Après avoir enregistré en 2014 son premier déficit (-9,28 milliards de dollars) faisant suite à plus de quinze années d'excédent, le compte courant de la balance des paiements, constate la Banque d'Algérie, a été marqué par un creusement de son déficit (-27,48 milliards de dollars) en 2015, dans un contexte de dégradation sensible de la balance commerciale. La Banque d'Algérie vient de publier la note de conjoncture sur les "tendances monétaires et financières au 4e trimestre de 2015", avec quelques mois de retard. Creusement du déficit budgétaire, érosion du Fonds de régulation des recettes (FRR), contraction des réserves de change, dépréciation du dinar face au dollar, tous les indicateurs macroéconomiques se sont détériorés, conséquence de la chute des prix mondiaux du pétrole. Selon la Banque d'Algérie, le prix moyen du pétrole s'est établi à 53,07 dollars par baril en 2015 contre 100,23 dollars par baril en 2014. Cette chute des prix du pétrole (-47,05 %), associée à une très légère baisse des quantités d'hydrocarbures exportées en rythme annuel (-0,28%), s'est matérialisée par un niveau de recettes d'exportation des hydrocarbures de seulement 33,08 milliards de dollars en 2015 contre 58,46 milliards de dollars l'année précédente. "Une telle contraction (-43,41%) confirme l'ampleur du choc externe qui pèse sur l'économie nationale, très vulnérable aux hydrocarbures qui demeurent les principaux produits d'exportation de l'Algérie", souligne la Banque d'Algérie, relevant que le recul des importations de biens n'a pu compenser que très partiellement la forte contraction des exportations d'hydrocarbures. Le solde de la balance commerciale est passé d'un quasi-équilibre en 2014 (+0,46 milliard de dollars) à un déficit de 18,08 milliards de dollars. Les réserves de change ont perdu près de 32 milliards de dollars en un an Après avoir enregistré en 2014 son premier déficit (-9,28 milliards de dollars) faisant suite à plus de quinze années d'excédent, le compte courant de la balance des paiements, constate la Banque d'Algérie, a été marqué par un creusement de son déficit (-27,48 milliards de dollars) en 2015, dans un contexte de dégradation sensible de la balance commerciale."Ce déficit est dû essentiellement à la chute des prix du pétrole, d'une part, et à l'important transfert de dividendes, d'autre part", explique la Banque d'Algérie. Quant au compte de capital et opérations financières, il a enregistré également un déficit en 2015 (-0,06 milliard de dollars contre un excédent de 3,40 milliards de dollars en 2014), suite au transfert de 2,34 milliards de dollars au titre d'une cession par des non-résidents à des résidents de leurs parts dans une entreprise résidente. Au total, le solde global de la balance des paiements de l'année 2015, affiche un déficit de 27,54 milliards de dollars contre un déficit de seulement 5,88 milliards de dollars au titre de l'année 2014. Le déficit record de 2015 conjugué à l'effet de valorisation négatif, a fait que les réserves officielles de change (or non compris) se sont fortement contractées, s'établissant à 144,13 milliards de dollars à fin décembre 2015 contre 159,03 milliards de dollars à fin juin 2015 et 178,94 milliards de dollars à fin décembre 2014. Les réserves de change ont baissé de 34,81 milliards de dollars en une année, entre fin 2014 et fin 2015. "Le niveau des réserves de change reste, cependant, appréciable, couvrant 27 mois d'importation de biens et services, en situation de niveau de la dette extérieure à moyen et long termes historiquement très bas (0,72% du PIB) et d'absence de toute dette extérieure portée par les entreprises du secteur des hydrocarbures depuis plus de dix années", assure la Banque d'Algérie. Dépréciation de 20% du dinar par rapport au dollar américain en 2015 La note de conjoncture évoque une dépréciation du taux de change en 2015 d'environ 20% du dinar par rapport au dollar américain, et une dépréciation plus faible vis-à-vis de l'euro (3,8%). Pour la Banque d'Algérie, le taux de change effectif réel du dinar reste encore à fin 2015 au-dessus de son niveau d'équilibre. Le taux de change a joué dans une large mesure son rôle d'amortisseur de chocs externes, par sa flexibilité soutenue par les interventions de la Banque d'Algérie sur le marché interbancaire des changes. "En effet, afin de prévenir toute appréciation du taux de change effectif réel dommageable pour la stabilité macroéconomique à moyen terme, la relative flexibilité du cours du dinar sur le marché interbancaire des changes permet d'absorber, en partie, l'effet de la chute des prix du pétrole", souligne la Banque d'Algérie. L'impact du choc externe sur les finances publiques est reflété par le creusement du déficit budgétaire et par l'érosion des ressources du Fonds de régulation des recettes (FRR). "Le stock d'épargnes financières du Trésor a chuté à 2 151,6 milliards de dinars à fin 2015 (4 488,2 milliards de dinars à fin 2014). Les ressources du Trésor ont subi une érosion drastique de l'ordre de 2 336,6 milliards de dinars, soit une réduction de 52,1% en l'espace de douze mois seulement, après plusieurs années d'efforts soutenus d'épargne budgétaire", souligne la Banque d'Algérie, relevant "l'urgence d'une plus forte consolidation budgétaire". Les dysfonctionnements du marché à l'origine de l'inflation La Banque d'Algérie relève la résurgence de l'inflation en 2015. "La désinflation significative des années 2013 et 2014, s'est interrompue en 2015", constate-t-elle. Cependant, la Banque d'Algérie laisse entendre que les causes de l'accélération de la hausse des prix en Algérie ne sont pas monétaires. "L'ampleur de l'inflation en 2015 ne peut s'expliquer ni par l'expansion de la masse monétaire, dont le rythme a été quasi nul, ni par l'inadéquation de l'offre à la demande, ni par l'évolution des prix mondiaux des produits de base importés", analyse la Banque centrale. "Il convient plutôt d'en rechercher les causes profondes dans les dysfonctionnements du marché, et notamment de celui des produits agricoles frais, caractérisé par une traçabilité limitée des transactions et une faible régulation", estime-t-elle. Meziane Rabhi