Bastion incontestable de la démocratie et de la résistance à la dictature du parti unique et réservoir inépuisable de militants désintéressés pendant des décennies, la Kabylie semble être revenue de ses illusions. La région est en train de sombrer dans une inquiétante indifférence. Bélaïd Abrika, qui célèbre Yennayer dans les bureaux d'Ouyahia, et Ali Gherbi qui crie à la manipulation, c'est l'image qu'on retiendra de ce nouveau round de dialogue entre le gouvernement et le mouvement des archs, dont les deux personnages cités en ont constitué les figures les plus emblématiques. L'un pour la wilaya de Tizi Ouzou, l'autre pour celle de Béjaïa. Le fait n'est pas du tout anecdotique. Ajouté à tous les précédents qui ont émaillé toutes les tentatives de régler la crise de Kabylie, il révèle tout le malaise qui mine le mouvement citoyen depuis le “Printemps noir” dont on commémorera bientôt le quatrième anniversaire. À voir toutes les dissensions qui se font jour çà et là, parfois alimentées par les manipulations politiques et plus souvent par des ambitions de personnes qui croient pouvoir se découvrir un destin national, il est à craindre que le sang des jeunes victimes ait été versé pour rien et que la population n'ait été finalement que l'otage de ces mêmes manipulations et ambitions. Bastion incontestable de la démocratie et de la résistance à la dictature du parti unique et réservoir inépuisable de militants désintéressés pendant des décennies, la Kabylie semble être revenue de ses illusions. La région est en train de sombrer dans une inquiétante indifférence. Et la désaffection risque de s'aggraver si l'action politique n'est pas réhabilitée dans le sens de l'intérêt public. Le mouvement des archs n'est pas totalement étranger à cette réalité dommageable. Il était apparu comme un recours après l'échec des partis politiques. Mais au fil du temps, il s'est épuisé dans des combats qui ne sont pas toujours ceux de la population qui a massivement adhéré à ses actions. Aujourd'hui, il semble avoir perdu sa cohésion et sa consistance d'autant que la plate-forme d'El-Kseur, le généreux document qui lui sert de référence, n'est en réalité qu'un assemblage de revendications parfois inconciliables. Et un signe de l'immaturité politique de ses rédacteurs. C'est certainement bien qu'Abrika ait appris à discuter. Mais pourquoi avoir poussé pendant tant de temps à la radicalisation ? Y. K.