Depuis quelques semaines, il est question de départ de certains ministres et du rappel de certaines personnalités proches du président de la République. Les spéculations évoquent aussi une restructuration de l'Exécutif avec la création de nouveaux départements. On ne sait si elle est due à l'ambiance de fin d'année ou à l'immobilisme des pouvoirs publics ; la rumeur court et enfle sur un changement imminent de gouvernement. Des dates sont même avancées et certains ont entendu, disent-ils, évoquer un discours de fin de mission présenté par Ahmed Ouyahia devant le Parlement. Inutile de préciser que la fièvre des pronostics a gagné “les ministrables” et tétanisé les appareils de l'Etat. Qu'en est-il exactement de ces rumeurs ? Pour certaines sources, forcément bien informées, Ouyahia reste “pour le moment”, mais plusieurs portefeuilles changent de main. Ainsi, le sort de Sakina Messadi, ministre déléguée à la Communauté établie à l'étranger, de Mohamed Seghir Kara du Tourisme, de Redjimi de la Santé, de Hamlaoui, chargé des Participations de l'Etat, de Haïchour de la Communication, de Khaldi de la Formation professionnelle, de H'mimid de l'Habitat, est donc scellé. La décision de s'en séparer aurait été prise par le président Bouteflika, lui-même, à l'issue des auditions qu'il a eues le mois dernier. Bilan non satisfaisant. Evidemment, ces spéculations sont démenties par d'autres sources qui considèrent que ces ministres sont sur des dossiers qu'ils doivent mener à terme. Le cas de Khalida Toumi, ministre de la Culture, est en revanche moins clair en ce sens que certains la donnent partante de l'Exécutif, alors que d'autres pensent qu'elle sera appelée à la présidence de la République. Son incompatibilité d'humeur avec le ministre des Finances devenant de notoriété publique, le chef de l'Etat envisagerait donc de mettre de la distance entre ses deux ministres. Tout le monde, côté rumeur bien entendu, est d'accord sur ce remaniement ministériel, mais s'embrouille sur le devenir d'Ouyahia. Le chef du gouvernement n'a pas pour l'instant, ni ses proches d'ailleurs, montré de l'inquiétude à ce propos. En revanche, chez ses adversaires, il est affirmé que son maintien n'a été possible qu'après le refus de Chakib Khelil de prendre les rênes du gouvernement. De plus, le président Bouteflika n'a pas réussi à trouver le remplaçant idoine au ministre de l'Energie et des Mines. Le pétrole garde ainsi son ministre et les finances aussi. Benachenhou est unanimement maintenu à son poste étant donné sa totale convergence de vues avec Bouteflika en matière économique. Pour consolider son équipe, ce dernier, justement, compte rappeler Mourad Medelci au ministère du commerce en prévision de l'accord avec l'OMC, notamment. Boukrouh confortablement installé dans le système devra se résoudre à le quitter. Toutefois, le choc pourrait être atténué puisqu'il est question, selon les mêmes “fuites”, de lui offrir une ambassade. Autre rappel, celui de Temmar qui piloterait, dans cette nouvelle configuration, un grand département dont l'objectif serait la privatisation. La gestion actuelle de ce dossier ne serait pas du goût du Président. Yazid Zerhouni a, lui, un peu brouillé les cartes avec sa participation à la rencontre des ministres de la Défense des 5+5. Sera-t-il le futur ministre de la Défense ? Pas sûr, rétorquent quelques initiés du sérail, le ministre de l'Intérieur risque fort d'obtenir l'ambassade à Paris, poste qu'il aurait sollicité à plusieurs reprises. Mais qui remplacerait les autres ministres remerciés ? Là, la rumeur donne sa langue au chat sauf, peut-être, pour le Tourisme qui reviendrait à Amara Benyounès dont le soutien à Bouteflika, pendant et après la campagne électorale, a été particulièrement remarqué. Des ambitions et de l'agitation Cette panne de noms attise les ambitions et l'agitation. Au sein du RND, l'espoir d'une nomination a vite fait de se transformer en revendication de poste. Ouyahia doit régulièrement faire face à ses ouailles, à ce sujet, alors que les observateurs ne cessent d'affirmer qu'il n'a pas voix au chapitre concernant les nominations à ce niveau de responsabilité. Mais c'est un tout autre débat. Si ce remaniement a réellement lieu, il faut évidemment s'interroger sur son opportunité. Pour beaucoup, l'équipe actuelle n'est pas viable d'abord par ses divisions internes, mais également pour ses divergences sur la démarche générale en matière de réformes économiques. Autrement dit, elle est pour l'instant inefficace face à l'urgence de ce processus de refonte économique. Les raisons de cette paralysie sont connues. Le remplacement précipité des ministres FLN pro-Benflis n'a pas permis de réfléchir à la construction d'un gouvernement cohérent basé sur une vision commune de son programme et sur des compétences avérées de chacun dans son secteur. Il fallait rapidement expurger le gouvernement des “dissidents” et nommer les “redresseurs”. Le terrain a depuis mis à mal cette approche. Ce n'est évidemment pas la seule cause du blocage, mais la crise du FLN et les soubresauts post-électoraux ont pris une part importante dans cet état de choses. Le président de la République souhaitant réussir le processus de négociation avec l'OMC, l'accord avec l'UE, ratifier dans les meilleures conditions possibles le traité d'amitié avec Paris et entamer pour de bon les réformes, s'est aperçu qu'il n'avait pas toujours les hommes qu'il fallait. Mais les hommes d'Etat compétents ne se trouvent que rarement au détour d'un complot intrapartisan ou dans les claques électorales. G. K.