Ali Benflis : "La situation à Ghardaïa révèle la vacance du pouvoir" "(...) Fait d'une gravité sans précédent et unique dans nos annales nationales, des forces de l'ordre ont investi la rue pour exprimer une exaspération face à la situation intenable qu'elles vivent (...). Quant à la situation délicate de nos forces de l'ordre, elle devrait être considérée avec sagesse et pondération en tenant compte de leurs doléances légitimes et des exigences de leur mission au service de l'Etat (...). Les développements tragiques que vient de vivre cette partie précieuse de notre nation ne sont que la manifestation d'une crise profonde à laquelle une gouvernance mal inspirée, désinvolte et irresponsable n'a pas su où n'a pas pu apporter une solution à la mesure de son ampleur et de sa complexité. C'est, sans conteste, de Ghardaïa même que nous est livrée la réalité de la vacance du pouvoir et des dégâts ravageurs qu'elle provoque sur la gestion des affaires publiques. La tragédie de Ghardaïa n'aurait jamais pris ces proportions avec un pouvoir présent, légitime et crédible. C'est dans le délitement de l'autorité qui s'accentue chaque jour que réside la première source de la durée et des développements de cette tragédie (...)" Mohcine Belabbas (RCD) : "La vacance du pouvoir est la cause principale de cette situation" "C'était prévisible depuis 2011. Les forces de l'ordre sont trop sollicitées pour réprimer des manifestations de citoyens qui ne s'arrêtent jamais, dans une conjoncture où le pouvoir politique reste incapable de trouver des solutions aux problèmes soulevés par les citoyens. Maintenant, s'agissant des manifestations d'hier et d'aujourd'hui, les revendications portant création d'un syndicat autonome et amélioration des conditions de travail de la police sont légitimes. Il se trouve que ces manifestations présentent un problème : comment se fait-il que les renseignements généraux et les services du DRS n'ont rien pu avoir à temps des informations sur les actions programmées par les policiers. Deuxième problème : certains slogans scandés à Ghardaïa sont politiques. Ce qui laisse supposer qu'il y a des forces occultes qui travaillent à instrumentaliser le mécontentement des forces de sécurité. Des slogans tels que ‘Hamel dégage !', renvoient aux mots d'ordre des manifestations du Printemps arabe. Dans tous les cas, la situation est grave et des solutions doivent être apportées en urgence car si le mouvement venait à s'étendre à toutes les wilayas du pays, dans une conjoncture de recrudescence de l'activité terroriste et de multiplication d'actes de violence de toutes formes conjuguées à l'insécurité qui règne à nos frontières, cela constituerait une menace pour les fondements de l'Etat. La vacance du pouvoir au sommet de l'Etat est la cause principale de cette situation." Soufiane Djillali (Jil Jadid) : "Le mouvement des policiers exprime un ras-le-bol" "Ce qui se passe n'est pas du tout une surprise. Avant l'élection présidentielle, nous avions dit qu'une fois réintronisé roi d'Algérie, M. Bouteflika allait s'occuper de sa santé et abandonner le pays au désordre. C'est exactement ce qui se passe. Ce qu'on vit aujourd'hui est l'aboutissement d'un choix irresponsable du Président, de son entourage et de ses amis qui croyaient que l'Algérie est un butin de guerre et qu'ils pouvaient en user et abuser selon leur convenance. Il faut dire à M. Sellal, directeur de campagne du candidat Bouteflika, que le temps des blagues est fini. Les policiers sont des Algériens qui vivent les mêmes problèmes que leurs concitoyens. Ils sont fatigués de devoir, à chaque fois, réprimer le peuple pour protéger un pouvoir incompétent et illégitime. Pour ce qui est de la thèse du complot, je ne lui accorde aucun crédit. Car si les policiers sont aussi facilement manipulables, il ne restera rien de ce pays. Le mouvement de protestation des policiers est plutôt l'expression d'un ras-le-bol. C'est l'absence du Président qui est la cause profonde de cette situation." Abderrezak Makri (MSP) : "Ghardaïa est otage de luttes de clans" "L'Algérie est en péril. La situation est très difficile. Ce qui se passe actuellement est le signe d'une déliquescence de l'Etat. Le fait que ce corps de la police sort dans la rue est paradoxal. C'est sans précédent. C'est ce corps-là qui nous empêchait de marcher dans la rue. C'est une preuve que la situation est très difficile. Le problème de Ghardaïa est un problème interne du pouvoir en place. Je crois que Ghardaïa a été utilisée dans ces guerres intestines entre clans du pouvoir. Je ne dis pas qu'il y a manipulation dans ce qui se passe actuellement dans la police, mais je n'écarte pas l'hypothèse. Une chose est sûre, c'est là le signe de la faillite de l'Etat qui est sérieusement ébranlé. Nos gouvernants se préoccupent plus de leur survie au pouvoir, de la succession de Bouteflika que des problèmes des Algériens et de la stabilité du pays." Propos recueillis par A. C.