Un à un, tous "les obstacles", qui se dressaient devant l'opération de "blanchiment" politique de l'ancien ministre, perçue, visiblement, comme une affaire d'honneur par le clan présidentiel, ont fini par tomber. Une semaine seulement après avoir appelé à la réhabilitation des cadres injustement condamnés ou sanctionnés, citant, dans la foulée, l'ex-ministre de l'Energie, Chakib Khelil, le secrétaire général du Front de libération nationale, Amar Saâdani, a vu ses desiderata réalisés, comme par enchantement. Le sulfureux responsable du secteur de l'Energie, dont le nom reste indubitablement lié aux nombreux scandales de corruption qui ont secoué la compagnie nationale des hydrocarbures Sonatrach, est revenu par la grande porte, et le tapis rouge lui a été déroulé, tenez-vous bien, par le wali d'Oran. Tout un symbole, politique s'entend. La réhabilitation évoquée par le patron du FLN, devenu par la force des choses l'éclaireur attitré de ceux qui ont la décision politique, a donc commencé à devenir une réalité, au grand dam de l'opinion nationale qui n'arrive pas à digérer une telle tournure des événements. Mais, en haut lieu, le scénario relatif à l'opération de blanchiment politique d'un ministre considéré comme proche parmi les proches du président Bouteflika semble ficelé depuis bien longtemps. La présence du controversé ex-ministre de l'Energie, en compagnie de sa femme, à la cérémonie de célébration du déclenchement de la guerre de Libération nationale, le 1er Novembre dernier, à l'ambassade d'Algérie à Washington, en constituait, sans aucun doute, le premier acte. Le mandat d'arrêt international lancé par la justice algérienne contre lui, sa femme et ses enfants a fait chou blanc. À Alger, la décision semble avoir été prise depuis bien longtemps de tout faire pour sortir le plus Américain des Algériens du bourbier dans lequel il était empêtré. C'était juste une question de temps. Et le temps semble avoir joué en sa faveur, peut-être même plus rapidement que prévu, puisque, un à un, tous "les obstacles" qui se dressaient devant l'opération de réhabilitation, perçue, visiblement, comme une affaire d'honneur par le clan présidentiel, sont tombés. On a vu ce qu'il est advenu de l'ancien ministre de la Justice et garde des Sceaux, Mohamed Charfi, et de l'ex-procureur général de la cour d'Alger, Belkacem Zeghmati, eux qui ont osé refuser d'obtempérer à des injonctions politiques visant à rayer le nom de Chakib Khelil du dossier Sonatrach II, notamment. Le chef de l'Etat est ensuite allé jusqu'à sacrifier le tout-puissant patron du Département du renseignement et de la sécurité (DRS), Mohamed Mediène, dit Toufik, dont les services ont enquêté profondément dans les affaires de corruption qui ont touché le secteur des hydrocarbures. Mais avant d'étêter le puissant service du renseignement, Bouteflika a commencé par effriter ses différentes composantes, opérant une dissolution du Service central de Police judiciaire (SCPJ) du DRS, directement impliqué dans les investigations en question. C'est dire la place qu'occupe l'ex-ministre de l'Energie sur l'échiquier bouteflikien. Mais pourquoi voudrait-on autant protéger ce personnage, pour le moins controversé ? Est-ce parce qu'il est réellement innocent, victime peut-être d'une machination pour se débarrasser de lui du fait qu'il soit un élément-clé du système Bouteflika ? Ou serait-il l'homme qui sait trop de choses sur les grosses affaires de corruption qui ont éclaboussé le pouvoir actuel ? D'où l'urgence de sauver le soldat Khelil de toutes (les) poursuites judiciaires, voire de le blanchir d'entrée en lui offrant les garanties d'une réhabilitation politique tant attendue par lui et, visiblement, par tout le clan. Serait-ce l'ultime étape du scénario que nous évoquions plus haut ? À l'évidence, tout reste possible. Pourquoi donc pas un retour fracassant au gouvernement, avec le remaniement gouvernemental annoncé imminent et, pied de nez épouvantable à l'opinion nationale, au secteur d'où il avait été chassé, l'Energie en l'occurrence. Une telle éventualité, si elle venait à se réaliser, sonnerait la réhabilitation accomplie, du moins sur le plan politique, de l'ex-ministre. Et dans ce cas, quelle serait sa réaction face à ses détracteurs, aujourd'hui éjectés de leur piédestal ? Les porte-voix du système annoncent déjà la couleur, en recommandant, en guise de représailles, des poursuites en justice contre tous ceux qui étaient impliqués, de près ou de loin, dans les enquêtes liées aux scandales de corruption. Serait-ce le prélude à un nouvel épisode de la guerre des clans, une confrontation qui, jusque-là, a tourné au profit du cercle présidentiel ? H. S.