Suite aux derniers développements sur la scène internationale au sujet de la question sahraouie, l'ambassadeur de la RASD en Algérie, M. Mohamed Yeslem Beïssat... Liberté : Quelle appréciation faites-vous de la pression qu'exerce, ces derniers temps, l'axe Paris-Madrid sur l'Algérie pour aboutir à une solution négociée du conflit sahraoui ? M. Mohamed Yeslem Beïssat : En réalité, nous sommes surpris que Paris et Madrid, membres du Conseil de sécurité, donc responsables de l'exécution des résolutions de cet organe, notamment celles relatives au Sahara occidental, reviennent à la politique de 1974. Ils avaient essayé de faire appliquer la solution de complot à travers les accords tripartites de Madrid. Ce plan a échoué face à la résistance du peuple sahraoui. Trente ans après, il serait souhaitable que la France et l'Espagne reviennent à la légalité en optant pour le droit à l'autodétermination du Sahara occidental, tel prévu dans le plan de paix de James Baker. Le règlement de ce conflit ne doit pas intervenir dans les réunions de salon, mais à travers les urnes. Pourquoi, selon vous, la France et l'Espagne soutiennent le Maroc ? Si les soucis de ces deux respectables voisins sont motivés par la stabilité et la paix dans la région, nous y adhérons et les encourageons dans cette voie. Nous sommes disposés à contribuer avec toutes les garanties possibles, économiques, sécuritaires ou politiques, parce que nous sommes les premiers concernés en tant que partie faible qui a besoin d'aide et ne représente aucune menace pour la France, l'Espagne ou le Maroc. Les menaces réelles sont la pauvreté, le terrorisme, le sous-développement et l'injustice. Quant aux intérêts de ces deux pays dans la région, nous sommes prêts, si une solution équitable, prenant en compte nos droits, est trouvée, à négocier avec ces parties. Pour quelles raisons le Maroc refuse le plan Baker ? Ce plan était beaucoup plus généreux pour les Marocains que pour les Sahraouis. À titre d'exemple, le corps électoral est composé à 70% de Marocains contre à peine 30% de Sahraouis. En effet, seuls 86 000 Sahraouis ont été recensés et identifiés par la Minurso, contre les 300 000 colons marocains ramenés dans les valises de feu Hassan II lors des différentes marches vertes, dont la dernière remonte à 1991. Les responsables du Front Polisario ont accepté ce plan, comme un sacrifice majeur, pour la paix et la stabilité, mais malheureusement la réponse marocaine fut négative. Rabat est revenu à sa position des années 1970, exigeant une souveraineté marocaine totale que personne ne reconnaît à travers le monde, et une reddition sans condition. C'est peu sérieux et inacceptable ! Mais que veut le Maroc ? Comment voyez-vous l'avenir ? Le Maroc est dans l'obligation de donner une réponse définitive, d'ici le mois d'octobre prochain, date de l'expiration du mandat de la Minurso. À cette période, s'il déclare le référendum caduc, il aura déclaré également le cessez-le-feu entre les deux parties, caduc. Est-ce la volonté de Rabat ? Nous espérons que le Maroc fera preuve de sagesse et collaborera avec la communauté internationale pour régler ce conflit, qui bloque même son propre développement. Que la France et l'Espagne contribuent positivement au règlement de la question, comme elles ont défendu le droit des peuples au Moyen-Orient. Elles doivent faire preuve de justice et d'équité envers tous les peuples du monde car le droit international est un et indivisible. Il s'applique de la même manière partout dans le monde. K. A.