L'Ordre national des pharmaciens, ainsi que de nombreuses organisations d'opérateurs pharmaceutiques (Unop, Snapo, Adpha, SAP, ANPP et Alam) conjuguent leurs efforts pour imposer une meilleure lecture de l'avant-projet de loi sanitaire, tant la copie, qui leur est parvenue en août dernier, leur paraît presque aussi obsolète que la loi de 84. Le Comité de liaison et de réflexion, installé dans le but d'étudier l'avant-projet de loi sanitaire a remis, le 15 octobre dernier, une série de propositions d'amendements à l'avant-projet de loi sanitaire. Les professionnels du secteur souhaitent, par cette démarche, rattraper les lacunes et les erreurs commises dans la version préliminaire dudit texte de loi, dont les auteurs n'auraient pas restitué convenablement les recommandations issues des Assises sur la santé, organisées les 16 et 17 juin dernier par la tutelle. Lotfi Benbahmed, président du Conseil de l'Ordre national des pharmaciens, a saisi l'occasion de la tenue des 6es rencontres internationales de pharmacie d'Alger, hier à l'hôtel El-Aurassi, pour énumérer les incohérences de l'avant-projet de loi, relevées par les opérateurs de l'industrie et marché pharmaceutiques. "L'omission de la notion de sanction disciplinaire en réponse à la faute professionnelle et en l'absence de dommages, éléments existant dans les lois et règlements datant de 1990 et qui renvoient le praticien systématiquement aux dispositions pénales, apparaît comme une aberration, voire une régression majeure pour l'organisation de notre système de santé", a-t-il signalé. Il a estimé, en outre, que l'élargissement de la notion de professions de santé aux psychologues et administrateurs "crée une confusion dans la définition (...) et occulte ipso facto la particularité de l'exercice de la médecine, de la pharmacie et de la chirurgie dentaire". Il a ajouté que les "notions relatives aux pratiques professionnelles n'ont pas été assujetties aux principes et pratiques universelles de qualification et de bonnes pratiques". Tout au long de son intervention, Lotfi Benbahmed a continué à sérier les failles de ce qui devrait être la future loi sanitaire, si la copie du ministère de la Santé reste en l'état. Il a jugé, à ce titre, impromptu la création de deux entités distinctes de régulation, alors qu'il était question de centraliser toutes les actions et procédures liées au marché pharmaceutique (enregistrement, homologation, détermination des prix de référence, contrôle de qualité, publicité...) au sein de l'Agence nationale des produits pharmaceutiques. Il a regretté, par ailleurs, que trois propositions, fortement défendues par les pharmaciens, n'aient pas été prises en compte. Il s'agit de la répartition géographique des officines afin d'assurer "une disponibilité et une couverture pharmaceutique de l'ensemble du territoire national", l'institution du statut "de pharmacien assistant" et la notion d'exercice personnel. "Le pharmacien doit être unique propriétaire et unique gestionnaire du fonds de commerce de l'officine pharmaceutique pour éviter des associations qui amèneraient de non-pharmaciens à s'investir dans cette activité", a-t-il conseillé avant de s'insurger contre une promptitude des rédacteurs de l'avant-projet de loi de le vider de sa substance. "Au-delà du fait qu'ils ont ignoré les consignes du ministre de la Santé de reprendre les recommandations des Assises nationales, où apparaissent les orientations du président de la République annoncées à l'ouverture de ces Assises par le Premier ministre d'inscrire la nouvelle loi sanitaire dans la modernité ; où est passé le soutien à la production nationale ?" La critique des acteurs du secteur pharmaceutique est dure, mais fondée. Il s'avère presque grotesque d'attendre vingt ans pour reprendre le projet de révision de la loi sanitaire, vieille quant à elle de trente ans, pour présenter un document imprécis, régressif et en décalage avec les spécificités de l'époque, les besoins de la population et les attentes des professionnels de la santé. S. H.