Celui qui était connu sous le sobriquet de "Moha Rossor" (ressort) – en raison de son infirmité motrice et cérébrale, qui lui valait les quolibets acharnés des enfants, jeunes et moins jeunes –, un pauvre hère âgé de 77 ans, qui vivait seul dans un bouge (un dépotoir, plutôt, selon ses voisins), depuis le décès de sa vieille mère des suites d'une intoxication au monoxyde de carbone, est décédé, dimanche soir à l'hôpital d'El-Affroun, accidentellement. Un stupide et cruel accident causé par un énorme pneu de camion semi-remorque lancé par un quidam du haut de la rue El-Qods qui le heurta de plein fouet en le renversant, avant d'atteindre violemment une femme enceinte qui subit le même sort. La nouvelle de l'accident a fortement ému le quartier populaire et populeux de la rue Benaouda-Ali où le défunt vivait. Des jeunes qui avaient le matin même fait des réclamations pour le non-paiement de 4 mois de sa pension de handicapé, et qui, tour à tour, le nourrissaient comme et quand ils le pouvaient, le lavaient et se dévouaient pour de menus travaux de nettoyage de son taudis infesté de rats, ont accouru pour l'assister en veillant au suivi de sa prise en charge au pavillon des urgences (PU) d'El-Affroun, comme au service de neurochirurgie du CHU Frantz-Fanon de Blida où il a été évacué avant d'être reconduit à El-Affroun avec un bilan radiologique et une lettre de liaison attestant que l'"urgence neurochirurgicale est éliminée". Malgré le dévouement de l'équipe de garde du PU d'El-Affroun, le malheureux décèdera peu après. La peine profonde ressentie par les jeunes de son quartier mènera à une révolte générale aux abords de l'hôpital nourrie par un sentiment, vraisemblablement non fondé, de négligence à l'égard du défunt. Le ministre de la Santé, qui achevait une visite inopinée, vers 20h à l'EPH d'El-Affroun, a été accueilli bruyamment, à sa sortie, par les nombreux contestataires qui lui ont exposé les motifs de leurs griefs. Après les avoir écoutés attentivement, le ministre leur a fait des promesses fermes de changement. Mohamed Bouziane, alias Moha Rossor, figure familière d'El-Affroun qui, selon les termes d'un jeune, les larmes aux yeux, "n'avait que Dieu et nous", a été enterré dignement, lundi, par une foule nombreuse. Un bel exemple de solidarité de jeunes nombreux dans ce quartier qui vivent eux-mêmes dans des conditions difficiles (chômage, logement). Comme quoi "el guellil yef'ham el guellil" (le pauvre est mieux à même de comprendre son semblable). F. S Nom Adresse email