Le ministre de la Communication a posé, hier, les jalons de la nouvelle approche officielle de la liberté d'expression et de la presse. Ce qui était déjà dans l'air depuis le 8 avril dernier, en terme de gestion du secteur de la presse et de la communication, a été confirmé, hier, par le ministre de la Communication. Désormais, c'est la vision bouteflkienne qui sous-tendra l'orientation politique des médias publics et, si possible, ceux indépendants. Invité hier au forum de la télévision, Boudjemaâ Haïchour a eu le mérite de lever le voile sur la stratégie que compte adopter le gouvernement en vue de mettre de “l'ordre” dans ce secteur. “Le 8 avril marque le début d'un processus, d'une nouvelle vision de la presse telle que déclinée dans la lettre du président de la République à la famille de la presse à l'occasion de la Journée mondiale de la liberté d'expression.” Pour le ministre, le propos de Bouteflika constitue, désormais, une référence essentielle dans la définition des rapports entre le pouvoir et les journalistes. Et quand on sait que la déclaration du président équivaut à une véritable mise au point, voire une menace à l'endroit des journaux qui n'ont pas été tendres avec le candidat à la présidentielle, il est loisible de deviner ce que réserve l'arsenal législatif en préparation. Quand bien même le ministre a loué “les bonnes intentions du président”, il est difficile de ne pas y voir une tentation de réduire drastiquement l'expression plurielle. Cela est d'autant plus vrai, que M. Haïchour annonce l'élaboration d'une batterie de mesures qui devraient réduire la liberté d'expression et celle de la presse à leur portion congrue. Il en est ainsi, par exemple, du code de l'éthique et de la déontologie que son département s'apprête à imposer sous forme d'une loi à laquelle il va astreindre les journalistes. Au-delà de l'entorse au principe universel qui veut que l'éthique et la déontologie relèvent uniquement et exclusivement des compétences des professionnels des médias, il est curieux de constater que le pouvoir semble faire l'impasse sur un conseil qui — malgré ses errements — existe tout de même. Le ministre a certes promis d'ouvrir prochainement des “ateliers de réflexion avec les journalistes”, mais rien ne dit qu'il sera tenu compte des remarques de ces derniers. Entre la tentation liberticide du pouvoir à l'endroit de la libre expression et l'attachement indéfectible des journalistes à leur liberté justement, les deux visons semblent, a priori, inconciliables ; même si Boudjemaâ Haïchour s'est permis d'ajouter un pendant médiatique à la réconciliation nationale, selon les vœux de Bouteflika. “Oui, la réconciliation n'est pas réductible à ceux qui ont pris les armes, mais elle est aussi extensible au domaine des médias.” Le ministre n'a bien sûr pas omis de signaler “les dérives” et les “dérapages” dans certains écrits lors de la campagne électorale pour justifier la nécessité de codifier aussi drastiquement le secteur. Cela ne l'a, cependant, pas empêché de souhaiter des relations moins conflictuelles entre les autorités et les médias auxquels il promet une aide dans le cadre du fonds d'aide à la presse estimé à 79 milliards de centimes. Il n'écarte pas non plus que les délits de presse soient dépénalisés un jour. “Le code pénal ce n'est pas le Coran”, clame-t-il. Haïchour veut visiblement dépassionner le débat sur la presse en se montrant très courtois dans ses réponses et en promettant de visiter tous les journaux pour s'enquérir de leur situation “en toute fraternité”. H. M. Une chaîne de TV en tamazight Le ministre de la Communication a annoncé, hier, le lancement prochain d'une chaîne de télévision en tamazight. Sans indiquer la date de son lancement, M. Haïchour précisera, cependant, qu'elle prendra en charge cette dimension de notre identité dans toute sa diversité. Il a rappelé que ce projet a déjà été adopté dans le cadre du programme du gouvernement. H. M. Talk-show à l'ENTV Boudjemaâ Haïchour a promis, hier, lors du forum hebdomadaire de la télévision que le débat politique contradictoire reprendra incessamment à l'ENTV. Outre l'ouverture de nouvelles chaînes thématiques consacrées à la jeunesse, le ministre souhaite que la télévision nationale s'ouvre au débat d'idées et à la confrontation. “C'est comme cela que je vois l'information et la liberté d'expression”, a assené le ministre. H. M.