La Libye va à veau l'eau. Ses autorités post-Kadhafi sont dépassées par les milices armées qui mènent le pays comme elles l'entendent, alors que l'insécurité règne à Tripoli où les missions diplomatiques ferment leurs portes les unes après les autres. Plus préoccupant pour l'ensemble de la région jusqu'au fin fond du Sahara, le sud du pays après avoir été une plaque tournante du trafic d'armes est devenu un sanctuaire de djihasistes...Le 15 septembre 2011, l'Otan, notamment la France et la Grande-Bretagne se félicitaient à Benghazi, la ville où avait été allumé le "printemps de Tripoli", de l'entrée du peuple libyen dans le monde démocratique ! Le choix de cette date alors que Kadhafi résistait encore n'était pas fortuit. Nicolas Sarkozy, alors locataire de l'Elysée, tenait à faire un pied de nez à Kadhafi qui ne devait être assassiné qu'un mois plus tard. Le président français qui commandita l'insurrection contre son homologue alors qu'une année auparavant, il a déroulé les ors de son palais présidentiel pour lui, lui permettant même de monter sa tente dans une prestigieuse résidence présidentielle de Paris, cherchait à l'abattre psychologiquement en le narguant dans la seconde ville libyenne le jour de la commémoration de sa "révolution verte". Le "guide" a été assassiné dans des circonstances non élucidées le 20 octobre 2011. Deux ans plus tard, la Lybie n'en finit plus de s'enfoncer dans le chaos. Les violences se sont même intensifiées depuis l'été avec une recrudescence des attentats à la voiture piégée et des assassinats, à Benghazi et dans la capitale. Pourtant, les parrains du printemps libyen avaient cru avoir assis le pays en le dotant d'un Parlement, d'une Constitution et d'un gouvernement. Les nouvelles autorités, bien qu'auréolées du soutien des capitales occidentales, peinent à rebâtir un appareil sécuritaire et même une structure étatique. Les milices armées ont refusé de se fondre dans la nouvelle armée et font régner la loi du plus fort, hors de tout contrôle. "Les armes se sont répandues parmi la population et les groupes armés ne sont pas assujettis aux ordres supérieurs", a résumé la mort dans l'âme le premier ministre, Ali Zeidan qui avait été kidnappé puis relâché, dans des conditions troubles, par des milices. Une grande partie du pays échappe au contrôle du gouvernement "légitime" et le risque de partition est vraiment d'actualité. Le gouvernement et les groupes armés se disputent ouvertement le contrôle de la rente pétrolière : les régions pétrolières comme les tribus minoritaires menacent d'entrer en sédition. C'est le cas par exemple des Amazighs qui ont envahi et saccagé le 13 août, le siège du Congrès général national, des Touareg et des Toubous du Sud qui se sentent marginalisés dans la Libye post-Kadhafi. Sur le plan économique, la situation est désastreuse : la production de l'or noir est tombée à 250 000 barils par jour, pour une capacité quotidienne de production de 1,6 million de barils avant la "révolution". Sur le plan sécuritaire, il suffit de relever que le pays est devenu une zone de repli et une base arrière pour les groupes djihadistes. Aqmi, chassé du Nord-Mali par l'opération française Serval y a pris ses quartiers, un appel d'air pour tous les groupes terroristes en activité dans le Sahel saharien, des côtes mauritaniennes à la Somalie en passant par le Niger, le Nigeria, le Kenya...de l'Afrique de l'Ouest jusqu'au Sinaï. Voila le résultat de ce 20 octobre 2011, lorsque le monde découvrit les images sanglantes du dictateur déchu, Mouammar Kadhafi. Quelques heures après, il sera déclaré mort, sans que les circonstances de son décès soient clairement définies. Deux ans après, elles ne le sont toujours pas. Human Rights Watch a réclamé l'ouverture d'une enquête par les autorités libyennes pour que les responsables de ce crime soient jugés, sans succès. L'exécution d'un prisonnier est un crime de guerre. Le son de cloche que le Guide de la révolution verte aurait été liquidé par des barbouzes de Sarkozy n'est toujours pas dissipé. C'est la thèse que soutient le très sérieux quotidien romain Corriere della Sera dans un article paru le 29 septembre 2012. A l'origine de cette allégation, les propos de Mahmoud Jibril, l'ancien Premier ministre du gouvernement de transition et président du Conseil exécutif du Conseil national de transition (CNT) libyen, lors d'une interview diffusée sur la télévision égyptienne Dream TV : "Un agent étranger était infiltré avec les brigades révolutionnaires pour tuer le colonel Kadhafi". La thèse avait été reprise par le quotidien britannique Daily Telegraph sur la base d'entretien avec Rami al-Obeïdi, l'ancien responsable des relations avec les agences de renseignement étrangères pour le CNT, qui avait affirmé sans détour que les services secrets français ont joué un rôle direct dans la mort de Kadhafi. Ce qui est certain, c'est quele convoi de Kadhafi en fuite à Syrte a bien été atteint par des tirs d'avions français. Rami al-Obeidi avait ajouté une information surprenante : "C'est le chef d'Etat syrien qui a transmis le numéro de téléphone satellitaire de Kadhafi aux services secrets français". Localiser le téléphone satellite et son propriétaire aurait ensuite été un jeu d'enfant pour les experts de l'Otan. D B Nom Adresse email