Les prix des fruits et légumes connaissent une importante augmentation ces derniers jours, mettant en difficulté les ménages au revenu moyen qui n'arrivent plus à joindre les deux bouts. La flambée des prix des fruits et légumes a atteint son paroxysme ces derniers jours sur la majorité des marchés. Les tarifs des produits agricoles affichés sur les étals répugnent une large frange de la population notamment les citoyens aux bourses moyennes. Rares sont les ménages qui sortent de ces espaces commerciaux avec des couffins remplis. Avec quelques centaines de grammes de légumes, dégotés cahin-caha par les consommateurs à l'issue d'une longue et affligeante tournée des étals, les paniers exhalent l'odeur de la maigreur à la place de la fraîcheur et du parfum traditionnel des primeurs d'antan. Dépitées, certaines ménagères reprennent le chemin de leur domicile bredouilles, d'autres sont insatisfaites de leurs achats. Les prix affichés les ont complètement abasourdies. Une fois à la maison, il n'y a pas de quoi préparer une simple soupe ou une quelconque recette à base de légumes de saison dès lors que les prix de ces derniers ont augmenté de façon vertigineuse. C'est dire l'incapacité du fonctionnaire qui touche un salaire moyen ou du retraité dont le revenu n'a pas connu de revalorisation, à suivre le rythme des hausses des cours. L'incontournable tubercule qui, jadis, était l'aliment salvateur des pauvres, devient de plus en plus inaccessible. À en juger par son prix qui se situe entre 100 et 120 DA le kilogramme, la pomme de terre n'est plus à la portée de tous. Ce légume annonce ainsi la couleur. Le même tarif est affiché pour la tomate, les navets. Lors de ses achats, le consommateur fait semblant d'ignorer d'autres produits tels que la courgette, le poivron et les petits-pois de par leurs tarifs évalués respectivement à 120 DA, 180 DA et 150 DA ! Les haricots verts, en revanche, brillent par leur absence dans ces vastes places commerciales. Le déstockage de ce produit à partir des chambres froides devait en principe compenser sa rareté en hors saison. Ce n'est pas le cas. La raison est toute simple. Son prix qui avoisine les 400 DA sur les marchés de gros dissuade les détaillants. "À quel prix allons-nous le vendre aux clients ?", s'interrogent ces revendeurs qui, en fins connaisseurs des ficelles du marché, ne veulent aucunement perdre des centaines de dinars qu'engendrerait une mévente indubitable de ce légume. La mercuriale liée aux fruits n'est pas en reste. Ceux de saison, à savoir les oranges et les mandarines sont proposées à environ 100 DA. Quant aux pommes et aux bananes, elles sont tout simplement hors de portée ! Cette tarification, qui dépasse tout entendement, pousse le ménage à faire son deuil de cette "grappe" de légumes, devenus, par la force des choses, produits agricoles de luxe ! En dépit des mesures prises, l'Etat n'arrive plus à assumer son rôle de régulateur. Dans un marché qui fonctionne selon les normes communément requises dans le monde, le niveau des prix est déterminé par le seul mécanisme de l'offre et de la demande. En Algérie, cette règle obéit à d'autres considérations que les pouvoirs publics n'arrivent plus à maîtriser. Focus sur la pomme de terre : la hausse actuelle des prix de ce produit est essentiellement due, avouent les grossistes en fruits et légumes, à une pénurie provoquée. L'Etat n'assume plus son rôle de régulateur Il a été enregistré une surproduction émanant notamment de la région des Hauts-Plateaux qui a poussé les agriculteurs à recourir aux chambres froides pour stocker les quantités nécessaires appelées à être mises sur le marché en cas de production insuffisante et de manque de produit. C'est ce que les agriculteurs appellent dans leur jargon la période de soudure qui coïncide avec les mois de septembre et d'octobre de chaque année. Les fellahs devraient en principe déstocker leur marchandise et la mettre sur le marché. Ce qui n'a pas été fait convenablement. Ils décident de provoquer une pénurie afin de maintenir les tarifs à la hausse. Les producteurs préfèrent la déstocker au compte-gouttes pour que le prix de gros ne baisse pas en dessous des 70 ou 80 DA. L'on s'attendait à une stabilité des tarifs dès le mois de novembre dernier avec l'arrivée d'une nouvelle production des wilayas de Bouira, d'Aïn Defla... Point de baisse ! La flambée des prix des autres légumes s'explique par le fait que ce sont des produits d'hiver et le manque flagrant de main-d'œuvre. Il est quasiment difficile, voire impossible que les récoltes se fassent pendant cette période d'intempéries. Les pistes d'accès aux champs étant boueuses, elles demeurent impraticables. Et les ouvriers chargés de la cueillette manifestent une certaine nonchalance, voire une aversion pour une telle besogne. L'action d'envergure de régulation du marché mise en branle par le gouvernement a, faut-il le préciser, montré ses limites. Le pays souffre toujours d'un manque flagrant en structures et autres espaces à même d'absorber les marchandises mises quotidiennement sur les marchés de gros. Ces derniers ne doivent pas laisser leurs portes ouvertes jusqu'à la fin de l'après-midi et commercialiser les fruits et légumes au compte-gouttes. Car dans d'autres pays, les marchés de gros ferment tôt le matin une fois que les grossistes et détaillants se sont approvisionnés. Les marchés de proximité prennent aussitôt le relais pour la vente des produits. C'est là que la spéculation bat son plein. Les prix entre les marchés de gros et de détail atteignent parfois une hausse de 150%... Reste à savoir si la réception de 128 marchés et la réalisation de 556 marchés de proximité pourraient absorber toute la marchandise mise sur les marchés de gros. L'existence de telles surfaces devrait atténuer un tant soit peu la spéculation. L'absence de la grande distribution notamment pour les produits de large consommation est l'un des principaux problèmes du commerce en Algérie. Avec la réalisation d'hypermarchés et de marchés de gros, l'Etat pourrait, peut-être, réguler le marché de détail et réduire l'inflation provoquée par la faiblesse de la grande distribution. Mais force est de constater que le marché national se caractérise encore par la persistance de l'absence de transparence et de loyauté dans les pratiques commerciales auxquelles se greffent d'autres formes de fraude telles que la contrebande et la contrefaçon. B. K.