Me Abdennour Ali Yahia a explicité la crise algérienne à l'occasion de son périple canadien. Lors d'un entretien avec Thomas Mulcair, chef du Nouveau parti démocrate (NPD), opposition officielle du Canada, il a expliqué les origines de la crise politique algérienne, avant de tracer les contours d'une sortie de crise pacifique. Dans son long exposé, le président d'honneur de la Laddh a réitéré les revendications de l'opposition regroupée au sein de la CNLTD. Pour le vieux militant, l'application de l'article 88 de la Constitution devient une nécessité politique. "Il s'agit d'un article de loi ; mais, chez nous, les lois sont visiblement faites pour ne pas être appliquées, encore moins respectées", a-t-il regretté. Relevant que le statu quo politique est intenable, Me Ali Yahia s'est demandé si les militaires arriveraient à lâcher Bouteflika, lui qui a réussi à mettre la mainmise sur l'institution militaire avec, notamment, la nomination d'un proche à la tête de l'état-major qui, contre tout bon sens, siège au gouvernement en tant que vice-ministre de la Défense. Sur un autre sujet, Me Ali Yahia fera remarquer à son interlocuteur que la problématique identitaire demeure entière avec l'ostracisme qui frappe encore tamazight au pays de Massinissa. L'état des lieux explicité à M. Mulcair ne peut ne pas aborder la question de la corruption qui "gangrène le pays". Me Ali Yahia a, d'ailleurs, rappelé l'implication de SNC Lavalin dans des affaires de corruption pour arracher des projets en Algérie. Mulcair a pris note et promis d'en parler à ses interlocuteurs lors de son séjour en France cette semaine. Par ailleurs, le fondateur de la Laddh est revenu, samedi, à l'occasion d'une conférence publique à Montréal, sur les enjeux démocratiques en Algérie. Pour ce faire, l'orateur a fait une véritable immersion dans le Mouvement national depuis l'Etoile nord-africaine (ENA). "À l'Indépendance du pays, la volonté populaire a été confisquée par ceux qui ont pris le pouvoir par la force. C'est pourquoi, l'Indépendance a engendré la dictature", a affirmé Me Ali Yahia. Celui-ci révélera que c'est le DRS qui dirige le pays. "Bouteflika a dépensé plus de 600 milliards de dollars juste pour asseoir son pouvoir, au lieu de développer le pays", déplore le conférencier qui prédit la chute du pouvoir d'ici avril prochain. "Ça ne va pas durer, la rue va bouger. Bouteflika, âgé et usé, avec une maladie grave et durable, doit partir", plaide-t-il, avant de noter que "le peuple sortira dans la rue pour revendiquer l'application de l'article 88". "Le peuple doit se réapproprier sa souveraineté", dit-il. Abordant la dernière sortie de la délégation de l'Union européenne qui a rencontré la classe politique algérienne, Me Ali Yahia n'a pas manqué de rappeler, "pour l'histoire", que c'est précisément les Occidentaux qui ont soutenu les dictatures dans le monde, y compris en Algérie. Invité par la fondation Tiregwa, Me Abdennour Ali Yahia a eu un programme particulièrement chargé au Canada. Ainsi, après deux conférences à Montréal, le président d'honneur de la Laddh a donné deux communications au Ciram (Centre interdisciplinaire de recherche sur l'Afrique et le Moyen-Orient) de l'université Laval, à Québec, et au département des sciences politiques du collège militaire royal de Kingston, en Ontario. Hier, il a pris part à un buffet à Ottawa, où il est revenu sur la crise que vit la Kabylie. Y. A.