Ahmed Ouyahia inspire une nouvelle polémique en déclarant sur Berbère TV que "ce n'est pas Massinissa qui a inscrit tamazight langue nationale dans la Constitution, mais Bouteflika". Faisait-il référence au roi numide ou visait-il le jeune Guermah, mort des suites de maltraitances subies dans les locaux de la gendarmerie de Béni Douala en avril 2001. Visiblement, les personnalités politiques et nationales, qui soutiennent la candidature du président Bouteflika à un quatrième mandat, se relaient pour commettre des erreurs d'appréciation et les dérapages verbaux. Lors de sa prestation sur Berbère TV, jeudi soir, Ahmed Ouyahia, fraîchement nommé ministre d'Etat, directeur de cabinet à la présidence de la République, s'est départi de la retenue qu'il s'est imposé sur le plateau d'Ennahar TV la semaine dernière. D'emblée, il a exprimé sa détermination à s'impliquer activement dans la campagne électorale du Président-candidat et de défendre le bilan de ses trois mandats précédents. Pour mieux séduire les électeurs, il a rappelé que c'est durant ces quinze ans que tamazight a été constitutionnalisée langue nationale : "Personne ne peut nier que dans l'histoire de notre pays, c'est durant le mandat du président de la République (Abdelaziz Bouteflika, ndlr) que tamazight a été reconnue dans la Constitution langue nationale." Dans un souci de mieux ancrer "cette vérité" dans les esprits, il a fait une déclaration équivoque qui risque d'être mal appréciée par la population, notamment en Kabylie : "Ce n'est pas Massinissa qui a inscrit tamazight langue nationale dans la Constitution, mais Bouteflika." Il est utile, dès lors, de se demander à qui l'ancien Premier ministre faisait-il exactement référence ? Parlait-il du roi amazigh, qui a réussi à unifier la Numidie contre Carthage en l'an 204 avant l'ère chrétienne ? Il se serait, là, montré inconvenant vis-à-vis d'une emblématique icône de l'Histoire, en la comparant défavorablement à l'actuel président de la République. Au-delà, les internautes ont relevé, à juste titre, qu'à l'époque du roi Massinissa, le concept de Constitution n'existait pas encore. Le parallèle devient alors un non-sens. Il se pourrait aussi qu'Ahmed Ouyahia ait fait allusion, par ses propos, au lycéen Massinissa Guermah, mort le 20 avril 2001 des suites des blessures subies dans les locaux de la gendarmerie de Béni Douala, localité de Tizi Ouzou. L'on se rappelle que cet incident dramatique avait embrasé la Kabylie pendant des mois, faisant 127 morts, essentiellement des jeunes. En réponse à la colère de toute une région, le chef de l'Etat avait consenti à introduire, dans la Constitution, une disposition qui faisait de tamazight une langue nationale. Il est entendu que c'est le jeune martyr Massinissa et les autres victimes de ce qui convient d'appeler les événements de Kabylie, qui a conduit à la satisfaction d'une revendication portée par plusieurs générations. En évoquant le prénom Massinissa, plutôt que Jugurtha, un autre roi de la Numidie, ou le nom d'un quelconque militant connu de la cause berbère, Ahmed Ouyahia a entouré ses propos d'une ambiguïté qui suppose des intentions assez tendancieuses, en ce sens qu'il dénie aux acteurs des événements de Kabylie le mérite d'avoir imposé la constitutionnalisation de tamazight langue nationale, l'attribuant exclusivement à la volonté du président Bouteflika. Une contre-vérité flagrante car, par ailleurs, Bouteflika avait juré, dès 1999, que tamazight n'allait "jamais être langue officielle" et que "jamais" il n'accepterait qu'elle soit langue nationale sans référendum populaire. S. H. Nom Adresse email