Volonté politique L'Algérie a décidé de réduire ses importations qui ont atteint le niveau sans précédent de 60 milliards de dollars, dans la foulée des mesures annoncées lors de la réunion de décembre dernier, pour faire face à la chute des prix du pétrole. Une bonne partie est incompressible.
On ne peut pas toucher aux produits alimentaires indispensables tels que le blé, le lait, les médicaments, les matières premières et demi-produits pour la production nationale qui représentent environ deux tiers de nos importations. En revanche, l'Algérie peut baisser de 10 à 20 milliards de dollars la facture des importations, en rationalisant ses achats à l'étranger. Entre les fausses importations, les surfacturations, les achats superflus et la masse de produits non conformes ou contrefaits qui inondent le marché, c'est un large pan de nos importations qui fait de l'Algérie un pays poubelle et qui peut être retiré. À court terme, du moins (1 ou 2 ans), on peut réaliser de nets progrès dans la réduction de nos importations. Outre une forte volonté politique, il suffit d'appliquer la réglementation de 2004 sur la normalisation qui consacre l'obligation de certificat de qualité et le respect des normes. Avec la mise en œuvre de ce dispositif institutionnel, on aura jugulé le phénomène des fausses importations et des masses de produits contrefaits ou non conformes qui inondent nos marchés. Mais ce serait trop naïf de croire que la difficulté réside uniquement dans les failles du dispositif réglementaire. La situation est beaucoup plus grave. On enregistre dans ce dossier un manque évident de volonté politique. Pour preuve, le laboratoire d'essais destiné à contrôler la qualité des produits industriels, notamment les produits électroménagers et les appareils de chauffage, devant être réceptionné en 2011, n'est pas achevé plus de trois ans après. Comme s'il s'agissait d'un chantier du siècle : une grande autoroute ou une ligne de TGV. Les services de contrôle manquent toujours de moyens humains et matériels. Ils souffrent également de moyens humains et matériels. Le réseau de laboratoires reste insuffisant. Et les fins limiers capables de réaliser des enquêtes sur les courants de fraude sont, soit marginalisés, soit contraints à l'exil ou à la retraite. À cela s'ajoute un assainissement peu suffisant des corps de contrôle où des agents corrompus ou corrupteurs agissent en toute impunité. Tout cela pose la question de la faisabilité de la rationalisation de nos importations comme mesure phare pour faire face à la crise des ressources financières née de la chute des prix du pétrole. D'autant que les solutions structurelles vont prendre du temps pour se mettre en place : une industrie musclée de substitution aux importations, le développement des filières céréales et laits, de la sous-traitance, le développement des exportations hors hydrocarbures et la fiscalisation de l'informel et des nouvelles rentes : l'import-import et l'immobilier. Ces deux dernières solutions ne sont pas liées directement à la rationalisation des importations. Mais elles permettent d'amortir les déficits du budget et de la balance des paiements. Par ailleurs, une politique d'intégration industrielle, en particulier dans le secteur de l'énergie, permettra également de freiner les importations d'équipements. Mais la connexion entre des centres de décision au plus haut niveau et les lobbies de l'import-import entravera sans doute la réussite de ce plan anticrise. Ira-t-on alors vers un scénario d'absence d'une main de fer de l'Etat contre ces résistances ? K. R.