"Le développement des ressources humaines est avant tout et surtout un problème de sécurité et d'indépendance nationale", a estimé, hier, le professeur Abdelhak Lamiri, P-DG de l'Insim, lors d'une conférence organisée en marge du Salon national de la formation continue qui se tient à l'Office Riadh El-Feth, à Alger. Le professeur Lamiri, chiffres à l'appui, a démontré l'importance du développement humain dans les "succès stories" des entreprises et des pays développés ou émergents. Il a insisté sur la forte relation entre le développement des ressources humaines et la compétitivité des entreprises. Les études économiques montrent qu'au sein des entreprises d'un même pays, le volume de capital et de main-d'œuvre utilisée explique à peu près 60% de la production. Lorsqu'on fait la comparaison entre pays, ce taux tombe à 40%. Ce qui implique que 60% de la production de biens et de services dans les économies actuelles ne s'expliquent pas par la quantité de capital et de travail incorporée. Les deux facteurs communément avancés pour expliquer cette différence sont la qualité des ressources humaines et les modes de management utilisés. "On comprend mieux pourquoi les politiques économiques en Algérie ont échoué depuis 1962", indique le professeur Lamiri, estimant que "le programme de réindustrialisation, tel qu'il est mené, a une chance sur dix mille d'aboutir". Pour le patron de l'Insim, "les entreprises et les administrations n'ont pas le management qu'il faut pour réussir". M. Lamiri estime qu'un pays ne peut jamais réussir son développement, son émergence avec des personnes qui sont sous-qualifiées par rapport au standard international et avec un management de moindre qualité. Il faut régler la question de la qualité des ressources humaines et du management des entreprises et des institutions, estime-t-il, pour que l'Algérie aspire à devenir un pays émergent. "C'est ce que les pays qui ont réussi ont fait", affirme M. Lamiri, citant, l'Inde et la Chine. "Il n'ont pas mis la charrue avant les bœufs", a-t-il ajouté. Les deux facteurs-clés de succès des firmes et des nations demeurent l'intelligence humaine et l'information. "Jamais un pays s'est développé avec des cerveaux sous-qualifiés", a estimé M. Lamiri. Le responsable de l'Insim remet en cause le mythe consistant à dire que l'Algérie est un pays qui consacre beaucoup de ressources à l'éducation. "C'est totalement faux", a-t-il indiqué, affirmant que l'Algérie consacre 4,5 à 5,5% de son PIB à l'éducation, au moment où les pays développés dépensent — y compris les dépenses privées — plus de 8% de leur PIB. Pour la formation continue, l'Algérie consacre 0,3% de la richesse nationale au recyclage. Dans les pays développés et émergents, c'est entre 3 et 4% du PIB. La productivité du travail est un indicateur de la qualité des ressources humaines. Le rendement par heure de travail est de 38 dollars en Corée du Sud, 19 dollars au Chili, 20 dollars au Mexique, 32 dollars au Portugal, 58 dollars en France, 60 dollars aux USA, 12 en Tunisie et seulement 6,5 dollars en Algérie. M. Lamiri rappelle qu'en 1964, le PIB de l'Algérie avoisinait 4 milliards de dollars et celui de la Corée du Sud 3,5 milliards de dollars. Aujourd'hui, alors que notre PIB se situe autour de 210 milliards de dollars, celui de la Corée frôle les 1 300 milliards de dollars. "C'est l'intelligence humaine qui crée la richesse. Et la richesse sans intelligence humaine est dilapidée", conclut le professeur Lamiri. M. R.