Intervenant la semaine dernière lors de la seconde édition des Journées de l'entreprise algérienne, organisée par le Forum des chefs d'Entreprises (FEC), à l'hôtel El-Aurassi, sur l'emploi, la formation et l'employabilité, le professeur Abdelhak Lamiri a estimé que l'analyse macro et microéconomique, en Algérie, révèle trois mythes qu'il faut absolument remettre en cause, circonscrire et dépasser pour espérer dégager des améliorations substantielles. Le premier, selon lui, consiste à dire que l'Algérie est un pays qui dépense quantitativement beaucoup pour le développement des ressources humaines. Le second stipule que notre forme des ressources humaines est de qualité puisque nombreux sont ceux qui réussissent à l'étranger. Et enfin, le troisième qui consiste à dire que tout est perdu puisque la refondation des qualifications humaines nécessite des décennies, voire plus d'un siècle. Concernant les perspectives, l'orateur retient trois scénarios d'évolution les plus probables de l'économie algérienne. Le premier, qu'il qualifie de celui de la continuité, consiste à ce que les pouvoirs publics vont continuer à injecter des ressources dans l'économie pour créer une croissance extensive continue (tirée par la dépense publique). Le marché mondial de l'énergie sera favorable, dans ce scénario. Les recettes serviront alors à financer des projets d'infrastructures qui induiront plus d'emplois et un accroissement du PIB. Dans ce scénario, le taux de chômage officiel serait autour de 8 à 12%, mais celui des jeunes restera supérieur à 20%. L'emploi serait précaire (chantiers). Pour le second, celui de la déchéance, il verra deux évènements conjoints se produisent : les politiques économiques actuelles continueront à prévaloir (succession de plans de relance) mais une situation énergétique défavorable se greffera sur les présentes conditions. Les prix pétroliers seront défavorables. Le pays va consommer ses réserves financières et se trouvera fort dépourvu face aux besoins de 50 millions d'habitants. Les plans de relance cesseront automatiquement. On initie des politiques de rigueur. Le chômage grimpera aux environs de 30 à 40%. L'inflation à deux chiffres réapparaîtra. Dans ce cas-là, Abdelhak Lamiri souligne que "nous risquons alors un enlisement sans pareil dans des turbulences économiques et sociales". Enfin, il y a le troisième scénario, celui de l'émergence. Aux yeux de l'orateur, ce dernier est le plus souhaitable. Il consiste à injecter les ressources dans des activités qui produisent le maximum de résultats pour une économie en transition. Dès lors que l'on s'oriente vers un scénario de ce genre, nous aurions une étape de deux ou trois ans de résultats mitigés, car le passage d'une économie de rente à une économie de création de richesses nécessite un management du changement extrêmement complexe. Mais à moyen terme, nous créerons un développement durable déconnecté des prix pétroliers. C'est l'objectif ultime du processus de transition. Le professeur Lamiri plaide ainsi pour un plan Marshall, vital et urgent de mise à niveau de nos ressources humaines dans deux directions : recycler l'ensemble des citoyens opérationnels et moderniser l'ingénierie pédagogique afin de rehausser les standards de formation au rang mondial. Ce n'est pas simple, estime-t-il, ajoutant que "toute chose sérieuse ne l'est pas". "Il nous faut un vaste programme de concertations autour de la question et donner aux spécialistes les orientations sociopolitiques afin qu'ils construisent les outils et les programmes techniques en fonction du projet de société retenu", conclut-il. S. S. Nom Adresse email