"Ils ont dépensé 800 milliards de dollars qui n'ont aucunement bénéficié à la région, et aujourd'hui que les caisses sont vides, ils nous disent qu'on doit partager la misère. Nous leur disons non !", a déclaré un élu du parti. Bien que dans un contexte marqué par un fléchissement sans précédent de la mobilisation citoyenne, le RCD, qui a appelé à une marche populaire, hier, dans la ville de Tizi Ouzou, pour dénoncer l'annulation des projets structurants, le regain de violence des corps constitués dans la wilaya où les bavures se multiplient et le refus d'officialiser tamazight, a, pour le moins qu'on puisse dire, réussi son pari. Plusieurs milliers de personnes ont pris part à cette marche populaire qui a eu pour point de départ l'entrée du campus Hasnaoua, de l'université Mouloud-Mammeri, et pour point de chute la trémie du centre-ville. La foule, à la tête de laquelle étaient présents de nombreux élus du RCD, a été estimée à 20 000 personnes par les organisateurs et à 2 000 par la police. "Nous dénonçons l'annulation des projets structurants dans la wilaya de Tizi Ouzou", "Non à la violence meurtrière des corps constitués", "Tamazight, pour elle nous vivons, pour elle nous mourrons", "Libérez Nacereddine Hadjadj et ses codétenus", "126 martyrs et pas un coupable", "La Kabylie solidaire des Touareg", lit-on sur de longues banderoles déployées par les militants. À ces principaux mots d'ordre se sont greffés de nombreux autres slogans inscrits sur des pancartes arborées au-dessus des têtes tout au long de la marche. "Pas d'Etat militaire, nous voulons un Etat civil", "Pour une véritable transition démocratique", "La souveraineté n'a pas de prix", "Où va l'Algérie ?", "Non à Oujda, non au DRS !", "Système dégage", "Levez le blocus : 63-80 et 2001-2015", lit-on, entre autres, sur ces pancartes. Après avoir arpenté la montée du stade du 1er-Novembre, devant lequel des slogans anti-Hannachi commençaient à fuser de partout, les manifestants ont emprunté le boulevard Lamali-Ahmed longeant le CHU Nedir-Mohamed, puis l'avenue Abane-Ramdane, communément appelé la Grande rue, scandant à tue-tête des slogans hostiles au pouvoir de Bouteflika, et d'autres favorables à l'officialisation de tamazight et à un véritable développement économique de la région. Outre les habituels "pouvoir assassin", "Bouteflika dégage", "Bouteflika-Ouyahia, houkouma irhabya", les marcheurs scandaient également "le pétrole en dollars et le peuple dans la misère", "économie et travail"... Devant la trémie du centre-ville où la marche est arrivée dans le calme sous le regard de nombreux curieux massés sur les trottoirs et d'un dispositif policier des plus discrets, une prise de parole a été organisée par les représentants du parti. "Ils ont dépensé 800 milliards de dollars qui n'ont aucunement bénéficié à la région, et aujourd'hui que les caisses sont vides, ils nous disent qu'on doit partager la misère. Nous leur disons non ! Nous exigeons le maintien des projets structurants de la wilaya ! Nous ne réclamons pas l'impossible mais plutôt nos droits", lancera, à l'adresse de la foule chauffée à blanc, Yacine Aissiouene, un élu du parti à l'APW ajoutant, au sujet de la violence des corps constitués, qu'"en 10 ans, les terroristes n'ont pas tué autant de citoyens dans cette région que ne l'ont fait les services de sécurité". Il dénonce également les attaques contre le patron de Cevital, Issad Rebrab, tout en apportant le soutien du parti à ce dernier. "Rebrab est le seul véritable producteur national créateur de richesses et d'emplois et, aujourd'hui, ils veulent le détruire ! Nous nous y opposerons !", a-t-il ajouté devant une foule qui répondait, tantôt par des slogans en faveur de cet investisseur, tantôt par d'autres contre le pouvoir de Bouteflika. Pour sa part, le sénateur Mohand Ikherbane a souligné que "cette marche de l'espoir couronnée de succès est une preuve que la Kabylie restera encore debout et lorsque la Kabylie est debout, c'est toute l'Algérie qui reste debout". Lors de leurs interventions, Mohand-Arezki Hamdous et Lila Hadj Arab ont appelé chacun à une mobilisation plus large pour l'officialisation de tamazight et pour le maintien des projets structurants, notamment le CHU car, disent-ils, "le peuple n'ira certainement pas se soigner au Val-de-Grâce". S. L.