La lecture de la liste de ces sénateurs, dont certains en sont à leur troisième mandat, conforte la tendance à l'immobilisme institutionnel. Le renouvellement partiel des membres du tiers présidentiel du Sénat a consacré le repêchage des ministres limogés. N'ont pas eu cette chance deux ministres, Nordine Moussa et Nacer Mehel. Ces deux derniers ne bénéficient ni d'attache politique ni de soutien. L'un est technicien, propulsé par un concours de circonstances dans l'Exécutif. L'autre a occupé, un moment, un poste fragile tant il a toujours été sacrifié. Celui de la communication où les locataires survivent rarement. Ce qui est surprenant est, cependant, la remise en scène des ministres les plus impopulaires à peine limogés. Un limogeage perçu comme une véritable sanction de leur gestion. Ainsi donc, les Benbouzid, Barkat, Ould-Abbès, Djiar... ne sont pas finis. Et le Président vient avec leur nomination de leur renouveler sa confiance. Mieux, cela ressemble à une prime à “l'incompétence" ou à la paresse. Car, si ces ministres ont été remerciés pour avoir échoué, que peuvent-ils apporter dans une Assemblée qui est déjà docile ? Quel sera leur apport pour “les réformes politiques profondes" préconisées ? Et Bouteflika qui a promis le changement semble s'être ravisé pour se maintenir dans l'axe de la continuité. Une ligne qu'il garde également avec le maintien de plusieurs sénateurs, à l'image de Abdelkader Bensalah, Yacef Saâdi, Zohra Drif-Bitat ou encore Ali Mahsas. Le maintien de Bensalah peut signifier sa reconduction à la présidence du Conseil de la nation. Le vote aura lieu demain. Cela alors que Bensalah figure parmi les candidats à la succession d'Ahmed Ouyahia à la tête du RND. Autre surprise, la nomination des deux redresseurs, El-Hadi Khaldi et Salah Goudjil qui peut être interprétée comme un message à Belkhadem qui fait face à une crise qui dure depuis trois ans. Même si Goudjil n'est plus le coordinateur, il demeure l'un des piliers du mouvement de redressement du FLN. Et là, la symbolique vaut valeur d'acte politique. Cela d'autant que les redresseurs ont saisi le Président, président du parti, sollicitant son intervention pour éjecter Belkhadem. Mais le transfert des ministres limogés au Sénat sonne comme une récompense et un signe de la tendance globale de l'immobilisme. Cela au moment où la population réclame le changement que le Président lui-même avait signifié lors de son discours du 8 mai dernier à Sétif. Le Président qui “décrétait" la fin de sa génération prend ainsi à contrepied ceux qui l'ont pris au mot. Avec ces désignations au Sénat, il confirme son attachement à cette génération “fruit déjà mûr" qui n'a aucune confiance en la jeunesse. Changement dans la continuité qui n'aura aucun effet sur l'ouverture envisagée si tant est qu'il y a une volonté de réformer profondément le système. Indirectement, le Président rectifie le tir. Il reconnaît l'échec de son Exécutif, le limoge, mais le remercie autrement avec des postes ne nécessitant aucun effort. Aucune compétence particulière. Et des hommes qui “ont vieilli" dans le gouvernement se retrouvent parachutés au Sénat après avoir réussi un magnifique échec. Leur seule réussite est dans leur cote d'impopularité qui est restée croissante. Le Président les a gratifiés. D B