Le général à la retraite, Mohand-Tahar Yala, a lancé à cette occasion un "appel au peuple algérien" dont nous publions ci-après de larges extraits. Mes chers compatriotes, Je me présente humblement devant vous pour vous annoncer que je suis candidat à la présidence de la République. En m'adressant à vous, je mesure tout le poids de la responsabilité qui est la mienne. Avec tous les citoyens et toutes les citoyennes qui me soutiennent, en Algérie ou résidant à l'étranger, ainsi que tous les patriotes sincères, je suis déterminé à aller jusqu'au bout de ma démarche : bâtir cette nouvelle Algérie que vous appelez de vos vœux. Je vous fais ici le serment devant Dieu, si vous me faites l'honneur de m'accorder votre confiance, que je vous dirai clairement ce que je ferai et que je ferai exactement ce que je vous aurai promis de faire. Je vous fais ce serment car je suis profondément croyant, et je crois profondément en vous, en la capacité de mon peuple à transcender ses traumatismes et ses divisions, à se mobiliser pour le salut de l'Algérie afin que, plus jamais, nous ne vivions les tragédies que nous venons de traverser. Cette conviction en moi est inébranlable, même si je sais combien vous êtes désenchantés de la politique et désespérés de trouver enfin les hommes et les femmes dignes de votre confiance, épuisés que vous êtes par l'hypocrisie et les turpitudes du pouvoir en place. Si vous m'accordez votre confiance, nous nous attaquerons immédiatement et frontalement aux causes profondes de cette crise. En premier lieu, en utilisant les moyens appropriés du droit et de la force publique, nous déclencherons une lutte sans relâche et sans merci contre les pratiques maffieuses et la corruption généralisée qui a gangrené le corps social et a laminé toutes nos valeurs au point d'en inverser la hiérarchie. Vous l'avez compris, la première tâche sera d'engager l'action pour éliminer la corruption sous toutes ses formes en réduisant à néant le système politico-maffieux qui a contaminé toute la société en se nourrissant de la violence et du désordre que ce système a lui-même suscités, par l'injustice sociale, la bureaucratie, l'arbitraire administratif et judiciaire. Afin de mener cette bataille capitale pour l'avenir du pays, nous mettrons en place immédiatement un pôle anticorruption regroupant l'ensemble des institutions concernées avec une compétence territoriale nationale. Ce pôle disposera de tous les moyens nécessaires d'investigation pour que les corrompus soient appréhendés, les corrupteurs poursuivis où qu'ils se trouvent, traduits devant la justice pour répondre de leurs actes, et punis avec une sévérité à la hauteur des préjudices économiques, sociaux et moraux commis contre la nation. Tous les responsables, à quelque niveau qu'ils se situent, qu'ils soient fonctionnaires, élus de la nation ou exerçant dans le secteur privé, devront savoir que, dorénavant, le temps de la corruption, du mensonge et de l'impunité est définitivement terminé. Afin de réhabiliter l'honnêteté à tous les niveaux de la société, la justice sera dotée d'un outil puissant en pénalisant le parjure et le mensonge. Mes chers compatriotes, Si la lutte contre la corruption est prioritaire, elle ne saurait être efficiente sans une totale indépendance de la justice, seule habilitée à réprimer les manquements à la loi et à trancher les conflits qui émergent au sein de la société, car force doit rester à la loi. Nous interdirons donc sans tarder toute interférence dans le travail du juge en lui garantissant une totale indépendance pour dire le droit et rendre la justice au nom du peuple. Cette indépendance constitue un grand pouvoir et implique donc une grande responsabilité. Ainsi, aucun magistrat ne sera au-dessus de la loi, dès lors qu'il brisera son serment de probité et d'intégrité inhérent à sa charge. Tout de suite, au niveau de l'institution compétente, le Conseil supérieur de la magistrature, serons mis en œuvre les dispositifs adéquats de contrôle et de sanction. C'est un défi énorme, nous en sommes conscients, mais nous ne nous laisserons pas inhiber ou décourager par l'adversité, parce que toute l'histoire passée et récente de notre peuple, et de l'humanité en général, nous montre que lorsqu'on démultiplie nos forces par la prise de conscience et l'action collective et solidaire, nous sommes capables de franchir avec une facilité déconcertante les plus grandes épreuves qui se dressent devant nous. Ensemble, avec l'aide de Dieu, tout devient possible. Mes chers compatriotes, Pour dessiner les contours du redressement économique et de la reconstruction de notre société, nous ne devons pas avoir peur de regarder les réalités en face. Car si la tâche qui nous attend est énorme, elle est en premier lieu imputable à nos gouvernants qui ont laissé notre pays à la merci de la rapine des puissances étatiques et non étatiques de ce monde et de leurs alliés corrupteurs ou corrompus au point de réduire notre indépendance chèrement acquise à un Etat à la souveraineté limitée. Il y a tout juste quinze ans, le redressement, puis l'embellie des prix des hydrocarbures sur le marché international, alors que nous y sommes pour rien, ont permis à notre pays d'accumuler une manne financière jamais égalée depuis l'Indépendance du pays. Cette manne a nourri un immense espoir, car, selon certains experts, elle aurait permis l'émergence de deux ou trois pays comme l'Algérie. Cet espoir est aujourd'hui déçu, et il risque même de se transformer en cauchemar. Car nos gouvernants ont dépensé des sommes astronomiques qui se comptent en centaines de milliards de dollars pour qu'aujourd'hui encore, notre économie soit plus que jamais dépendante de la rente pétrolière. Nous importons toujours l'essentiel de nos biens de consommation et de nos biens d'équipement, lesquels sont produits avec les matières premières non renouvelables que nous exportons. Au final, l'argent qui nous est donné d'une main nous est toujours repris de l'autre. Pire, nous payons au prix fort une économie de bazar, immense déchetterie à ciel ouvert alimentée par les sous-produits de la mondialisation, et pour lesquels la plupart de nos concitoyens sont obligés de se saigner pour les acquérir. Les logements sont distribués sous forme d'un assistanat transformé en aumône publique, et qui ne répond pas toujours au principe d'équité, dans le seul but d'acheter la paix sociale. Des logements vétustes, à peine construits, tout de suite délabrés, dans une urbanisation inexistante où règne l'anarchie, une architecture défigurée où la médiocrité du paysage urbain et rural se reflète dans la pollution de nos rues et de nos quartiers. Le peu d'efficacité du système d'éducation a été anéanti et les contradictions idéologiques en son sein, qui ont contribué à la crise identitaire, ont été exacerbées au lieu d'être résorbées. Comme si une volonté destructrice maléfique était à l'œuvre pour désorienter et empêcher par tous les moyens nos enfants d'accéder à une éducation de qualité, créant ainsi les conditions d'un retour de notre peuple aux heures sombres du colonialisme, lequel avait fait de l'analphabétisme et de la division les armes maîtresses de sa domination. Il en est de même pour la politique de santé publique, laquelle se caractérise précisément par l'absence de politique tout court, malgré des budgets énormes et la présence d'un personnel médical dont la compétence est reconnue par la communauté scientifique internationale. Il est vrai que le pouvoir excelle davantage dans la construction de prisons à forte capacité de destruction mentale et sociale pour nos jeunes que dans la construction de services de santé publique dignes de ce nom. Combien de nos compatriotes meurent de maladies graves, et même parfois bénignes, faute de prise en charge par un corps médical désemparé, privé des moyens nécessaires à l'exercice de sa noble mission ? Seuls ceux qui ont les moyens s'adressent alors aux cliniques privées dont la moindre des opérations peut coûter la bagatelle de plusieurs mois de salaires. Sur un plan global, notre économie reste désespérément improductive, incapable de subvenir aux besoins essentiels de la population, incapable de produire de nouvelles richesses, et donc de nouveaux emplois durables, livrant ainsi notre jeunesse au désespoir. Et comme celle-ci constitue l'écrasante majorité de la population, c'est le peuple tout entier qui souffre. Mes chers compatriotes, Avec le rétablissement de la confiance, sans laquelle rien n'est possible, et le retour de la compétence, du mérite par le travail et de l'esprit du bien collectif comme critères d'accession à la responsabilité, nous pourrons marcher d'un pas sûr, ferme et efficace sur le chemin du redressement national. Pour y parvenir, nous avons besoin d'une stratégie qui fixe les grandes priorités par une vision à long terme sans jamais sacrifier les réponses urgentes. Nos priorités seront donc orientées principalement vers quatre directions : refondre notre système d'éducation pour projeter notre pays dans la société de la connaissance, mettre en place un système de santé de niveau mondial, assurer notre sécurité alimentaire, bâtir une économie assurant le plein emploi, en inscrivant notre société dans la perspective du développement technologique et sociétal pour préparer notre transition socio-écologique. L'éducation nationale est un enjeu capital pour le renouveau du pays et l'avènement de l'Etat de citoyenneté. Car sans un système d'éducation performant, aucune ressource n'est en mesure de garantir notre avenir. La réforme que nous devons mettre en œuvre sans tarder doit rendre à l'éducation son rôle et sa fonction dans la société pour en faire le lieu privilégié de la formation du citoyen, le moteur de notre économie, le vecteur essentiel de la cohésion sociale et l'outil principal qui accompagne la cellule familiale pour un épanouissement harmonieux de nos jeunes, de leur enfance jusqu'à leur entrée dans le monde adulte. C'est cette éducation que nous voulons pour nos enfants. Celle qui forme la personnalité de chacun dans toute sa singularité pour en faire un citoyen à part entière, mais aussi celle qui transcende les particularismes et les individualismes pour affermir l'unité du peuple sur ses fondements identitaires dans une authenticité décomplexée. C'est l'éducation qui relie les générations entre elles, permettant la transmission de nos valeurs ancestrales pour inscrire le peuple dans ses racines et sa continuité historique, tout en ouvrant aux générations futures le chemin de l'accumulation de la connaissance vers le progrès et l'excellence. Mes chers compatriotes, Notre pays dispose des moyens humains et des ressources financières nécessaires à la mise en place, en quelques années, d'un système de santé qui permette la prise en charge thérapeutique totale de toutes les pathologies connues. Le programme de santé est une priorité nationale, il vise à apporter une réponse rapide à une des préoccupations majeures des citoyens et à projeter l'Algérie parmi les nations les plus avancées dans ce domaine. L'amélioration sensible de la santé de la population permettra, en réduisant de manière spectaculaire les dépenses de soins de santé, c'est-à-dire les soins curatifs qui absorbent l'essentiel du budget, et d'optimiser notre système de sécurité sociale et de santé publique. De tout temps, notre pays a cultivé une tradition agricole. Si, aujourd'hui, il est visé pour ses multiples richesses en matières premières de toute nature, il fut par le passé très convoité pour son potentiel agricole, de l'empire romain jusqu'à l'Europe conquérante des empires coloniaux. Pourtant, aujourd'hui, nous importons massivement des denrées alimentaires. Cette situation est inacceptable et nous allons y mettre fin par une politique ambitieuse et déterminée. Mes chers compatriotes, Ces grands objectifs ne seront réalisables qu'à la condition impérative de l'instauration de l'Etat de citoyenneté dans le cadre d'une véritable transition politique vers une IIe république. C'est notre but. C'est notre engagement. C'est la raison même de ma candidature à la magistrature suprême du pays. La citoyenneté est applicable à notre pays, parce qu'elle est au fondement même de l'organisation traditionnelle de la société algérienne et elle est conforme à la vision sociétale de notre religion très majoritairement suivie. Pour réaliser l'Etat de citoyenneté, nous mettrons en place, dans le cadre de la transition politique, des structures et des mécanismes construits à l'appui de la citoyenneté sur la base d'un dénominateur commun fixant les valeurs pérennes, les grands principes de l'identité nationale plurielle et les exigences de la gouvernance. Une gouvernance réactive, fondée sur l'équité et la justice sociale, constamment à l'écoute des préoccupations et des aspirations des citoyens et des citoyennes. La citoyenneté constitue ainsi le vecteur porteur d'un véritable Etat national républicain, apte à anticiper les évolutions et les changements sur les scènes régionales et mondiales, à prémunir le pays contre les dérives de toute nature en neutralisant les conflits idéologiques ou identitaires et à inscrire notre nation dans une stratégie de puissance. Pour ce faire, il faut réhabiliter nos valeurs, celles de l'intégrité, de l'honnêteté, de l'exemplarité et du goût du travail comme instruments de libération et d'autonomie individuelle et collective de chaque citoyen et de chaque citoyenne de notre pays. Réhabiliter ces valeurs est une condition absolument nécessaire pour rétablir la confiance et assurer la mobilisation de tout le peuple vers cet idéal d'une citoyenneté pleine et entière. Mes chers compatriotes, Pour déployer cette stratégie, il est nécessaire d'assurer notre sécurité. Notre politique de sécurité extérieure sera basée sur le développement de la coopération et de l'amitié avec les peuples et, en premier lieu, avec tous nos voisins. Notre pays est de tradition pacifique, il n'a jamais agressé aucun pays. Conformément à cette tradition, notre politique sera toujours de privilégier la résolution des conflits par le dialogue responsable. Notre diplomatie sera renforcée. Elle aura pour principale tâche de défendre nos intérêts et le respect des droits, de la sécurité et de la dignité de tous nos ressortissants à l'étranger, et d'assurer leur participation effective à l'œuvre de redressement national. Elle développera la coopération avec tous les peuples qui le désirent pour que la voix de notre pays soit entendue à la hauteur de nos ambitions de paix et de prospérité pour l'Humanité. Ensemble, nous allons redresser le pays et bâtir l'Etat national républicain rêvé par nos valeureux martyrs, celui qui rétablira notre citoyenneté dans tous ses attributs, assurera la sécurité, la paix et la prospérité de notre peuple, et sèmera une nouvelle espérance en l'avenir dans le cœur de notre jeunesse. Mohand-Tahar Yala Nom Adresse email