Les animateurs de la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD - partis politiques) qui regroupe le RCD, le MDS, le PLD et des associations de la société civile, ont procédé, hier, lors d'une conférence de presse animée à Alger, à la présentation officielle de leurs propositions destinées à faire sortir le pays de la «crise politique» et provoquer le changement. Intitulée «Plateforme pour le changement démocratique», cette initiative préconise notamment la tenue d'«une conférence nationale qui aura pour mission de désigner un Conseil national de transition démocratique (CNTD)». Ce CNTD aura pour mission, selon les initiateurs de la démarche, de dissoudre toutes les institutions élues, de nommer un gouvernement de transition pour gérer les affaires courantes et d'engager le pays dans une refondation nationale dont la clé de voûte sera la rédaction d'une Constitution qui sera proposée au peuple algérien par voie référendaire. Dans un discours prononcé en guise de préambule à la conférence de presse, maître Ali Yahia Abdennour, militant infatigable des droits de l'homme, a expliqué que «la CNCD (…) veut mettre pacifiquement l'Algérie en marche pour sortir du statu quo, de l'immobilisme politique, de l'échec économique, de la fracture sociale et l'orienter vers la démocratie». Il a ajouté que la structure dans laquelle il siège a pour principale stratégie le rassemblement des partis politiques démocratiques, des syndicats, de la société civile mobilisée et mobilisatrice en mesure d'apporter le concours de leur expérience et de leur compétence et de les mettre au service de la démocratie. Le président d'honneur de la Ligue algérienne des droits de l'homme (LADDH) a, par ailleurs, plaidé en faveur de la restitution du sigle «FLN» à la mémoire collective. Comme à son habitude très critique à l'égard du système en place dont il a comparé les pratiques à celles du colonialisme, Me Ali Yahia Abdennour a soutenu que le changement auquel aspire la société ne peut pas non plus s'accommoder du maintien de Abdelaziz Bouteflika au pouvoir. «L'accélération de l'histoire qui a frappé à la porte de l'Algérie fait du départ du Président un préalable absolu, un impératif même. Il doit passer la main à condition, bien sûr, que les mains soient propres», a-t-il déclaré. Revenant justement au discours prononcé le 15 avril par le chef de l'Etat, maître Ali Yahia Abdennour a qualifié la prestation télévisée du premier magistrat du pays d'«exercice laborieux» qui renseigne sur l'incapacité physique de celui-ci (le président de la République) à gouverner davantage. «Dans son discours à la nation qui n'était qu'un exercice laborieux et une lecture difficile, le Président est apparu à la télévision physiquement affaibli, usé, le geste lent, la voix inaudible par moments. Il a donné l'image pathétique d'un homme épuisé par la maladie, incapable d'assumer sa fonction», a-t-il rappelé. Fort de ce constat, il n'hésitera pas à exiger, en vertu de l'article 88 de la Constitution, le départ du président Abdelaziz Bouteflika. Un article qui stipule que si le chef de l'Etat n'est pas en mesure d'assurer son mandat, il doit être démis de ses fonctions et remplacé par le président du Sénat. Qui doit faire partir le chef de l'Etat ? Ali Yahia Abdennour a répondu qu'il s'agissait là d'une tâche qui revient à ceux qui l'ont ramené, c'est-à-dire l'armée qui doit assumer ses «responsabilités». Néanmoins, il a reconnu ne pas savoir actuellement qui d'entre le DRS, l'armée ou la présidence de la République gouverne et ce qui se trame en haut lieu. Toutefois, le président d'honneur de la LADDH, aujourd'hui âgé de 90 ans, s'est dit convaincu que malgré sa maladie, le chef de l'Etat ne lâchera pas le pouvoir. Cela du moins pas tant, a-t-il poursuivi, que les choses ne se seront pas décantées au sommet du pouvoir. Au chapitre de l'action de la CNCD sur le terrain, maître Ali Yahia Abdennour, Aouïcha Bakhti du Parti pour la laïcité et la démocratie (PLD), Tahar Besbes du RCD et Fadhila Chitour, présidente du réseau Wassila, se sont montrés persuadés que malgré la faible mobilisation, à Alger, des marches organisées dernièrement par leur organisation tous les samedis – qui s'explique, selon eux, par la répression et la présence massive et dissuasive des forces de sécurité – que «le changement se fera par la rue». Ils retiennent aussi que c'est grâce à la CNCD qui a «brisé le mur de la peur» que les étudiants, les médecins, les enseignants et les éléments de la garde communale ont pu manifester et organiser des marches grandioses dans la capitale. Mais quelle que soit la situation, les intervenants ont assuré que la mobilisation se poursuivra durant les prochaines semaines. Invitée à donner son opinion concernant le décès d'Ahmed Kerroumi, militant du MDS à Oran, Mme Bakhti n'a pas hésité à parler d'«assassinat politique». «Nous sommes persuadés qu'il s'agit d'un assassinat politique et non d'une crise cardiaque. C'est un message destiné à nous intimider et nous pousser à renoncer à notre action», a-t-elle déclaré. Mme Bakhti a assuré, néanmoins, qu'elle et ses «camarades» n'ont pas peur et qu'ils ne reculeront devant rien.