Le mot lutf, employé dans le Coran, signifie "bienveillance". Il provient du verbe arabe latafa, "être bienveillant, manifester de la clémence". Lotfi provient de latîf,"bienvieillant". L'emploi dans le Coran vise à montrer la bienveillance de Dieu qui fait supporter à l'homme les difficultés auxquelles il l'astreint. C'est aussi la faveur ou l'aide apportée à ses créatures, parce que le lutf divin s'applique à de nombreux aspects de la vie : la santé, la raison, le savoir, la richesse... Parmi les Lotfi célèbres, il y a le poète turc du XIV-XVe s, auteur de poèmes d'amour du type ghazal. Il naquit à Harat et mourut presque centenaire, vers 1463. Ses biographes rapportent qu'il mena une vie tranquille et qu'après avoir étudié les sciences profanes, il s'initia au mysticisme et devint soufi. Il fut d'ailleurs un ami du célèbre poète et mystique Djami, considéré comme un saint à Harat. Il écrivit aussi en persan, et fut surnommé "roi et maître de la langue de son temps", en turc et en persan, mais on reconnaît qu'il dut sa célébrité à son œuvre en turc. Il a composé des qacidate et des mathnawis, des couplets rimés traitant de sujets mystiques, mais Lotfi doit sa réputation à ses poésies d'amour. Il a su combiner, avec harmonie, la tradition lyrique persane avec des éléments de la poésie populaire turque, produisant une œuvre, raffinée et pleine de grâce, tout en conservant le charme des chansons populaires. Il utilise aussi, dans ses vers, des éléments de la culture populaire turque, en insérant des proverbes et dictons, en faisant allusion à des coutumes d'autrefois. Son œuvre, principalement un diwân, comportant 548 poèmes, dont 378 ghazals ou poèmes d'amour. Il est aussi l'auteur d'un diwân persan, dont seules quelques pièces ont été conservées. Une autre œuvre, le Dhafar-nâma, est perdue. Selon les biographes de Lotfi, il s'agit d'un mathnawi, ou du brouillon d'un mathnaoui, de plus de 10 000 vers, chantant les exploits de Tamerlan (Timur). Cette œuvre avait été commandée par le fils même de Tamerlan. M. A. H.