“Peu importe la coupe, pourvu qu'on ait l'ivresse”. Le congrès du mouvement de “redressement” du FLN, ouvert jeudi 22 janvier à l'hôtel El-Aurassi, à Alger, n'aura pas failli aux prévisions : un “je ne sais quoi” de rencontre, organisée dans la précipitation, avec des convives d'horizons divers, dans une cacophonie indescriptible et dont la finalité faussement dissimulée était d'arriver à l'essentiel : apporter une motion de soutien à Abdelaziz Bouteflika. Si les “congressistes” ont réussi autant faire se peut à adopter tôt dans la matinée de vendredi, quatre projets de texte qui seront soumis à la base et une motion de soutien à Bouteflika, le choix des délégués et les ambitions manifestes de certaines figures de proue du mouvement d'être propulsées à la tête du “FLN”, par “délégués” interposés, a en revanche suscité la tension et failli semer la zizanie. Prévu à 10h, “le congrès” a été reporté dans un premier temps à 15h avant de commencer finalement vers 17h30. Et pour cause : Les trois tendances qui traversent désormais le mouvement, représentées successivement par Kara, Si Affif et Barkat en compagnie d'autres responsables du mouvement, se réunissaient, selon des sources fiables, à l'hôtel Moncada, dès le début de la matinée. Objet du conclave : fallait-il organiser un congrès comme le souhaitait Si Affif et sortir avec une nouvelle direction, ou le report comme le demandaient ses vis-à-vis. Finalement, ils tombèrent sur un compromis après que le tonitruant Hadjar eut menacé de quitter le conclave et d'appeler à une conférence de presse pour faire des déballages. “Je suis contre l'éclatement du FLN”, aurait-il déclaré. Le compromis, c'est un congrès d'étape qui se chargerait de débattre des projets de textes en attendant le congrès réunificateur pour l'après-présidentielle. Sans plus. À 15h, un autre problème surgit : certains délégués n'avaient pas de badges comme ceux de Tizi Ouzou, de Boumerdès et d'Alger. La moitié des délégués de Constantine, dont le nombre excédait les 47 personnes, empêchés de pénétrer à l'intérieur de la salle, commencèrent à pester : ils accusaient le ministre Haïchour d'avoir changé la liste des délégués. “On ne doit pas trahir Bouteflika”, tente, à sa manière, de les calmer un responsable. À vrai dire, il n'y avait pas que la délégation de Constantine qui avait le problème de représentativité. De nombreuses wilayas étaient représentées par au moins deux listes différentes, selon “le camp” auquel on appartient. Des accusations croisées fusaient : on accusait pêle-mêle Si Affif, Barkat, Haïchour. Si Affif posté à la porte d'entrée avait du mal à contenir l'impatience des “délégués”. Autant il craignait l'infiltration apparemment des “éléments” pro-Benflis autant il refusait à quiconque d'entrer sans le badge requis. C'est alors que commencèrent les bousculades. Le ministre Ould Abbès a dû jouer des coudes pour se frayer un chemin. Ayant du mal à contenir sa colère, Tahar Zbiri quitte les lieux et ne reviendra que suite à “un coup de fil”. Certaines délégations qui ont pu entrer par “effraction” seront éconduites à l'extérieur quelques minutes plus tard. Devant la tension qui commençait à monter et les lamentations de nombreuses “délégations”, Belkhadem lance un appel pour laisser tout le monde accéder. “Il y a des contestations car dans certaines wilayas, on nous a créé des délégations parallèles à celle des élus. Finalement, on a décidé de laisser entrer tout le monde”, a expliqué Belkhadem peu de temps avant l'ouverture des travaux. À l'intérieur, il y avait tellement de monde qu'il n'était pas aisé d'identifier les présents. Toutefois, on a pu relever la présence de militants RND, d'étudiants en nombre très élevé dont certains se revendiquaient de l'UGEA, d'autres de l'ARE. Il y avait aussi la présence de Boualem Bessaïeh, de l'ex-ministre de la Culture Abbou, de Bouderbala ancien officier de l'ALN et des ministres “redresseurs” et d'un curieux coordinateur national des zaouïas venu d'Oran selon ses dires pour “soutenir Bouteflika, sans plus”. C'est dans une cacophonie générale que Belkhadem tente de se faire entendre alors que certains levaient des mains en scandant “Bouteflika-FLN”. Dans un climat de foire, Belkhadem se retire avec ses lieutenants pour désigner le bureau au moment où des “délégués” de Mostaganem tentent de prendre d'assaut le bureau. Ceux de Sétif expriment bruyamment leur désapprobation alors que ceux de Médéa quittent la salle. Ce n'est que vers 17h30 que les travaux ont pu commencer et que les 4 commissions furent installées. Une installation qui a suscité du reste des mécontentements. Dès 21h, la salle commençait à se dégarnir, les congressistes étaient visiblement pressés de rejoindre leurs lieux d'hébergement. Alors qu'hier, l'on s'attendait à une conférence de presse, l'on apprendra seulement, par Kara, que les textes et la motion avaient été adoptés. Sans plus. Le rideau était tombé avec cependant ce constat unanime : ça ressemblait à tout sauf à un congrès. K. K.