Le ministre des affaires religieuses et des Wakfs, Mohamed Aissa, ne laisse personne indifférent. A chacune de ses sorties il affiche des positions sans ambigüité sur plusieurs sujets de société. Son passage au Forum de Liberté, le 22 juin dernier, est venu confirmer son statut, celui de lanceur de débats. Un profil qu'il réclame et assume. D'ailleurs dès le début de sa conférence il a tenu à rappeler sa première apparition au Forum de Liberté qui avait suscité tant de remous. Il avait abordé, ce jour là, le délicat sujet de l'ouverture des synagogues en Algérie. La polémique avait pris une telle propension que le ministre a du finalement de se rétracter. Sans l'avouer clairement, Mohamed Aissa a voulu montrer sa satisfaction d'avoir lancé le débat tout en expliquant que , finalement, la réouverture des synagogues n'était pas une bonne idée... Son retour au siège de Liberté lui a permis d'aborder plusieurs autres sujets. Ainsi il a insisté sur la référence andalouse de l'Islam algérien. "J'ai proposé de dépasser ben Badis parce que c'était une époque coloniale, et de dépasser la période Ottomane (...) parce qu'elle nous a imposé le rite hanafite" a-t-il affirmé, avant d'ajouter " à nous de revenir juste avant, à Cordoue et à l'Andalousie. Nos aïeux sont allés sur place et leurs enfants sont revenus ici après l'inquisition". (voir vidéo en dessous). Réalisation Salim KOUDIL/Liberte-algerie.com L'effet andalou... Cette orientation vers Cordoue a été abordée par le ministre il y a plusieurs mois déjà. Mustapha Hammouche, notre chroniqueur attitré, est revenu sur le sujet dans sa chronique de jeudi passé/ (Lire "Loin de Cordoue" en cliquant ici), Mohamed Aissa avait eu auparavant le soutien de Kamel Daoud., par écrits, et par images. Le lauréat du prix Goncourt du premier roman est allé jusqu'à expliquer "cet islam" sur la chaîne franco-allemande ARTE (voir extrait vidéo en dessous). Passage de Kamel Daoued à l'émission 28' d'Arte (novembre 2014) Le référent national religieux L'andalousie rentre effectivement dans le "référent national religieux", un "titre" martelé par Mohamed Aissa. Pour atteindre cet objectif le ministre a évoqué des programmes de déradicalisation avec comme cadre deux institutions, en phase de création: "l'observatoire contre les dérives sectaires et l'extrémisme religieux" et "l'académie de la fetwa" (voir vidéo en dessous). Réalisation Salim KOUDIL/Liberte-algerie.com D'ailleurs le mini-débat qui s'est déroulé lors du Forum entre un juriste et le ministre est très intéressant à voir. La loi, la chariä et le wahabisme, étaient au menu. La vidéo en dessous en donne un aperçu. Réalisation Salim KOUDIL/Liberte-algerie.com "Le niveau a baissé" Les chantiers du ministre sont énormes et il le sait. D'ailleurs il affirme qu'il ne pourra même pas assister aux résultats de toutes les actions de son département. Les maux sont tellement grands qu'il faut du temps affirme-t-il presque avec dépit. Les raisons invoquées sont multiples. Il y a, entre autres, l'urgence de changer les mentalités "et ça dépasse un ministre et les directives ne suffiront jamais" affirme Mohamed Aissa (voir vidéo en dessous). Réalisation Salim KOUDIL/Liberte-algerie.com Il a rappelé l'épisode du "piège" d'"El Manchar" et dans lequel sont tombés plusieurs médias, algériens et étrangers. L'"info" publiée, au début de ramadan, par ce site"d'informations fausses et complètement saugrenues", concernant Said Sadi et le Ramadan, avait fait le buzz. A tel point que plusieurs organes y ont été piégés. En sus de la presse marocaine, il y a eu celle du Moyen Orient, à l'instar de la version numérique de MBC. Le dernier a avoir cru à la fausse information est le journal algérien "Al Hayat" dans son édition numérique de vendredi passé. Reprenant les mêmes erreurs de MBC, ce quotidien (voir image à droite) rapporte la riposte d'El Azhar à la demande du ministre des affaires religieuses algérien, qu'il nomme...Said Sadi. Un exemple concret, frais, qui vient surtout démontrer que si le "niveau a baissé" c'est que les mass-médias y ont beaucoup contribué. Les responsabilités sont partagées et tout reste à conquérir, et à reconquérir, pour ne pas laisser le terrain aux ignares autoproclamés omniscients et aux lamentations sans effets. Enlever la superstition et les idées reçues Certains comportements de la "population" n'ont pas été épargnés par les critiques du ministre. Il a épinglé ainsi les "idées reçues" tout en indiquant que "les mentalités ont besoin de beaucoup de polémiques pour réagir". Il a également rappelé que la vraie jurisprudence "est de dire ce qui est licite en convaincant la personne qui pose la question" et non de chercher à chaque fois le "haram" (voir vidéo en dessous). Réalisation Salim KOUDIL/Liberte-algerie.com Le programme du système éducatif... Le système éducatif est également inclus dans les grands chantiers du ministère. Répondant à une question pertinente d'un "citoyen soucieux de tous les problèmes qui nous entourent", Mohamed Aissa a précisé que le programme de l'éducation islamique va être revu. Il n'a pas donné de détails, se contentant de préciser que "ça se fera en collaboration avec le ministère de l'éducation nationale". (voir vidéo en dessous) Réalisation Salim KOUDIL/Liberte-algerie.com "J'ai été présent lorsque Arkoun et Al Ghazali..." Le Forum de Liberté a été une occasion de connaitre l'avis de Mohamed Aissa sur le défunt Mohamed Arkoun. Il s'avère qu'il apprécie l'islamologue et d'ailleurs il n'a pas tari d'éloges sur "Ia référence mal comprise en Algérie" qu'est l'islamologue. Mohamed Aissa est ainsi revenu sur la fameuse "altercation" entre Mohamed Arkoun et le théologien égyptien, Al Ghazali. "J'étais présent à Béjaia lorsque Mohamed Arkoun (...) a appelé a relire et non à réécrire le Coran". Continuant son récit, Mohamed Aissa semble "disculper", pour l'histoire, Al Ghazali. Le ministre précise que l'égyptien, ce jour là, aurait été influencé par une "personnalité" (sans la nommer) qui aurait présenté Mohamed Arkoun. comme "un opposant à l"'islam". C'est ce qui expliquerait, selon Mohamed Aissa, l'attitude de Al Ghazali qui aurait "blâmé" devant tous les présents l'islamologue algérien. Si le ministre est "d'accord" avec Arkoun, il l'est moins avec sa progéniture, et c'est à cause de Gilles Kepel. Ce dernier a offert en cadeau un livre de Sylvie Arkoun (probablement « Les vies de Mohamed Arkoun » édité en France, septembre 2014) et à sa lecture Mohamed Aissa n'a pas caché sa déception "j'ai remarqué que c'est une mauvaise étude à mon sens". Et d'ajouter "Arkoun mérite qu"on lui redonne son rayonnement réel, celui d'une pratique de l'islam raisonnable et authentique en même temps" (voir vidéo en dessous). Lire l'article de Liberté: Said Chibane: "Al Ghazali n'a pas chassé Mohamed Arkoun de la salle" en cliquant ici.
Réalisation Salim KOUDIL/Liberte-algerie.com
En désaccord avec Boukrouh sur la réécriture du Coran Interrogé sur le "cas" de Noureddine Boukrouh, le ministre est revenu essentiellement sur une des proposition de l''ex-ministre. Mohamed Aissa s'est dit en désaccord avec la proposition de réécrire le Coran selon l'ordre chronologique de sa "descente" (voir image à droite de la contribution de Boukrouh sur les colonnes du Le Soir d'Algérie, édition du 05 décembre 2015). Le ministre a rappelé qu'une rencontre autour de ce sujet a été organisée par son département "à laquelle nous avions invité monsieur Boukrouh, qui a décliné et qui a envoyé une personnalité qui l'a représenté dans un débat ouvert". Et d'ajouter qu'au final il a été conclu que "la réécriture n'est pas raisonnable". (voir vidéo en dessous). Réalisation Salim KOUDIL/Liberte-algerie.com "I am A Poor Lonesome minister (*) Ce qui est le plus remarqué dans les nombreuses sorties de Mohamed AIssa c'est son insoutenable solitude. Ce titulaire d'un doctorat d'Etat en sciences islamiques semble totalement isolé au milieu de l'agora DZ. Les soutiens, il n'en trouve nulle part dans ses tentatives de secouer cette stagnation religieuse qui sévit depuis longtemps en Algérie. Même ceux qui semblent être d'accord avec lui, se contentent juste de le dire du bout des lèvres. Par contre, ses détracteurs sont très nombreux, surtout du côté des takfisristes et des salafistes, sans oublier les "chouyoukh auproclamés". Lui-même ne cesse d'appeler les "intellectuels" et les "penseurs", à le soutenir dans ces démarches avant qu'il ne soit trop tard.
Salim KOUDIL @SalimKoudil (*)En référence au titre de la chanson entonné par Lucky Lucke à la fin de chaque épisode de la bande dessinée "I am a poor lonesome cowboy" (je suis un pauvre cowboy solitaire). Les autres décryptages de Liberte-algerie.com: - Ibn Arabi, notre cousin mystique DECRYPTAGE-VIDEOS - Boukrouh, version "Penseur" : Décryptage - Le FCE "version Haddad": VIDEOS-DECRYPTAGE