Pour lui, les propositions pour la révision de la Constitution, soumises aux partis et personnalités, sont concoctées à des fins de pérennisation du régime. Une autre note, et non des moindres, vient s'ajouter à la partition contre la démarche du pouvoir concernant la révision constitutionnelle projetée. Autant dans la démarche que dans le contenu. L'ex-secrétaire général du FLN, Ali Benflis, revigoré sans doute par la mobilisation qui s'est manifestée autour de son projet lors de la campagne électorale, a exprimé hier ouvertement son rejet de la logique adoptée par le pouvoir pour réviser la loi fondamentale du pays. Non seulement dans la révision en tant que telle, mais par le fait que la démarche pèche par le déni de la nature de la crise multidimensionnelle qui mine le pays, l'exclusion et les arrière-pensés politiques dont l'objectif est le maintien du régime en place. Les propositions relatives à la révision de la Constitution dont ont été destinataires les partis, les personnalités et les associations ne sont pour lui "qu'une fuite en avant et une diversion". "Le règlement de la crise de régime qui perdure dans sa double forme de crise de légitimité et d'impasse institutionnelle ne peut être la résultante de ces propositions. S'inscrire dans la logique de ces dernières et en cautionner la démarche et le contenu reviendrait, au bout du compte, à accepter ou à se résigner au différé du changement auquel l'Algérie, comme peuple et comme nation, aspire légitimement, ce à quoi je ne peux me résoudre ni aujourd'hui ni demain", a affirmé Benflis dans un communiqué rendu public. C'est donc une fin de non-recevoir que vient de signifier Ali Benflis aux tenants du pouvoir qui s'évertuent depuis quelques jours à convaincre l'opposition à s'asseoir à la table des consultations autour du projet de révision de la Constitution. "Un non-sens politique" et une quête de "caution" "L'examen des propositions de révision constitutionnelle n'invite qu'à une conclusion et une seule : il s'agit d'un non-sens politique absolu. Leurs auteurs y manifestent clairement une perte du sens des réalités, une attitude de déni et le choix de la fuite en avant", écrit Benflis. "Leur but n'est pas d'apporter une réponse à la crise politique et à l'impasse institutionnelle critiques auxquelles le pays est confronté. Il n'est pas non plus de résorber le grave déficit démocratique dont l'Algérie continue à payer le prix le plus lourd en termes d'accumulation des retards politiques, économiques et sociaux", dit-il. Pour Benflis, tout est concocté à des fins de pérennisation du régime. "Ces propositions constitutionnelles sont manifestement le produit de préoccupations étroites du régime en place et certainement pas celui d'un peuple en attente du changement. Elles ne servent que les intérêts des gouvernants du moment au mépris des intérêts véritables des gouvernés", soutient-il. "Qu'il s'agisse de l'approche adoptée, de la méthode utilisée ou de leur contenu même, ces propositions constitutionnelles révèlent un haut degré d'indécision, d'approximation et d'improvisation", souligne-t-il encore. En plus d'accuser le régime de gérer les problèmes sensibles du pays de façon unilatérale, le candidat malheureux à l'élection présidentielle le soupçonne, à travers la démarche adoptée, de chercher seulement la caution. "Et de fait, l'approche adoptée exprime comme jamais auparavant l'attachement du régime en place au traitement unilatéral et autoritaire des problèmes les plus sensibles qui concernent toute la nation. C'est lui seul qui fixe le cap, pose les limites et préempte les choix. La méthode utilisée est, elle aussi, symptomatique des vieux réflexes dont le régime en place n'arrive toujours pas à se départir : ce régime ne veut pas de partenaires, il cherche des cautions. La recherche consensuelle des solutions véritables n'est pas son premier souci, il n'aspire qu'à trouver des alibis." Même le contenu des propositions prête à "étonnement" et à "l'incrédulité" tant elles traduisent, à ses yeux, le décalage du régime et son ignorance des graves défis qui se posent au pays. "Le contenu de ces propositions apparaît décalé et hors de propos dans la mesure où il évite soigneusement de prendre en charge les dimensions réelles de la crise politique et de l'impasse institutionnelle actuelle. Il ignore les grands enjeux pour le pays car son objectif, qu'il n'arrive même plus à dissimuler, est de faire diversion." Pour l'ouverture d'un processus politique global comme lors de la campagne électorale, ou dans sa récente analyse des propositions du pouvoir, Ali Benflis reste formel : l'Algérie est frappée d'une crise de légitimité des institutions et d'un déficit démocratique. "Régler le problème de la légitimité des institutions, les remettre en état de fonctionnement et, d'une manière plus large, faire entrer le pays dans l'ère du changement démocratique, voilà les tâches nationales dont la solution presse et que le peuple algérien attend. De ce point de vue, la révision constitutionnelle telle qu'envisagée et dictée ne participe en aucune manière d'une volonté sincère et d'un engagement résolu à les prendre véritablement en charge", estime Benflis. Selon lui, des "tâches nationales d'une telle ampleur et d'une telle complexité requièrent l'ouverture d'un processus politique global et non le recours à des mesures de circonstances partielles, parcellaires et sans effet. Elles exigent aussi la clarté de l'objectif recherché : l'Algérie démocratique à bâtir et non la pérennité et la survie du régime à assurer. Elles nécessitent, en outre, le recours à un partenariat politique authentique et non la vaine recherche de légitimation, de cautions ou d'alibis." "Elles devraient, poursuit-il, enfin, procéder d'un consensus national réel et non d'approches, de visions et de choix réducteurs imposés". Et à Benflis de décréter : "En conséquence, les propositions de révision constitutionnelles doivent être prises pour ce qu'elles sont : une fuite en avant et une diversion." K K Nom Adresse email