Aujourd'hui, c'est le mardi de tous les dangers en Egypte. Les Frères musulmans ont promis de remplir Le Caire de leurs militants pour soutenir le président Morsi issu de leurs rangs. Leurs opposants, libéraux, démocrates et citoyens qui rejettent l'Egypte islamiste, eux, sont déjà sur la place Tahrir... Morsi va devoir composer sinon il risque de subir le sort de l'ex-président pakistanais, Musharraf, chassé après un bras de fer avec ses juges. Les assemblées générales des tribunaux dans chacune des 27 provinces égyptiennes ont annoncé un arrêt de travail. La grève des juges égyptiens rappelle celle de leurs homologues pakistanais qui avaient fini par chasser le président Musharraf du pouvoir, pourtant général de l'armée et protégé des Etats-Unis. Le syndicat des journalistes a également appelé à une grève générale. Le président égyptien, Mohamed Morsi, n'arrête pas de souligner que ses pouvoirs élargis étaient “temporaires", appelant à un dialogue démocratique. Il est obligé de composer dès lors que la grogne enfle en Egypte menaçant de se transformer en une sorte de révolution bis contre la dictature islamiste. La protesta de l'opposition anti-islamiste est relayée par les juges et des journalistes qui sont en grève pour protester contre le décret par lequel le président issu des Frères musulmans, qui détenait déjà les pouvoirs exécutif et législatif, a interdit au judiciaire d'examiner des recours contre ses décisions, et ce jusqu'à la mise en place d'une Constitution qu'il entend rédiger à sa mesure. Déjà une première victime de cette seconde intifadha contre un pouvoir dictatorial : un mort à Damanhour, au sud d'Alexandrie, devant le siège des Frères musulmans où des heurts ont éclaté entre militants islamistes et des opposants au président Morsi. C'est le premier mort depuis que le président égyptien s'est doté, le 22 novembre, de pouvoirs élargis en s'engageant dans une épreuve de force avec le pouvoir judiciaire. Morsi, est-il rappelé, s'est arrogé jeudi, dans une “déclaration constitutionnelle", le droit de prendre toute décision ou mesure pour protéger la révolution de 2011, afin, selon son camp, d'accélérer les réformes démocratiques, en particulier la rédaction d'une nouvelle Constitution attendue mi-février. Il a beau clamer que sa décision de nature temporaire n'est pas destinée à concentrer tous les pouvoirs et qu'il remettra ses nouvelles prérogatives à un Parlement démocratiquement élu, l'ex-leader des Frères musulmans n'a pas convaincu ni l'opposition libérale et démocratique ni les Egyptiens qui refusent de tomber dans une dictature islamiste après s'être débarrassés de celle de Moubarak et surtout de la chape militaire dans la gestion politique. Les détracteurs du président l'accusent de se comporter, comme son prédécesseur, en pharaon, et de mettre en péril les acquis de la révolution et l'indépendance du pouvoir judiciaire. Aujourd'hui, mardi, est considéré par les Egyptiens comme une journée de tous les dangers. Les Frères musulmans, dont est issu le président, ont appelé à une manifestation massive au Caire, mais dans un lieu éloigné de l'emblématique place Tahrir où les opposants à Morsi ont prévu également un grand rassemblement le même jour. Hier, le président Mohamed Morsi devait rencontrer le Conseil suprême de la justice pour chercher à sortir de la plus grave crise depuis son élection. Pendant ce temps, les manifestations contre le renforcement des pouvoirs du président se sont poursuivies hier pour la quatrième journée consécutive sur la place Tahrir, dans le centre du Caire. Les manifestants ont dressé des dizaines de tentes et campent depuis vendredi en prévision d'une grande manifestation prévue mardi pour protester contre les décisions de M. Morsi. Un grand nombre de citoyens ont, en outre, participé aux funérailles du jeune homme tué la veille dans des heurts devant le siège du mouvement des Frères musulmans au Caire. D. B