“J'ai transmis les chaleureuses félicitations du président Bush au président Bouteflika à l'occasion de sa réélection… Ces élections ont constitué un jalon très important et très positif dans la voie vers la démocratie pour le peuple algérien.” L'auteur de ces propos n'est pas forcément “un frère” comme on dit dans le jargon officiel algérien, encore moins un admirateur du modèle algérien, mais un représentant de l'Administration Bush. C'est le sous-secrétaire d'Etat américain chargé des affaires du Moyen-Orient, Wiliam Burns, en visite en Algérie à la mi-mai. Dans la bouche de Bush, un homme très peu regardant sur les questions sensibles des droits de l'homme — la guerre en Irak en constitue sans doute la preuve irréfragable — le propos vaut la caution. Mais bien plus, il charrie les relents d'un soutien sans équivoque. Le diplomate américain ne manque pas d'ailleurs d'ajouter : “J'ai exprimé la reconnaissance des Etats-Unis pour l'Algérie quant aux efforts constants et importants qu'elle apporte dans la lutte contre le terrorisme.” À vrai dire, le diplomate américain ne faisait là que répercuter une nouvelle orientation de la diplomatie américaine. Et il est également vrai que l'Amérique n'avait jamais fait de l'Algérie un centre d'intérêt que depuis l'accession de Bush junior au bureau Ovale en 2000. C'est dire donc l'intérêt de savoir aujourd'hui dans quelle mesure l'élection américaine pourrait intéresser l'Algérie. Même si formellement, vue d'Alger, l'identité du locataire de la Maison-Blanche importe peu, il n'en demeure pas moins que la reconduction de George Bush apparaît la mieux espérée en sourdine et celle qu'on applaudira promptement. Pour au moins deux bonnes raisons : la première tient à la qualité des relations amicales qu'entretiennent les deux présidents Bush et Bouteflika qui, souvent, ne manque pas d'ailleurs de qualifier le président américain d'“ami”. Le volume des échanges épistolaires entre les deux hommes, outre l'invitation au sommet du G8 à Seaisland, en juin dernier, est, à ce propos, suffisamment édifiant. La seconde, sans doute la plus importante, tient à “l'identité de vue” pour reprendre une expression usitée dans le jargon diplomatique sur bon nombre de questions. Une communauté de visions qui s'est matérialisée par de nombreuses visites, de part et d'autre, de personnalités, mais aussi par des engagements sur certains dossiers. Il y a d'abord la question sécuritaire : autant Washington qu'Alger sont intéressés pour faire jouer à l'Algérie un rôle de pays pivot dans la guerre contre le terrorisme dans la région du Sahel. Une raison qui a permis d'ailleurs la levée de l'embargo sur les ventes d'armes à l'Algérie sans compter une coopération très étroite entre les services de renseignements des deux pays. Autre aspect : le financement apporté par les Américains au lancement du Centre africain contre le terrorisme dont le siège est établi à Alger et le dialogue permanent dans le cadre de l'Otan. Ensuite économique : intéressés au plus haut point par les investissements dans le domaine des hydrocarbures, les Américains, sous la férule de Bush, ont fait une véritable offensive. En 2003, uniquement, le volume des investissements a été estimé à 2,8 milliards de dollars. Un investissement appelé à connaître une hausse dans les prochaines années. “Le secteur des hydrocarbures, disait en juin dernier Richard Erdman, l'ambassadeur américain à Alger, va rester pour longtemps la partie importante des échanges économiques entre les deux pays.” Il avait aussi annoncé la prévision de 15 projets de coopération. En réponse à cet intérêt, l'Algérie décide de promulguer une nouvelle loi sur les hydrocarbures, chose, convenons-en, qui n'est pas pour déplaire aux Américains. Enfin, il y a les soutiens multiformes comme l'adhésion de l'Algérie à l'OMC, la dynamisation du Nepad ou encore le GMO. C'est dire donc, en définitive, qu'au regard de ce volume de coopération, la reconduction de Bush apparaît pour Alger comme une garantie de la viabilisation et du renforcement des relations entre les deux pays. K. K.