L'Atlas de l'Unesco, paru en février 2016, est revenu sur la situation de la langue maternelle dans le monde et la place de tamazight en Afrique du Nord. Plusieurs "honorables" institutions comme l'Unesco ont tiré la sonnette d'alarme sur la situation inquiétante des langues maternelles souvent "minorisées", et ce, pour moult raisons, notamment la disparition de ses utilisateurs. À l'exemple de l'Afrique du Nord (Algérie, Maroc, Tunisie, Libye et même l'Egypte), dans ces pays existe une langue maternelle plurimillénaire, précisément tamazight avec toutes ses variantes, et un nombre d'interlocuteurs qui varie d'un pays à un autre. Selon le rapport de l'Atlas de l'Unesco de 2016 (marquant, entre autres la Journée internationale de la langue maternelle, coïncidant avec le 21 février), les linguistes et autres spécialistes ont signalé, il y a quelques années, une régression, voire un trépas, pour certaines variantes du berbère en Afrique du Nord. "Qui perd sa langue perd son monde" (proverbe gaélique écossais) Pour l'Unesco, les langues sont les vecteurs de notre culture, de notre mémoire collective et de nos valeurs. Elles sont une composante essentielle de notre diversité et de notre patrimoine vivant. Pourtant, environ la moitié des 6 000 langues parlées aujourd'hui vivent de mauvais jours et elles sont sous menaces. Le processus n'est ni inévitable ni irréversible. D'ailleurs, pour évaluer la vitalité et les dangers de disparition des langues existantes, pour les responsables de l'Unesco, "il est impératif de sensibiliser les populations, les autorités et les interlocuteurs quant à la menace qui pèse sur ce legs inestimable qui n'appartient pas à une communauté, à un peuple ou à une nation, mais à toute l'humanité". Plusieurs facteurs, aussi bien négatifs que positifs, font qu'une prise de conscience émerge à travers le monde. Il est inscrit, dans le même rapport, que "2 473 langues sont en danger, dont 178 langues sont utilisées par 10 à 50 locuteurs. Un total de 146 langues comportant moins de 10 locuteurs, pour 577 langues en situation critique, 230 langues mortes depuis 1950". Pour parer à ce phénomène, des critères scientifiques ont été élaborés pour évaluer la vitalité et le danger de disparition de langues, dont : la vitalité des langues (nombre absolu des locuteurs), transmission de langue de génération en génération, utilisation de la langue dans différents domaines de la vie publique et privée, taux de locuteurs sur l'ensemble de la population, réaction face aux nouveaux domaines et médias, attitudes et politique linguistiques au niveau du gouvernement et des institutions, usage et statut officiels, type et qualité de la documentation. Un protocole qui permet de lancer une alerte quant à la situation d'une langue, qui permet un suivi, et des plus pertinents, quand il est respecté, bien sûr. Le berbère, langue maternelle de plusieurs pays d'Afrique du Nord L'Algérie et le Maroc ont fait des avancées considérables, quant au statut de la langue maternelle. Selon les statistiques, le berbère parlé au Maroc, en Algérie, en Tunisie, en Libye, en Mauritanie, au Mali, au Niger et au Tchad est la langue maternelle des habitants de l'Afrique du Nord. Aujourd'hui, 50% de la population parlent le berbère au Maroc, 30% en Algérie et moins de 5% en Tunisie. Le berbère, qui reste une langue vivante et vitale, devrait être standardisé et enseigné (sic). Selon plusieurs interlocuteurs spécialistes en langues, ces chiffres sont obsolètes et totalement en déphasage avec la réalité. Le contexte exige l'action et la proposition À travers le Grand-Aurès, et surtout les régions connues pour leur combat identitaire des années durant (T'kout, Bouzou, Thagouth, Msara...), les militants considèrent que la langue maternelle des Algériens commence à reprendre sa place, celle qui lui revient. Les noms des lieux en sont témoins (toponymie), en plus de l'ouverture d'un département de langue et culture amazighes (Batna), le grand succès que connaissent le Festival du théâtre amazigh, l'ouverture de classe d'alphabétisation et le grand travail fourni par le Haut-Commissariat à l'amazighité aux quatre coins des Aurès. Pour l'écriture de cette langue Au département de la culture et de la langue amazighes de l'université de Batna 1, la Journée mondiale de la langue maternelle, pour cette année 2016, a un goût bien particulier, surtout après son officialisation. M. Jamel Nehali, chef du département, considère qu'il y a une réconciliation avec l'histoire de l'Algérie. "C'est vrai qu'il y avait une certaine frustration, mais c'est derrière nous. Il va falloir penser à l'avenir, c'est-à-dire, standardiser, répertorier, former et unifier nos efforts". Et d'ajouter : "Nous avons du travail, mais nous avons aussi des capacités pour le faire. Le meilleur qui puisse nous arriver, c'est de propulser ce patrimoine (langue) qui est certes algérien, mais il est aussi mondial, nord-africain et méditerranéen." Pour Salim Guettouchi, enseignant au département de la langue et culture amazighes, il y a une double approche, celle du militant et celle de l'académicien et il jouit de cette double casquette. Il nous dit en l'occurrence : "L'attachement des Amazighs à leur langue est comme leur attachement à leur terre, et c'est cet amour qui a sauvé la langue maternelle." Et de renchérir : "J'assure dans le département les modules relevant notamment de la psychopédagogie et de la didactique qui est ma spécialité et je constate avec grande satisfaction que l'approche et l'appréciation de la culture, la langue et l'histoire amazighes ne cessent de s'améliorer aussi bien dans le milieu universitaire qu'à l'extérieur." RACHID HAMATOU