L'Algérie est le troisième importateur mondial de blé tendre et le premier importateur mondial de blé dur (50% des échanges mondiaux). Elle est le deuxième importateur mondial de poudre de lait. Une étude sur la sécurité alimentaire élaborée par le Forum des chefs d'entreprise (FCE), présentée hier à l'hôtel El-Aurassi (Alger), souligne la nécessité de repenser le modèle de développement agricole en Algérie. Pilotée par M. Omar Bessaoud, professeur et chercheur à l'Institut agronomique méditerranéen de Montpellier, l'étude relève les progrès "spectaculaires" réalisés en Algérie en matière de sécurité alimentaire. Cependant, "les performances réalisées en matière d'offre agricole au cours de la dernière décennie n'ont, toutefois, pas réduit la dépendance alimentaire de l'Algérie vis-à-vis des marchés mondiaux". L'Algérie est le troisième importateur au monde de blé tendre et le premier importateur mondial de blé dur (50% des échanges mondiaux). Elle est le deuxième importateur mondial de poudre de lait après la Chine. Notre pays a, par ailleurs, le taux de couverture des importations par les exportations agroalimentaires le plus bas de la région Afrique du Nord. Entre 1992 et 2014, ce taux s'est situé au-dessous de 5%. Alors que les importations de l'Algérie ont connu une augmentation inédite au cours de cette dernière période et atteignent des niveaux historiques en 2011 et 2015 (plus de 10 milliards de dollars), les exportations agricoles peinent à atteindre les 500 000 dollars, soit en moyenne 0,5% des exportations totales du pays. Pour M. Bessaoud "la première exigence qui s'impose dans le cadre de l'objectif de réduction de la vulnérabilité alimentaire de l'Algérie, est l'établissement d'un nouvel équilibre entre approvisionnements extérieurs et offre nationale en réalisant l'objectif d'amélioration du taux d'autosuffisance au sein de trois filières prioritaires dont les produits ont un poids décisif sur le profil nutritionnel et les habitudes alimentaires des populations : le blé dur, le lait et la pomme de terre". Deux produits stratégiques, le blé et le lait, peuvent être inscrits dans l'objectif de la conquête d'une meilleure autonomie alimentaire et de la réduction de la dépendance vis-à-vis des marchés mondiaux. "La filière pomme de terre doit être encouragée et être exclusivement orientée vers l'approvisionnement du marché national et des industries de transformation. Il est, en effet, illusoire d'envisager des volumes d'exportation", estime M. Bessaoud. L'option principale à retenir, a-t-il suggéré, est d'améliorer la productivité et les rendements de cette culture afin de stabiliser et abaisser les prix à la consommation afin de les rendre plus compatibles avec les revenus des ménages les plus modestes. Mais plus fondamentalement, le Pr Bessaoud estime que l'on ne peut réaliser des progrès significatifs dans la productivité du secteur de l'agriculture si l'on n'accorde pas à la recherche agricole une place privilégiée. C'est aujourd'hui l'un des points aveugles de la politique publique agricole. "Les dépenses allouées annuellement aux importations de fruits exotiques (banane, mangue, ananas...), aux fruits secs (amandes, raisins secs, pistaches, abricots secs...) et autres fruits (raisins d'Afrique du Sud, pommes, poires...) sont 5 fois supérieures aux dépenses de recherche agricole", relève-t-on. Le Pr Slimane Bedrani, directeur de recherche au Cread, affirme, à ce titre, que l'avenir de l'alimentation humaine "est dans le génie génétique", relevant au passage l'absence de statistiques fiables. L'administration agricole doit impérativement "refonder un système d'information, d'intelligence et de veille économique agricole au service de la décision publique". Sur le plan de la gouvernance, l'étude souligne l'exigence de la création d'une agence nationale de sécurité sanitaire et de sécurité alimentaire. La mise en place d'une agence unique, spécialisée dans le paiement, le suivi et l'évaluation des différents fonds de soutien, est proposée pour éviter le gaspillage et les détournements enregistrés par le passé. Meziane Rabhi