du comité pédagogique national de spécialité oncologie, a indiqué pour sa part : “Nous avons consacré notre vie à cette lutte contre le cancer et le nombre de malades s'élève de jour en jour... Il faut le dire, le cancer est un problème urgent de santé publique et maintenant c'est un problème politique, la preuve, cette dernière réunion interministérielle. D'ailleurs, le programme présidentiel n'a pas été appliqué, on devait avoir 20 centres anticancer en 2011, un seul a ouvert à Oran. En Algérie nous avons un service de radiothérapie pour 10 millions d'habitants, comment voulez-vous donner des rendez-vous aux malades, ils meurent avant !". Le professeur relèvera une autre aberration, celle de la réalisation de structures anticancer sans que le personnel : des radiologues, des manipulateurs, des physiciens soient formés au préalable. La rencontre d'hier a ainsi permis aux différents intervenants d'interpeller une nouvelle fois les autorités afin que des décisions politiques soient prises rapidement avec cet espoir, même s'il paraît irréalisable dans les circonstances actuelles, que les médecins ne soient plus contraints à accompagner les malades jusqu'à la mort. D. L