Le projet "Maison de Frantz Fanon" portant musée en hommage au psychiatre algérien et à son apport à la Révolution est en passe d'être enterré. Initié par les membres fondateurs de l'association Frantz-Fanon, ce projet, lancé en 2013 à Blida, avait été soutenu par le ministère de la Culture et le wali de la circonscription. C'est d'ailleurs ce dernier qui, fort de l'aval du Premier ministre, avait alors opté pour la maison où avait résidé Frantz Fanon à son arrivée en Algérie, en 1953, à hôpital Joinville, qui porte aujourd'hui son nom. Une maison devenue "un espace de résistance" après que le penseur et écrivain d'origine martiniquaise s'est engagé, dès 1954, dans la lutte de Libération nationale. Concrètement, le projet en question portait sur la "restauration" de cette maison, avec la préservation de son cachet d'antan pour permettre aux jeunes, en visite guidée, de revisiter un pan de leur Histoire, voire une période cruciale où la cause nationale avait drainé "l'adhésion de tous les Justes, même venant d'ailleurs". Dans une lettre ouverte au président de la République, la professeure Houria Chafaï-Salhi, pédopsychiatre, aujourd'hui à la retraite, et également membre de l'association Frantz-Fanon, interpelle le premier magistrat du pays sur "la concrétisation" de ce projet. Mme Chafaï qui n'est plus à présenter, a, à son actif, de nombreuses années d'activité à l'hôpital psychiatrique Frantz-Fanon de Blida, plusieurs contributions dans des revues scientifiques nationales et internationales (Naqd, Sud-Nord, L'autre...), sans oublier le travail accompli avec les victimes du séisme de 2003 de Boumerdès, aux côtés des autres professionnels de la santé mentale, et son combat au sein de l'association pour la réhabilitation psycho-éducative infanto-juvénile (l'Arpeij). Pourtant, aujourd'hui, elle est "traînée en justice comme une vulgaire contrevenante à la loi" pour avoir refusé de remettre les clés de la résidence Fanon et pour la sauvegarde dudit projet. La Pr Chafaï rappelle, dans ce cadre, que l'assise d'implantation, intégrée au "patrimoine culturel", devait être transférée du ministère de la Santé au ministère de la Culture. Mais, pour des raisons bureaucratiques et celles liées au changement de ministres et de wali de Blida, et faute de suivi, le projet n'a pas avancé. Aujourd'hui, le directeur de l'hôpital psychiatrique de Blida a décidé de récupérer la maison du moudjahid Frantz Fanon comme "logement de fonction". "Mon propos concerne surtout l'intérêt pour la jeune génération de revisiter la pensée lucide de Frantz Fanon, précisément quant à tous ces processus d'aliénation", écrit-elle, notant que c'est à travers la création d'un tel musée, qui jouerait aussi le rôle d'un "centre d'études", que se réalisera le travail "de ressourcement et de réflexion" pour faire découvrir aux jeunes les "valeurs de résistance portées par notre peuple depuis des siècles" et les prémunir contre "les dérives que charrie l'idéologie rétrograde en vogue actuellement". C'est la raison pour laquelle la pédopsychiatre demande au chef de l'Etat de "parrainer" le projet "Maison de Frantz Fanon", pour donner du "crédit" à l'Etat et à ses institutions, quant à l'hommage à rendre à ce moudjahid décédé, il y a 55 ans, qui avait fait de l'Algérie sa "seconde mère patrie et à qui il a consacré ses forces vives, sa fougue, son talent, dans un combat de tous les instants de sa courte vie". Hafida Ameyar