Le chef de l'Etat, de même que son Premier ministre, tout en soulignant la gravité de la crise, affirment que la politique sociale de l'Etat sera poursuivie en référence aux principes fondateurs du régime algérien tels qu'édictés par la déclaration du Premier novembre 1954. Au-delà des aspects techniques et financiers contenus dans le projet de loi, des questionnements politiques, longtemps refoulés, relatifs au projet de société que les Algériens veulent construire, apparaissent au grand jour. C'est de bon augure. La crise aura servi au moins à cela. S'il est normal que les pouvoirs publics prennent des mesures pour parer à la crise, faudrait-il aussi qu'ils disent la vérité aux Algériens. Apparemment, le message du président de la République a été mal compris. Jamais un projet de loi de finances n'a soulevé autant d'interrogations, voire de contestations. Pas moins d'une centaine d'amendements ont été apportés par les parlementaires toutes tendances confondues. Qu'il s'agisse de la hausse des prix du carburant, du gaz et de l'électricité, qui impacteront inéluctablement le pouvoir d'achat des citoyens et notamment les couches moyennes et celles les plus vulnérables, de l'absolution des entreprises de réinvestir une partie de leurs bénéfices et des taxes dont elles sont exonérées, et surtout du délestage des subventions générales pour s'orienter ver des soutiens ciblés via l'établissement d'une cartographie des ménages nécessiteux. Sans oublier la privatisation déguisée des entreprises publiques par "l'ouverture de leur capital" (au profit de qui ?) ; tout cet arsenal est structuré pour affaiblir davantage ce qui reste de notre économie productive. Tout le monde a en mémoire la politique de restructuration du tissu industriel préconisée par Abdelhamid Brahimi, ministre du Plan et Premier ministre à l'époque de Chadli ainsi que des conséquences que nous subissons aujourd'hui avec un recul dramatique de notre secteur industriel. Enfin, ce qui semble une bizarrerie, c'est que le code des investissements s'est invité aux débats. Sommes-nous dans une "vente concomitante" ? Personne ne peut y croire sachant l'opacité qui a entouré les opérations de privatisation du temps de Temmar. D'autant que l'opinion publique n'est pas dupe. Elle sait que le pouvoir veut lui faire supporter le coût de la crise. Le ministre des Finances, fraîchement vêtu de son costume de membre du gouvernement, oublieux des propos qu'il tenait lorsqu'il se revendiquait de son statut d'expert indépendant, assène ses "vérités" aux représentants du peuple. "Le gouvernement réfléchit pour aboutir, d'ici 2 ou 3 ans, au ciblage des subventions". Il a ajouté dans sa déclaration s'agissant des articles 66 et 70 du projet de loi relatif à l'ouverture du capital des entreprises publiques et à la règle des 51 /49%, qu'il n'ya "aucun pays au monde, où 100% du tissu économique est public". Ce qui est faux en ce qui nous concerne. Le secteur privé national, en dépit des embûches auquel il est confronté, continue à se développer, à participer à la création de l'emploi et à la relance de la croissance. À cours d'argument, il s'érige "en chargé de mission". Pour quelle force en présence dans l'échiquier politique algérien ? Mais comme il exerce la tutelle sur les impôts, les Douanes etc., pourquoi n'évoque-t-il pas des niches de captation des capitaux que ces secteurs recèlent en termes d'évasion fiscale, de fuite des capitaux et d'inondation du marché national par des produits contrefaits qui concurrencent la production nationale ? Bien entendu qu'il faut sortir du financement de l'investissement et de la relance de la croissance par le Trésor public en mobilisant les ressources de la sphère réelle, mais pour cela, il faut une volonté politique ainsi qu'une amélioration du mode de gouvernance. Malheureusement nous ne sommes pas dans ce cas de figure. A. H.