Voilà qu'on arrive à parler des conséquences économiques comme autres dommages collatéraux de l'attaque barbare d'In Amenas. Il y a quelques jours, l'heure était encore aux tergiversations des pseudo-experts internationaux qui s'évertuaient à donner des leçons en matière de lutte antiterroriste, à partir de leurs douillets fauteuils des studios et bureaux cossus. Aujourd'hui, après avoir reconsidéré leurs critiques et fait leur mea culpa, ils reconnaissent enfin la complexité de l'opération et le mérite de l'intervention armée algérienne. Désormais, on s'évertue ici et là, à supputer sur les impacts économiques de cette agression criminelle. Mais, comme le dit si bien un vieil adage populaire : “Koul mardh, âan'dou d'wah" (à chaque mal, son remède !) Aussitôt l'information de l'attaque terroriste donnée, les prix du marché de Londres ont enregistré leurs premiers signes de nervosité. Même le légendaire Lucky Luke n'aurait pas dégainé aussi vite ! En effet, selon “Jeune Afrique" de vendredi dernier, en quelques heures, les prix du gaz ont connu une augmentation de 4,4%. Et d'après “le Financial Times", les volumes de gaz à l'arrivée en Italie auraient déjà baissé de 10 millions de mètres cubes par jour... Cette sombre histoire a certes entraîné l'arrêt de la production sur ce site qui produit essentiellement du gaz et un peu de condensat à hauteur de 50 000 barils/jour environ, mais, sans grande conséquence. Un apport jugé d'ailleurs, d'anecdotique sur les 1,18 million de barils de brut/jour, produits par l'Algérie. “Cela peut créer un peu de volatilité, mais cette attaque en soi ne va pas entraîner de hausse sensible des prix...", a assuré Céline Antonin, économiste spécialiste du secteur pétrolier pour l'Office français des conjonctures économiques (OFCE). Pour le pire et le meilleur ! Le site d'In Amenas assure 9 milliards de mètres cubes de gaz annuellement, soit, quelque 12% de la production nationale, représentant près de 18% du volume exporté. Au prix actuel du gaz, ce complexe rapporte près de 4 milliards de dollars par an. En 2011, avec une production de 78 milliards de mètres cubes, l'Algérie occupait le 9e rang mondial des pays producteurs de gaz naturel. Globalement, l'exportation des hydrocarbures représente 98 % des recettes en devises de l'Algérie. À première vue, les conséquences économiques liées directement à l'interruption momentanée de la production ne sont pas très importantes. Il y aurait d'autres effets indésirables à considérer, tout autant. Le spectre du terrorisme. Ce fantôme qui a si longtemps hanté les Algériens et que les hôtes de l'Algérie découvrent aujourd'hui. A priori, le risque serait de voir les compagnies pétrolières étrangères, céder à la peur. L'opération d'In Amenas a en effet ravivé bien des souvenirs. On se rappelle tous que pendant la décennie noire des années 1990, l'Algérie s'était retrouvée complètement isolée. Mise en quarantaine à cause d'un mal qu'elle n'avait ni choisi ni provoqué. En ce temps-là, le monde entier pensait que le terrorisme, ça n'arrivait qu'aux autres ! Mais, depuis, l'hydre terroriste s'est exportée... Les temps et les esprits, ont eux aussi changé. On voit mal aujourd'hui les partenaires économiques de l'Algérie reculer devant un péril, aussi risqué soit-il. Dans une alliance, même d'affaires, on est uni pour le pire et le meilleur. Et, n'est-ce pas que l'union fait la force ? C'est certainement la meilleure preuve de force, avant les armes. En rangs serrés, aucune vermine avide de sang ne s'y risquerait. Et, apparemment, ce sentiment semble être partagé par les quelques 500 entreprises françaises en Algérie. Elles n'envisagent pas de partir. “H'na y'mout Kaci !" J'y suis, j'y reste ! Sans tergiversations, la réponse est vite tombée du côté de la France. “Les entreprises de l'Hexagone ne pensent pas se retirer du marché. Les 500 entreprises françaises implantées en Algérie ont renforcé leur sécurité mais n'envisagent pas de quitter le pays après l'attaque meurtrière d'un site gazier par un commando islamiste. Il n'est pas question pour ces entreprises françaises de quitter la région!", a assuré Laurence Parisot, présidente de la principale organisation patronale française, le Medef. Les entreprises françaises continueront donc à évoluer sur le territoire algérien. Ça a été dit sans ambages. Mais, qu'en sera-t-il pour toutes les autres ? Ben, la réponse est à chercher dans les mémoires du mouton de Panurge. C'est-à-dire qu'il ne leur restera qu'à suivre le comportement des autres sans se poser trop de questions. Les observateurs pensent en effet que vu les intérêts qu'ils ont à préserver en Algérie, les partenaires étrangers continueront à être présents en investissant davantage sur des systèmes de sécurité, beaucoup plus sûrs. Même si cela va se traduire par une légère répercussion des coûts de production, sur les prix. Mais, ne dit-on pas que la sécurité n'a pas de prix... même si elle a un coût ? Somme toute, si les prix des hydrocarbures peuvent être sujets à négociation, la sûreté de l'Etat et des personnes, ce n'est pas un business. Aujourd'hui, le message a été assurément reçu 5 sur 5. A bon entendeur ! R. L. [email protected]