Sans surprise, la très docile institution présidée par Mourad Medelci a validé la voie parlementaire, plutôt que le référendum, un choix à risque dans un contexte de défiance entre les citoyens et le pouvoir. Le Conseil constitutionnel a mis fin au faux suspense lié à la constitutionnalité des amendements proposés, dans le cadre du projet de révision de la loi fondamentale du pays, approuvé le 11 janvier par le Conseil des ministres, après avoir été préalablement validé en décembre dernier par le chef de l'Etat. Saisi à la même date du 11 janvier, l'instance présidée par Mourad Medelci a rendu son avis motivé jeudi, après huit jours de délibérations, à huis clos, du 20 au 28 janvier. Sans surprise donc, c'est la voie parlementaire qui est préemptée comme mode de révision. Le Conseil constitutionnel s'est appuyé pour cela sur l'article 176 de la Constitution pour motiver sa décision, considérant, en effet, que "le projet ne porte aucunement atteinte aux principes généraux régissant la société algérienne, aux droits et libertés de l'Homme et du citoyen, ni n'affecte d'aucune manière les équilibres fondamentaux des pouvoirs et des institutions constitutionnels". Quand bien même le projet de révision ne chamboule pas l'équilibre des pouvoirs, une option qui aurait alors rendu incontournable le recours au référendum populaire, le Conseil constitutionnel, dans son communiqué, n'a pas manqué, néanmoins, de monter en épingle les changements portés par les propositions d'amendement, comme pour les créditer d'une grande portée. Notamment, "la consolidation de l'unité nationale autour de notre histoire, notre identité et nos valeurs spirituelles et civilisationnelles", "le renforcement des droits, libertés et devoirs et l'indépendance de la justice", "l'approfondissement du principe de la séparation des pouvoirs", "l'amélioration des relations de complémentarité entre les pouvoirs" et enfin "l'attribution à l'opposition parlementaire des moyens constitutionnels". En vérité, le Conseil constitutionnel, une institution tout à fait indépendante de sa volonté, n'avait pas de mot à dire quant au fond, elle s'est juste contentée de mettre les formes et l'habillage juridique pour des options arrêtées par le président de la République. Le mode d'adoption par voie parlementaire étant désormais acté, il faudrait attendre donc la convocation, par le président de la République, des deux Chambres parlementaires en congrès, pour la séance de vote, probablement au Palais des congrès du Club-des-Pins, sous la présidence d'Abdelkader Bensalah. Ce sera, à n'en plus douter, une simple formalité, dans la mesure où la majorité absolue (députés et sénateurs) est acquise au Président, le poids des députés de l'opposition, hostiles au projet, étant insignifiant pour laisser place à quelque suspense. Le choix confortable de la voie parlementaire élimine, de facto, le risque de voir le projet retoqué. Ce qui n'aurait certainement pas été le cas, si le Président avait eu le courage de s'en remettre à la vox populi. Car un référendum dans les conditions actuelles de défiance entre les citoyens, qui ont commencé l'année avec des augmentations des prix tous azimuts, et les pouvoirs publics, est une voie risquée. Toujours est-il que le vote des parlementaires constituera la touche finale pour un projet déjà vieux de quatre années. On se souvient, c'était un soir du 15 avril 2011, date à laquelle le président Bouteflika était apparu à la télévision, très fatigué pour annoncer des "réformes politiques profondes", histoire de détourner le souffle dévastateur du "printemps arabe" qui venait déjà d'arracher à son fauteuil le président tunisien, Benali. Et si, à l'arrivée, le président Bouteflika a tenu sa promesse, s'agissant "des réformes profondes", il va falloir encore attendre. En tout cas, pour lui, qu'on dit actuellement "obsédé" par ce qu'il va laisser à la postérité, c'est raté avec ses amendements cosmétiques. Et c'est encore raté pour lui d'être un Gorbatchev algérien. Omar OUALI