La loi de finances 2016 est loin de constituer une véritable stratégie de riposte à la crise financière qui affecte le pays. La loi de finances ne répond ni aux attentes des ménages ni des entreprises ni des experts, tel est l'écho qui nous est parvenu de plusieurs sources concordantes. D'abord, l'augmentation des taxes sur l'électricité, le gaz, le gasoil va ajouter une nouvelle couche à une perte de pouvoir d'achat de la majorité des citoyens enregistrée en 2014 et 2015 et qui sera accentuée en 2016 en raison de la prolongation du processus de dévaluation du dinar. Ensuite, la loi de finances 2016 ne comporte pas une véritable stratégie de riposte à la crise engendrée par la chute des prix du pétrole. Alors que plusieurs experts s'attendaient à une baisse importante des dépenses publiques, le gouvernement n'a pas réduit de manière drastique son budget de fonctionnement. Les coupes budgétaires ont touché surtout les dépenses d'investissement. Résultat des courses : le gouvernement va recourir de façon substantielle au fonds de régulation des recettes pour couvrir le déficit budgétaire jusqu'à son quasi-épuisement fin 2016. L'année prochaine constituera donc un répit dans l'adoption des mesures budgétaires douloureuses. Tant que le gouvernement dispose d'un important matelas de dinars dans le fonds de régulation, il peut tergiverser. Mais en 2017, il n'aura pas de larges marges de manœuvre en termes de financement du trou budgétaire. Il serait contraint de toucher aux subventions. Cela veut dire la fin de la paix sociale si l'exécutif n'arrive pas à convaincre d'ici là la population sur la nécessité de recourir à une telle mesure et à mettre en œuvre les mécanismes qui permettent de protéger les couches démunies et moyennes d'une augmentation des prix des produits actuellement subventionnés. Côté entreprises, la loi de finances 2016 n'introduit pas de véritables mesures de promotion de la production nationale. "Il n'existe pas une disposition consacrant la création d'un fonds pour la promotion des entreprises innovantes", a argué Cherif Belmihoub, économiste, consultant du FCE. S'il existe un article accordant une franchise de taxes comme la TVA pour les entreprises innovantes, il ne comporte pas de précisions sur son application (besoin de textes d'application). L'autre contradiction dans la loi de finance est l'augmentation de la TVA pour les produits importés utilisés dans les TIC pour protéger la production nationale. "Les producteurs locaux ne produisent pas toute la gamme. Ils ne produisent pas par exemple les serveurs informatiques. Ce matériel importé sera donc plus cher. Ce qui constituera un frein à la création de sociétés dans le secteur", commente M. Belmihoub . La loi de finances 2016 n'a pas mis fin également à une aberration : le taux élevé de l'IBS dans le secteur des services. "Le législateur ne fait pas le distinguo entre les sociétés de services innovantes, d'appui aux entreprises qui sont indispensables pour la croissance du pays et les sociétés de services basiques dans le commerce et les transports", analyse l'économiste. K. R.