La Cnas déterre la loi portant sur les accidents du travail et les maladies professionnelles vieille de 33 ans pour forcer les employeurs à déclarer les procédés à risques auxquels sont exposés les travailleurs. Un créneau qui servirait à renflouer la trésorerie de la Caisse, en difficulté financière. Le directeur général de la Caisse nationale des travailleurs assurés sociaux, Tidjani Hassan Haddam, a souligné, hier, à l'ouverture d'une rencontre sur "la déclaration des procédés de travail susceptibles de provoquer des maladies professionnelles", que l'organisme consent une charge financière importante rien que dans le remboursement des frais médicaux et de médicaments d'environ 5,5 millions d'assurés sociaux ou des ayants droit atteints de diabète et d'hypertension artérielle. Globalement, 29 maladies chroniques sont homologuées par la Caisse, qui a versé, en 2015, au seul chapitre arrêt de travail, 13 275 800 indemnités journalières, dont 10% à des assurés diabétiques (une moyenne de 60 jours de congé maladie par assuré). "Cette augmentation des maladies non transmissibles, auxquelles s'ajoutent les accidents du travail et les maladies professionnelles, ne peut pas laisser la Cnas sans réaction", a-t-il soutenu. Il est dit que durant les trois dernières années, la Caisse a traité 48 000 dossiers afférents à des accidents du travail et listé 500 maladies professionnelles prises en charge. L'impact financier est grand, dit-on, même si aucun chiffre précis n'a été livré aux gens de la presse. Dès lors, il s'agit pour l'organisme de rechercher de nouvelles sources de financement (récente campagne ciblant les employeurs qui ne payent pas les cotisations sociales de leurs salariés) tout en réduisant, autant que possible, les dépenses potentiellement compressibles, qui grèvent considérablement ses revenus. Pour atteindre ce double objectif, il déterre la loi 83-13 relative aux accidents du travail et aux maladies professionnelles, vieille de 33 ans. C'est précisément à l'article 69 du texte législatif qu'il fait référence. Celui-ci stipule : "Tout employeur qui utilise des procédés de travail susceptibles de provoquer des maladies professionnelles, visées au présent titre, est tenu d'en faire la déclaration à l'organisme de Sécurité sociale, à l'inspecteur du travail (...) le défaut de déclaration peut-être constaté...". En vertu de cette disposition, les services de la Cnas ont effectué 13 000 visites d'inspection des entreprises, de 2014 à 2015. Ils ont relevé 22 000 infractions aux conditions de travail normalisées et de manquement au cahier des charges portant sur la sécurité des travailleurs. "Cela, sans compter le constat de l'inspection du Travail et d'autres organismes", a précisé Mme Tiar, directrice des AT-MP au niveau de la Caisse. Les infractions concernent essentiellement les risques de la manutention manuelle et mécaniques, de l'industrie, des chutes en hauteur particulièrement sur les chantiers du bâtiment, les dangers électriques... et les nuisances sonores. Paradoxalement, la surdité représente jusqu'à 40% des déclarations de maladies professionnelles qui parviennent aux agences de la Cnas, en sus de troubles provoqués par les grands bruits, tels que le stress, l'hypertension artérielle et les problèmes cardio-vasculaires ou gastriques. À ce titre, la Cnas est déterminée à forcer les employeurs à déclarer les risques liés à leur domaine d'activité et par là même mettre en place un dispositif de prévention des accidents du travail. Ainsi, l'organisme entend faire, à moyen et long termes, des économies substantielles dans le segment remboursement des accidents du travail et des maladies professionnelles. Souhila Hammadi