Bouira est classée parmi les cinq premières wilayas à l'échelle nationale en matière de production de pomme de terre. La plaine des Arribs d'Aïn Bessem est une région où la pomme de terre est devenue au fil de ces dernières années un filon où plusieurs producteurs de tubercule activent dans d'immenses parcelles. C'est le cas de Slimane Moussa, producteur spécialisé depuis plus de dix ans dans la culture de la pomme de terre. Ce dernier dispose de 18 hectares à une dizaine de kilomètres au sud-ouest d'Aïn Bessem, sur la route menant vers Raouraoua. Pour cette saison, c'est la variété Fabula qui est exploitée dans son domaine. Une variété toute nouvelle en Algérie, issue d'un croisement entre la Monalisa et la Hudson. Il faut dire que les pommes de terre récoltées ici sont de qualité supérieure, et par leur calibre et par la blancheur de leur robe. M. Slimane affirme cependant que pour arriver à cette qualité, beaucoup d'efforts ont été consentis, de même qu'un investissement considérable. "J'ai acheté la semence de première qualité au prix de 120 DA le kilo, le terrain a été traité avec beaucoup d'engrais soluble et vitaminé et chaque 15 jours, je débourse entre 18 et 26 millions de centimes pour le traitement contre le mildiou, la teigne, les acariens, etc." De plus, notre interlocuteur affirme que la main-d'œuvre se fait rare et coûte de plus en plus cher. "Je dispose d'une cinquantaine d'ouvriers, parfois plus et ce chiffre peut être multiplié par deux, voire par trois si les saisons sont propices. Chaque ouvrier est rémunéré à raison de 50 000 DA par mois, logé, nourri, blanchi et toutes leurs dépenses sont à ma charge. En plus, j'embauche souvent des journaliers pour récolter les pommes de terre arrivées à maturité et ces jeunes sont payés à hauteur de 50 DA le cageot qu'ils rempliront de tubercules." Avec autant de frais, cet exploitant agricole estime que pour cette saison, il n'engrangera aucun bénéfice, et c'est tout juste s'il pourra amortir son investissement entre la location de la terre (80 000 DA l'hectare et par saison), les dépenses liés au mazout et à l'eau, la rémunération des ouvriers, les traitements phytosanitaires... Le Syrpalac décrié Pour M. Slimane, la vente de sa récolte n'est également pas une mince affaire, d'autant plus que les cours de la pomme de terre varient d'une journée à l'autre. "Aujourd'hui, nous avons deux camions qui viennent d'embarquer leur chargement de pomme de terre à raison de 21 DA le kilo, mais hier, nous l'avions cédé à 19 DA, les prix sont décidés par les grossistes. Nous, nous ne faisons que nous conformer au marché." Interrogé sur le Syrpalac, Système de régulation des produits agricoles de large consommation, l'exploitant agricole sortira de ses gonds. "Pour moi, ce sont des voleurs ! C'est une entreprise légale qui vole de pauvres fellahs, je n'ai jamais vendu de patates au Syrpalac et je ne leur en vendrai jamais... Si cet organisme intervenait toute l'année sur nos productions oui, ce serait bien, mais il intervient uniquement durant la saison des patates et toujours en retard. La preuve, nous avons commencé la saison et aucun signe de vie de ce Syrpalac. En plus, il nous exige de lui vendre la pomme de terre à 20 DA le kilo, avec à nos frais, le transport, le sac et le déchargement, ce qui nous fait un prix de revient estimé entre 15 et 16 DA le kilo." À ce prix, ajoute notre interlocuteur, mieux vaut passer outre cet organisme et vendre directement aux commerçants. Des commerçants algériens mais aussi une importante firme hollandaise qui s'est rendue récemment dans les champs de patates de la région. Une sorte de prospection discrète puisque les services de la DSA de Bouira n'auraient pas été informés de cette visite. Ce groupe hollandais se serait montré très intéressé par la production de tubercule de cette localité et il est fort probable qu'après une étude approfondie de ce dossier, les pommes de terre de la région soient embarquées en direction d'Amsterdam ou de La Haye. Une démarche qui, si toutefois elle aboutit, risque de damer le pion à notre Syrpalac. Un rendement à l'hectare variant entre DSA et agriculteurs Le rendement à l'hectare semble être une question qui fâche, et ce, après avoir interrogé les services de la DSA et des professionnels de la pomme de terre. Pour la DSA, qui se montre extrêmement optimiste, le rendement à l'hectare prévu pour cette saison est de l'ordre de 300 quintaux à l'hectare. Toutefois, et selon des producteurs exploitants dans ce secteur, il arrive aisément que ce chiffre soit doublé et on nous chuchote même que 620 quintaux par hectare serait une moyenne vu la qualité produite, surtout si la pomme de terre succède à une récolte de céréales. Un écart flagrant sur lequel personne ne veut s'étaler. Toutefois au niveau mondial, le rendement à l'hectare est évalué à 17 tonnes et se situerait entre 40 et 50 tonnes dans les pays développés d'Europe et d'Amérique du Nord. Pour les services de la DSA de Bouira, cette saison a connu certains couacs dès le début, avec les intempéries à répétition du printemps qui ont empêché les cultivateurs de planter les tubercules jusqu'à la fin avril. Auparavant, la semence des terres s'effectuait entre février et mars. De plus, ce n'est que tardivement que s'est fait la dotation en eau dans les plaines d'Aïn Bessem à partir du barrage de Oued K'hel. Des facteurs auxquels on impute la diminution de la production auprès des services agricoles. Toutefois, M. Mekaouche, cadre de la DSA, estime que pour un rendement de pointe, il vaut mieux travailler la terre car l'année passée, il a été enregistré des pics de 450 à 500 quintaux par hectare. L'objectif pour cette saison est de produire 1 937 hectares de pommes de terre destinées à la consommation et 761 hectares de semence pour l'arrière-saison. Hafidh Bessaoudi Nom Adresse email