Le prolongement du coma de Yasser Arafat a laissé place à un regain d'activité diplomatique qui n'est pas en faveur d'Israël. Les dirigeants israéliens et palestiniens avaient sans doute pensé à tous les scénarios possibles sauf à celui auquel on assiste depuis quelques jours : un Yasser Arafat, entre la vie et la mort, hospitalisé à Paris. Pour les premiers, deux cas avaient été envisagés depuis longtemps : ou Arafat allait mourir à Ramallah et il y sera enterré par les Palestiniens ; ou il mourrait en exil que lui promettait Ariel Sharon depuis longtemps et, dans ce cas, ses obsèques se seraient déroulées loin d'Israël et des territoires palestiniens autonomes. Les dirigeants de l'Etat hébreu auraient ensuite choisi leurs interlocuteurs palestiniens en favorisant l'émergence de dirigeants favorables à la vision israélienne de la paix. Pour les responsables palestiniens, Yasser Arafat devait décéder dans des conditions normales à Ramallah. Ce qui aurait provoqué un réflexe d'union nationale dans les territoires palestiniens qui profiterait sans doute à la nouvelle direction qui allait être désignée. Mais ces scénarios favorables aux Palestiniens et aux Israéliens ne risquent pas de se produire. Depuis quelques jours, le président de l'Autorité palestinienne, entre la vie et la mort, est hospitalisé à Paris. Une situation qui pourrait durer plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Or, chaque jour qui passe fausse davantage les calculs des uns et des autres et complique une situation déjà difficile. Le prolongement du coma de Yasser Arafat accentue, en effet, la pression sur les dirigeants israéliens. Discrètement, plusieurs pays ont déjà dépêché des délégations à Tel-Aviv pour tenter de convaincre le gouvernement d'Ariel Sharon d'autoriser l'enterrement de Yasser Arafat sur l'Esplanade des mosquées, à Jérusalem. La persistance du Premier ministre israélien dans son refus de voir son vieil ennemi enterré dans la ville sainte risque de nuire considérablement à l'image d'Israël dans le monde. Et la solution de remplacement qu'il propose — un enterrement à Gaza — pourrait priver Yasser Arafat de funérailles dignes de ce qu'il symbolise pour son peuple. Ce qui risque de frustrer les Palestiniens et de rendre explosive la situation dans les territoires autonomes et aussi de rendre quasi impossible toute initiative future en faveur de la paix. Un scénario également redouté par les dirigeants palestiniens. Depuis l'hospitalisation de Yasser Arafat, ces derniers tentent d'afficher un semblant d'unité nationale qui cache mal les risques d'une explosion de violence qui rendrait la situation incontrôlable. Les dirigeants palestiniens qui ont repris une partie des pouvoirs du président palestinien mourant sont peu populaires dans leur pays. Et Israël, après avoir éliminé tous les leaders de l'Intifidha et emprisonné Marouane Barghouti, le dirigeant politique le plus populaire de Palestine, s'est privé (volontairement ?) d'interlocuteurs crédibles dans les territoires occupés. Dans ce contexte, certains mouvements radicaux palestiniens, hostiles au processus de paix, pourraient profiter de la situation actuelle pour donner à Ariel Sharon l'occasion de lancer une véritable guerre contre les Palestiniens. L. G.