Remplir son réservoir d'essence à Tlemcen est une gageure. Qu'il vente ou qu'il pleuve, le phénomène dure depuis des années. Malgré les saisies quasi quotidiennes de carburant destiné à la contrebande, opérées par la Gendarmerie nationale et les Douanes, les stations-services implantées dans les localités de la wilaya sont prises d'assaut tous les jours de l'aube jusqu'à la tombée de la nuit. Et pour cause. Les trabendistes sont passés par là et ont déjà siphonné les réserves d'essence, de super et de gasoil. Au prix attractif qu'il est en Algérie (0,21 dollar le litre), les gains réalisés de l'autre côté de la frontière algéro-marocaine sont substantiels. Au Maroc, le litre d'essence coûte 1,01 dollar, ce qui représente un bénéfice net d'environ 100 DA par litre pour les trafiquants, si on prend en considération le taux de change parallèle. Quand ce sont des milliers de litres qui sont transbordés par camions vers la frontière en empruntant souvent l'autoroute Est-Ouest, il est facile d'évaluer les bénéfices énormes cumulés par les contrebandiers de plus en plus nombreux à s'investir dans ce créneau porteur. Un seul voyage de Tlemcen vers Maghnia rapporte au trabendiste l'équivalent du salaire d'un ingénieur qui aura travaillé sur chantier deux mois dans des conditions souvent difficiles. Même l'augmentation du carburant envisagée par la loi des finances ne va pas infléchir l'élan fatal des contrebandiers qui privent ainsi les automobilistes de s'approvisionner sans contrainte dans les stations-services, étant obligés de faire le pied de grue durant plusieurs heures dans l'hypothétique espoir de se faire servir 500 DA de ce précieux liquide. C'est-à-dire l'équivalent d'énergie pour deux ou trois jours seulement. B. A.