Des enquêtes de la Gendarmerie nationale ont révélé que certains grossistes en médicaments, qui s'approvisionnent chez Saïdal, et des pharmaciens sont mis en cause. Les affaires liées au trafic de la drogue ont certes baissé, mais les quantités saisies vont en augmentant, notamment pour les psychotropes. De 54 494 comprimés saisis en 2003, le chiffre a presque doublé en 2004 avec 100 928, révèle le bilan de la Gendarmerie nationale des neuf derniers mois de l'année en cours. Plus grave encore, le trafic des psychotropes est alimenté par une production locale de la société Saïdal. Le Valzepam est un médicament produit par Saïdal et utilisé par les jeunes sous forme de drogue. Les enquêtes des éléments de la GN ont révélé un gros trafic de ce médicament, notamment dans les régions est du pays, à leur tête Constantine. Subterfuge. “Le plus gros chiffre d'affaires de Saïdal est réalisé dans cette région”, indique un colonel de la GN lors d'un point de presse tenu hier au siège de l'état-major à Chéraga. Selon le conférencier, le trafic est concentré au niveau de six wilayas : Constantine, Blida, Khenchela, Sétif, Tlemcen et Oran. Pourquoi ces régions ? Les services de la GN n'ont toujours pas élucidé ce mystère. “C'est pour nous un véritable mystère”, mais qui peut être expliqué par, entre autres, la concentration de grossistes dans ces wilayas. Car il semblerait que “le mal” des psychotropes est transporté d'une région à une autre par certains grossistes en médicaments qui s'approvisionnent chez Saïdal. “La complicité de certains pharmaciens est également établie”, note l'orateur. Et d'ajouter : “Le Valzepam”, nom commercial du Valzepam fabriqué par Saïdal, inonde le marché parallèle. Plus de 200 grossistes, dont 79 installés à Constantine, sont chargés de la distribution de ce médicament. Même les 23 grossistes qui ont fait l'objet de retrait d'agrément activent en toute impunité. Théoriquement, les grossistes sont approvisionnés au niveau des trois centres de distribution de la société : El-Harrach, Oran et Batna pour, à leur tour, approvisionner différentes officines. Mais rares sont les jours où la marchandise arrive chez les pharmaciens. Les cartons de Valzepam sont détournés au profit de réseaux de trafiquants. “Certains grossistes et pharmaciens, confrontés à des problèmes financiers, ou voulant tout simplement s'enrichir par des voies et moyens illégaux, n'hésitent pas à recourir à ce trafic”, regrette le même orateur. Evidemment, tous les moyens sont bons pour réussir ce détournement en cours d'acheminement du Valzepam. Les grossistes recourent à d'innombrables astuces et autres subterfuges. Certaines factures sont établies au nom de pharmaciens par un simple jeu d'écriture ou de scanner. De même pour les dossiers et les demandes d'achat auprès de Saïdal qui sont facilement trafiqués. La procédure d'achat est toute simple et se fait sur présentation de photocopies de l'agrément, bon de commande, registre de commerce, carte fiscale et bail de location. L'absence de toute enquête préalable à l'octroi d'agrément fait que “celui-ci est parfois délivré à des repris de justice”. Pour freiner les enquêtes des services concernés, les grossistes n'hésitent pas à faire de nombreux KM pour s'approvisionner en dehors de leurs régions de concentration. Ils prennent, également, la précaution de se débarrasser de la moindre trace pouvant aider les enquêteurs à les identifier. “Même les numéros de lots correspondent à plusieurs clients, alors qu'il devrait y avoir un identifiant pour chacun d'eux”, note le conférencier. Et de conclure qu'il est nécessaire de dissuader les trafiquants par la mise en place d'une réglementation plus sévère dans le domaine de la commercialisation et par la régionalisation de l'approvisionnement “pour barrer la route à ceux qui veulent s'enrichir au détriment des jeunes”. Car il faut savoir que le prix vignette du Valzepam est de 112,81DA la boîte de 20 comprimés ; le prix de vente aux grossistes est de 74,05 DA. En revanche, sur le marché parallèle, un comprimé peut coûter entre 25 et 50 DA et la boîte entre 600 à 1 000 DA. De l'argent facile qui explique ce trafic. M. B.