Le sommet est considéré comme celui de la dernière chance, car pour de nombreux scientifiques, les contraintes pour des réductions d'émissions, forcément plus soutenues à l'avenir, pèseront lourdement sur les économies nationales. Chaque année, les pays qui ont ratifié la Convention de Rio (déclaration issue de la Conférence des Nations unies sur l'environnement et le développement, tenue à Rio de Janeiro du 3 au 14 juin 1992) tiennent une Conférence des parties (Conference of parties - CoP). La première conférence se réunit à Berlin en mars 1995 et reconnaît la nécessité d'un renforcement des engagements des pays développés. La deuxième se réunit à Genève en 1996 et adopte le postulat que les changements climatiques représentent un danger pour l'humanité. Ce n'est qu'à la troisième, tenue à Kyoto (Japon) en 1997 que les pays adoptent l'objectif de réduction des gaz à effet de serre (GES) de 5,2% à l'horizon 2012 en comparaison de 1990, c'est le protocole de Kyoto. La CoP15 tenue en 2009 devait arriver à un accord pour prendre le relais de Kyoto. Ce ne fut pas le cas pour des raisons de temps politiques des grandes puissances, notamment les Etats-Unis et la Chine qui sont responsables des émissions de GES dans le monde à hauteur de plus de 50%. En fin de compte, le résultat de Copenhague est le consensus obtenu sur la nécessité de limiter la hausse de la température à 2° à la fin du siècle dans un accord en 2015 à Paris. C'est pour cette raison que cette 21e CoP revêt un caractère important. D'autant que le dernier rapport du GIEC (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat) est très alarmiste. Il prévoit une hausse des températures de 0,3 à 4,8° C d'ici 2100. C'est donc en quelque sorte un sommet considéré comme celui de la dernière chance, car pour de nombreux scientifiques au-delà de cette date, les contraintes pour des réductions d'émissions forcément plus soutenues pèseront lourdement sur les économies nationales et les décideurs. Autre bémol, des experts estiment qu'il faudra arriver à contenir la hausse de la température à 1,5° C et non 2° C par rapport à avant la révolution industrielle ; c'est le cas aussi de 43 Etats vulnérables qui ont tenu une réunion à Manille. Au-delà de cette limite, les scientifiques redoutent un emballement aux effets irréversibles, une chute dramatique des rendements agricoles et l'extinction de plusieurs espèces qui n'auront pas le temps de s'adapter. Même pour les négociateurs, les 2° C sont une limite maximale. Il n'est pas impossible que la conférence revienne y compris sur cette limite. Les Etats insulaires veulent moins, et des pays comme l'Inde et l'Arabie saoudite estiment n'être pas concernés par la barre des 2° C. Le pire est qu'un nouveau débat sur la température ressurgisse. Le mix énergétique à venir, car il s'agit de cela, dans le contexte du réchauffement climatique, de l'épuisement des ressources fossiles, de l'explosion démographique, de l'hostilité des opinions publiques au nucléaire et d'un développement industriel rapide, est pour le moins difficile à appréhender. Les initiatives citoyennes sont à encourager, mais les considérations politiques internes aux Etats influents, les lobbyings des pôles énergétiques mondiaux sont en première ligne. Les controverses sur la place future de l'énergie nucléaire (c'est le sujet de la page environnement de ce jeudi) renseignent sur des dilemmes et des arbitrages, qu'en fin de compte des réalités finissent par s'imposer à tous. À moins de bouleverser les paradigmes qui ont cours jusque-là. Mais en attendant, quels que soient les avancées techniques des négociateurs, le poids des Etats-Unis et de la Chine est déterminant. C'est sans doute pour ces raisons aussi que le président français François Hollande n'a pas lésiné sur les déplacements et les contacts médiatisés avec ces principaux décideurs. Une manière aussi de ne pas porter seul le chapeau d'un semi-échec. Pour tous les observateurs avertis, il sera difficile d'aboutir à un accord juridiquement contraignant ; les Américains n'en veulent pas, et ils l'ont réaffirmé récemment par la voix de John Kerry, et les Chinois, comme à Copenhague, ne sont pas prêts pour un mécanisme de vérification. R. S.