Le ministre des Travaux publics et des Transports a abordé, à l'occasion, autant le volet financier qu'organisationnel, notamment l'absence de management. Visiblement les langues se délient pour attester, enfin, de la réalité de la compagnie nationale et appeler les choses par leur nom. C'est, d'ailleurs, le premier responsable du secteur, en l'occurrence Boudjema Talaï, ministre des Travaux publics et des Transports, qui prend le taureau par les cornes pour révéler une situation des plus biscornues, et le mot est ainsi lâché : "Air Algérie se porte mal", a-t-il reconnu, hier, lors de la cérémonie d'installation du nouveau venu en guise de DG par intérim (et non P-DG), en la personne de Bakhouche Alleche. Le ministre expliquera, à l'occasion, que "la gestion d'Air Algérie, qui fait face à des problèmes d'organisation, doit être transparente". Et de poursuivre : "Tout doit être visible, pas uniquement les comptes, pour que cette entreprise historique reprenne son droit chemin et son développement." On en déduit que c'est l'un des griefs retenus contre Bouderbala, ex-P-DG du pavillon national, mais pas le seul. Talaï a expliqué qu'"Air Algérie n'a pas de problèmes externes, ni de problèmes de marché ou de son environnement, et c'est l'essentiel pour une compagnie aérienne. La compagnie fait face à de grands problèmes d'organisation". En plus clair, le ministre estime qu'"il y a des cadres de très bon niveau à l'intérieur de cette entreprise, de bons pilotes, de bons techniciens et mécaniciens, mais au niveau du management, il n'y a pas d'équipe". Dans ce cadre, M. Talaï a considéré qu'"un directeur général, quel qu'il soit, ne peut gérer seul une compagnie de 10 000 personnes avec une flotte d'une cinquantaine d'avions s'il n'y a pas d'équipe autour de lui". Il se trouve que cette situation ne date pas d'aujourd'hui, alors que Talaï semble le découvrir "subitement". Bouderbala, lui-même, avait dressé, en octobre dernier, un tableau noir sur la situation de la compagnie, indiquant qu'"Air Algérie est mise en difficulté par les compagnies concurrentes", révélant "une baisse substantielle des recettes", prônant "une révision profonde de son mode d'organisation". Cela signifie que le malaise de la compagnie est profond, accentué par des tiraillements continuels entre les deux hommes. Présent à cette cérémonie d'installation, Mohamed Abdou Bouderbala a souligné que la compagnie était "sur rails" et que les résultats du plan de modernisation viendront progressivement. Cela suppose que l'année et plus passée à la tête de la compagnie n'a pas été suffisante pour faire valoir ses compétences. Alors, que peut-il en être pour un intérimaire qu'on donnerait en place pour une durée qui ne saurait excéder six mois à moins d'être maintenu ? Talaï, pour sa part, n'a pas manqué de noter que "l'élément positif de cette désignation est que M. Alleche, qui totalise une quarantaine d'années d'expérience, est un enfant de la boîte et connaît ces problèmes. Donc, ce sera plus facile d'aboutir rapidement à un bon résultat". Rien ne le garantit dans la mesure où Mohamed Salah Boultif, prédécesseur de Bouderbala, était lui aussi un enfant, non seulement de la boîte, mais également du secteur entier qui a fait avancer les choses, mais il n'a pas pu travailler comme il se doit, n'ayant pas les coudées franches, comme nous l'affirment des spécialistes du domaine. Le ministre fait fi de nombreux détails, mais insiste "sur la situation financière défavorable de la compagnie", avisant que "lorsqu'une compagnie commence à perdre son capital, ce sont de mauvais signaux". Les mauvais signaux sont, également, à relever du côté de la qualité de service et de l'image, et du fait, de l'avis du ministre, que "la compagnie doit se suffire à elle-même, elle ne doit pas compter sur le Trésor qui ne peut rien lui apporter (...)". Nabila Saïdoun