Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.
Des anciens militaires revendiquent leur "citoyenneté" Réagissant à un article d'"El-Djeich" les mettant en garde contre leur implication dans les débats politiques
Un article intitulé "devoir de réserve", publié dans le dernier numéro de la revue El-Djeich, qui s'apparente plutôt à une consigne destinée aux militaires retraités leur enjoignant de ne plus s'impliquer dans le domaine politique, suscite de vives réactions chez des anciens hauts gradés de l'Armée nationale populaire (ANP), qui y voient une manière de rétrécir leurs libertés en tant que "citoyens à part entière". Dans cet article non signé, il est fait état d'"intrusions sur la scène médiatique" de quelques militaires reversés à la vie civile. On y reproche à ces derniers de faire fi des règles d'éthique qu'ils ont acquises dans les rangs de l'ANP, "en se permettant d'intervenir sur des sujets d'ordre politique concernant notre pays, tantôt pour exprimer des idées ou des opinions sur la politique du pays ou formuler des propositions de politique alternative, et tantôt pour s'attaquer aux autorités". D'où, selon le même article, l'explication de la circulaire émise tout récemment par le vice-ministre de la Défense nationale, chef d'état-major de l'ANP, Ahmed Gaïd Salah, rappelant les personnels de l'ANP à "l'obligation de se conformer à ces règles d'éthique, en particulier le devoir de réserve". Pour l'ANP, "ces comportements ne reflètent guère l'éthique et les traditions militaires (...)". De facto, l'ANP avertit ainsi qu'elle "ne saurait tolérer de telles pratiques, inadmissibles et intolérables, émanant de quelques cadres militaires admis à la retraite, qui peuvent être tout simplement considérées comme une tentative de porter atteinte à son image et qui traduisent une forme d'ingratitude vis-à-vis de l'institution (...)". S'ils ne s'opposent pas à l'obligation de réserve, laquelle s'impose, par ailleurs, à l'ensemble des citoyens par souci de préserver les intérêts du pays, des anciens officiers de l'ANP, contactés hier par téléphone, ne comprennent cependant pas l'attitude du commandement de l'Armée qui leur enjoint de s'abstenir de s'exprimer ou d'exprimer leurs idées et positions par rapport à la situation politique du pays. "Je crois que la loi sur les retraités de l'ANP, encore moins la Constitution, ne nous empêchent pas de nous exprimer sur les questions politiques. Nous sommes avant tout des citoyens à part entière, non ? Et si on exprime nos idées, nous n'obligeons en aucun cas les gens à les adopter", souligne Mohamed Khelfaoui, ancien cadre du DRS, dissous dernièrement par le président de la République. "Citoyens à part entière" M. Khelfaoui souligne en outre que les militaires "n'ont jamais porté préjudice à notre pays, encore moins à l'ANP". Cet ancien officier qui avait débuté sa carrière comme cadet de la Nation rappelle que des militaires ont eu, par le passé, à assumer même des hauts postes politiques. En effet, les exemples sont légion. Si M. Khelfaoui, fils de chahid, se déclare même prêt à remettre la casquette pour défendre le pays, il juge néanmoins que seule la justice est habilitée à juger les actes politiques des anciens militaires en tant que "citoyens à part entière". Abondant dans le même sens, le général à la retraite et ancien commandant des forces navales de l'ANP, Mohamed Yala, note, pour sa part, non sans un brin d'ironie, que si on lui avait dit qu'il allait perdre sa citoyenneté en intégrant l'institution militaire, il n'aurait tout simplement jamais accepté d'être militaire ! Il se demande, par ailleurs, "si les anciens militaires devraient se taire même quand ils voient l'Algérie aller dans le gouffre". M. Yala rappelle que l'ANP avait pourtant "toujours constitué un réservoir d'idées stratégiques pour la construction d'un pays fort". Il dit espérer que "ce n'est surtout pas pour cette raison qu'on veut interdire aujourd'hui aux militaires à la retraite de s'exprimer sur les questions politiques". Le général à la retraite regrette, dans la foulée, que "l'Armée a toujours payé les erreurs des politiques". De son côté, le général-major à la retraite, Abdelaziz Medjahed, lui, préfère nourrir le bénéfice du doute et croire que l'article de la revue El-Djeich s'adresserait plutôt aux militaires en activité dans le cadre de la formation, de l'éducation et de la culture et que la référence aux retraités ne serait qu'"un exemple pour bien faire passer le message". Car il se dit convaincu que si les anciens militaires reversés à la vie civile devaient être jugés pour leurs déclarations politiques, seule la justice serait habilitée à le faire. Farid Abdeladim