Les quelques progrès constatés au plan global dans le secteur agricole masquent des situations très préoccupantes Les importations de l'Algérie ont connu une augmentation de plus de 10 milliards de dollars entre 2011 et 2015, mais les exportations agricoles peinent à atteindre les 500.000 dollars. Lors d'une rencontre sur la sécurité alimentaire organisée par le FCE et à laquelle ont pris part nombre de chefs d'entreprises et d'experts, le ministre de l'Agriculture, M.Abdesslam Chelgham, a déclaré que «les fonds privés sont les bienvenus dans le secteur de l'agriculture», indiquant que plusieurs demandes d'investissements ont été faites par des opérateurs privés et que les autorités n'ont jamais rejeté le moindre dossier. «Le partenariat public-privé dans le secteur a donné des résultats probants», a-t-il ajouté en annonçant la mise en place d'un plan national de résorption de la jachère, qui représente environ 40% de la surface agricole disponible, afin de répondre favorablement aux demandes de foncier agricole. Le président du FCE a, de son côté, déclaré dans son allocution que les quelque progrès constatés au plan global dans le secteur agricole masquent des situations très préoccupantes. En effet, selon lui, il existe toujours des situations résiduelles de sous-alimentation» du fait que les progrès réalisés sont inégalement répartis au sein de la société». De plus, «malgré une offre locale en augmentation constante, les besoins en alimentation de notre population ne sont satisfaits que grâce au recours croissant aux importations», a-t-il relevé en soulignant que «les industries agroalimentaires restent trop fortement dépendantes des marchés extérieurs, ce qui traduit leur faible connexion avec l'amont agricole et un déficit dans le processus de valorisation de produits locaux». Pour sa part, Boualem Djebbar, P-DG de la Badr et président de l'Abef, a indiqué qu'environ 4800 dossiers ont déjà été pris en charge dans le cadre du crédit Ettahadi pour un montant global de 40 milliards de dinars». Ce faisant, il a affirmé que la situation du secteur agricole algérien est relativement bonne. Néanmoins, à en croire l'étude présentée par Omar Bessaoud, chercheur en agronomie à l'université de Montpellier, l'Algérie est dans une situation très vulnérable. «L'Algérie figure parmi les plus grands pays importateurs de blés au monde. Elle fait partie, depuis le milieu de la décennie 2000, d'un cercle restreint composé de six pays dont les importations sont supérieures à 5 millions de tonnes /an. L'Algérie est le troisième importateur du monde de blé tendre et le premier importateur mondial de blé dur (50% des échanges mondiaux). En tant qu'acteur majeur du commerce mondial des grains, il arrive parfois que ses interventions, par des achats massifs (de 500.000 à plus de 800.000 tonnes), favorisent paradoxalement un maintien, sinon une remontée des cours mondiaux. Elle est le deuxième importateur mondial de poudre de lait après la Chine, et représente, au cours des 5 dernières années, un opérateur tout à fait essentiel sur le marché des produits laitiers avec environ 17% du marché», a-t-il avancé avant d'ajouter: «L'Algérie a le taux de couverture des importations par les exportations agroalimentaires le plus bas de la région Afrique du Nord. Entre 1992 et 2014, ce taux s'est situé au-dessous de 5%», a-t-il ajouté en relevant qu'au même moment où «les importations de l'Algérie ont connu une augmentation de plus de 10 milliards de dollars (entre 2011 et 2015), les exportations agricoles peinent à atteindre les 500.000 dollars, soit en moyenne 0,5% des exportations totales du pays».Au sujet des exportation, le discours de M.Bessaoud est carrément alarmant. «Les exportations agricoles représentent pour l'heure moins de 1% des exportations globales et, à l'horizon 2019, les exportations portent sur la pomme de terre (71.000 t), la tomate industrielle (25.000 t), l'huile d'olive (5 M de litres), le vin (200.000 hl), les dattes (60.000 t) et, accessoirement fraises, abricot, miel et oeufs. Or, toutes les études portant sur les avantages comparatifs démontrent que l'Algérie n'est compétitive, ni pour l'huile d'olive, ni pour la tomate industrielle, ni pour la pomme de terre,» a-t-il affirmé. S'agissant de la sécurité alimentaire, thématique principale du débat, Omar Bessaoud a déclaré que l'Algérie n'en est pas à l'abri. «Ce qui peut être considéré comme un risque au plan de la sécurité alimentaire et qui place l'Algérie dans une situation de vulnérabilité réelle, c'est sa situation de dépendance exclusive de recettes issues des hydrocarbures pour s'approvisionner sur les marchés mondiaux pour des produits qui constituent la base alimentaire des populations (blés, lait, sucre et huiles). La facture alimentaire dépend étroitement d'un marché mondial des hydrocarbures dont les règles de fonctionnement sont dictées par d'autres acteurs qui le dominent, et de facteurs exogènes (croissance mondiale, géopolitique de l'énergie...,) sur lesquels le pays n'a aucune prise», a-t-il affirmé.