"Exporter, c'est accepter de se faire humilier". Le président-directeur général du groupe Isser Délice, Arezki Issiakhem, un opérateur qui fait deux opérations d'exportation par mois, ne trouve pas de mots plus durs pour décrire le traitement réservé aux exportateurs algériens. "C'est ce que je vis au quotidien", a-t-il indiqué, hier, lors d'une journée d'études, organisée à la résidence d'Etat Djenane el-Mithak à Alger, ayant pour thème "Evaluation des activités du projet de création et de développement de consortiums d'exportation en industries agroalimentaires". Le patron du groupe Isser Délice pense que "les choses doivent changer", parce que, relève-t-il, "actuellement, ce qui est en place, c'est la philosophie de l'importation et non de l'exportation". En d'autres termes, il est plus facile d'importer que d'exporter. Ce n'est pas la première fois que les chefs d'entreprise, en général, et les exportateurs, en particulier, interpellent les pouvoirs publics sur les difficultés d'exporter en Algérie, qualifiées à juste titre "de parcours du combattant". Les constats, établis depuis longtemps, convergent tous vers un déficit de gouvernance et de la très mauvaise qualité d'une administration reconvertie en bureaucratie parasitaire. Résultat : alors que les importations connaissent une évolution rapide, passant de 10 milliards de dollars en 2000 à plus de 50 milliards de dollars en 2014, les exportations hors hydrocarbures restent insignifiantes. Se regrouper en consortium pourra-t-il modifier l'équation ? Certains y croient, d'autres se montrent sceptiques. Le programme de création et de développement de consortiums d'exportation en industries agroalimentaires a été lancé en février 2012 par le ministère de l'Industrie et des Mines en collaboration avec l'Organisation des Nations unies pour le développement industriel (Onudi) et l'ambassade de France en Algérie comme partenaire financier. Il avait pour objectif la création de trois consortiums. Une année après, trois consortiums par filière ont été mis en place. Deux ont été formalisés : le consortium Algerian Agro Cereals (ACC), présidé par le P-DG du groupe Isser Délice, regroupe 6 entreprises de la filière Céréales et dérivés (Isser Délice, Les Moulins de l'épi de blé (MEB), Couscous El-hadja, Maison Lahlou, Société Semoulerie Minoterie l'Etoile (Sosemie), Groupe Aazzouz). Le Groupement interprofessionnel des protéines animales (Gipa), présidé par Boubekeur Yaïci, patron d'Inalca-Algérie, comprend, pour l'heure, 8 entreprises : Inalca Algérie, Prima Viandes, Simpex Afric, ONDPA, Gouraya, Radja Food, Sarl Haal et la laiterie Soummam. Ces deux consortiums sont organisés en Groupement d'intérêt économique (GIE), sans capital, une structure à but non lucratif. Le troisième consortium de boissons, Djazaïr Beverage Export, créé, n'est pas encore formalisé. Les promoteurs de ce consortium n'ont pas encore tranché la forme juridique et évoquent des difficultés pour sa mise en place. Ali Bey Nasri, président de l'association des exportateurs algériens, qui a présidé au début le consortium, avant de passer le flambeau au représentant NCA-Rouiba, estime que la création de consortium "n'est pas une priorité", évoquant la nécessité de mettre en place "le minimum pour développer une économie exportatrice" . Deux autres consortiums, à vocation territoriale, à l'ouest (Tlemcen et Oran) et à l'Est (Béjaïa, Sétif et Bordj Bou-Arréridj), sont en voie de création. La secrétaire générale du ministère de l'Industrie, dans son allocution distribuée à la presse, annonce que des états généraux sur le développement des entreprises industrielles exportatrices seront organisés. M. R.